Dix ans après le dernier volume de sa trilogie phare, Suzanne Collins agrémentait Hunger Games d’un préquel mettant à l’honneur Coriolanus Snow, son emblématique antagoniste. Si les mauvaises langues y verront une certaine forme d’opportunisme, la démarche n’est pourtant pas dénuée d’intérêt : investir plus profondément les racines de Panem et, pourquoi pas, déroger au prisme central des jeux avait de quoi susciter notre curiosité.
Son adaptation cinématographique, réalisée par le fidèle Francis Lawrence, nuance toutefois nos attentes : car si les origines du Président en devenir sont bien explorées, les « jeux de la faim » sont toujours prédominants. Certes, la chose est légitime au regard de sa fonction de rouage institutionnel, mais le fait est que la redondance est palpable : The Ballad of Songbirds and Snakes y perd ainsi en fraîcheur et, même s’il développe bien le versant politique et social de son univers, aurait gagné à faire plus en ce sens.
Concernant son protagoniste, nous serions bien en peine de nous positionner clairement : sa propension manipulatrice est bien creusée, mais le contraste entre ses bonnes intentions initiales et actes s’ensuivant sonne faux. Le choix de l’auteure d’activer une romance prévisible et gratuite n’aide pas, l’intrigue peinant à convaincre et ne parvenant pas à exacerber ses enjeux, ni à faire de l’ambivalence de son sujet une véritable force. La figure de chaos aguicheur qu’est Lucy Gray, anti-Katniss de son état, est davantage probante bien qu’abimée par les choix hasardeux du dernier acte, chacun changeant d’avis comme de chemise pour un résultat flou.
The Ballad of Songbirds and Snakes n’est donc pas satisfaisant sur le fond : pour autant de pistes et développements probants, redites et grosses ficelles font de ce préquel sage une option plutôt qu’un indispensable. Le divertissement demeure toutefois correct à l’aune d’une forme satisfaisante et, surtout, d’une distribution s’en tirant plutôt bien : Tom Blyth fait illusion malgré l’écriture sur courant alternatif de son personnage, tandis que l’électrique Rachel Zegler a cela de séduisant qu’elle convie facétie et force de concert.
Si les aficionados de l’œuvre originale y trouveront peut-être leur bonheur, les autres auront donc tôt fait de l’oublier.