Sorte d'équivalent médical du Continental, l'hôtel de la saga "John Wick", le lieu dénommé "Hotel Artemis" est en réalité la façade d'une clinique-forteresse secrète pour criminels VIP dans un Los Angeles futuriste dévasté par des émeutes d'une ampleur apocalyptique. Alors que le chaos règne à l'extérieur, le bâtiment est encore épargné grâce aux règles immuables mises en place par son infirmière en chef pour gérer ses patients plus que particuliers. Mais le hasard et les objectifs précis de certains vont faire dégénérer la situation...


D'abord, reconnaissons-le, ce premier film de Drew Pearce emporte instantanément notre adhésion avec son contexte futuriste au bord de l'implosion qui menace à tout moment de déborder sur un apparent havre de paix de malfaiteurs pour le transformer en cocotte-minute bouillonnante. Dans le genre point de départ attractif, "Hotel Artemis" fait très fort ! D'autant plus que l'environnement n'est pas avare en détails assez géniaux (les décors d'une autre époque, les pseudos, les règles du bâtiment, ses équipements ultra-modernes, ses passages secrets...) lui conférant une ambiance aussi rétro-futuriste que dichotomique de la représentation d'un avenir pessimiste plus conventionnel.
Ensuite, "Hotel Artemis" réussit plutôt brillamment les présentations avec sa galerie de personnages à la fois savamment hétéroclites et volontairement stéréotypés afin de se rapprocher des figures d'une certaine idée figée du film noir collant parfaitement avec l'esprit recherché. Le casting complètement fou à cette image (Jodie Foster, Sterling K. Brown, Dave Bautista, Sofia Boutella, Charlie Day, Jenny Slate, Jeff Goldblum, Zachary Quinto) est sans doute d'ailleurs une des plus-values essentielles du long-métrage. Par exemple, le personnage de Jodie Foster a beau être affublé du trauma le plus banal qu'il soit (scénaristiquement parlant, bien entendu), les grands yeux embués de l'actrice suffisent à nous faire ressentir en l'espace d'un instant le fardeau de la douleur accompagnant cette infirmière. Il en est de même pour Sofia Boutella apportant son charisme dévastateur dans son rôle de tueuse à gages française la plus classe de tous les temps, Charlie Day canalisant son énergie comique dans un rôle de pile électrique insupportable pour ses nouveaux colocataires, Jeff Goldblum jouant avec sa coolitude légendaire pour traduire la cruauté dissimulée de son personnage et ainsi de suite, tout ce petit monde paraît se fondre dans cet univers avec une délectation contagieuse. La mise en place est donc des plus alléchantes pour que cet "Hotel Artemis" puisse s'embraser de toutes parts pour notre plus grand plaisir !


Alors pourquoi diable ressort-on du film avec ce sentiment d'une promesse à moitié tenue ? Probablement parce que "Hotel Artemis" passe beaucoup trop de temps à tisser les liens de l'énorme concours de circonstances réunissant tous ces personnages au même moment dans la clinique plutôt que de se focaliser sur l'explosion qui en découle. Évidemment qu'il est intéressant d'exposer les motivations de chacun avant de les faire s'entrechoquer ensemble tels des flacons de nitroglycérine mais le problème est que la plupart d'entre elles ne sont pas vraiment originales ou surprenantes, il en ressort un empilement de situations attendues pour expliquer les objectifs de l'ensemble des protagonistes et que le film prend bien trop longtemps à exposer. Quelques-unes sortent heureusement du lot pour maintenir notre intérêt mais il arrive un moment où l'on n'espère plus qu'une chose, c'est que la situation dérape le plus vite possible pour redonner un coup de fouet à un film qui le mérite tellement vu ses prémices.


Ce sera bien sûr dans la dernière partie que les choses se corseront enfin mais, là encore, ce ne sera pas aussi fou que prévu. Quelques affrontements nous en donneront pour notre argent (mention spéciale à une Sofia Boutella déchaînée) et cette conclusion sera satisfaisante malgré tout mais il manquera clairement ce petit grain de folie que l'on réclamait sans cesse et qui aurait pu emporter "Hotel Artemis" dans les sphères de la série B hautement jouissive.


Le séjour dans cet "Hotel Artemis" aura tout de même été éminemment sympathique mais l'établissement disposait de tels atouts et occupants qu'on était en droit d'en attendre bien plus.

RedArrow
6
Écrit par

Créée

le 25 juil. 2018

Critique lue 741 fois

6 j'aime

RedArrow

Écrit par

Critique lue 741 fois

6

D'autres avis sur Hotel Artemis

Hotel Artemis
Mi4a3L
5

...Bourrage Imprimante...

Avec un excellent casting, une bande annonce prometteuse et un univers SF d'anticipation, Hôtel Artemis est exactement le genre de film stylé 80'S un peu débile qui pouvait me plaire... Et quelle...

le 26 juil. 2018

16 j'aime

5

Hotel Artemis
gruute
6

Les mystères d'Artemis (Gordon)

Même si le genre a toujours plus ou moins existé, la sortie de John Wick a relancé un style et plusieurs films s'en sont clairement inspirés (que ce soit assumé ou pas) : l'actionner brut à...

le 6 juil. 2022

10 j'aime

9

Hotel Artemis
dagrey
5

Intruder alert

En 2028, des émeutes éclatent à Los Angeles en raison d'une pénurie d'eau alors qu'une banque se fait braquer. Les braqueurs trouvent refuge dans l'hotel Artemis, un hopital d'un genre particulier...

le 7 août 2018

7 j'aime

1

Du même critique

Nightmare Alley
RedArrow
9

"Je suis né pour ça."

Les premières minutes que l'on passe à parcourir cette "Nightmare Alley" ont beau nous montrer explicitement la fuite d'un homme devant un passé qu'il a cherché à réduire en cendres, le personnage de...

le 19 janv. 2022

72 j'aime

16

Umbrella Academy
RedArrow
5

L'Académie des 7 (saisons 1 & 2)

SAISON 1 (5/10) Au bout de seulement deux épisodes, on y croyait, tous les feux étaient au vert pour qu'on tienne le "The Haunting of Hill House" de personnes dotés de super-pouvoirs avec "The...

le 18 févr. 2019

67 j'aime

10

Bird Box
RedArrow
6

Sans un regard

L'apocalypse, des créatures mystérieuses, une privation sensorielle, une héroïne enceinte prête à tout pour s'en sortir... Le rapprochement entre cette adaptation du roman de Josh Malerman et "Sans...

le 21 déc. 2018

66 j'aime

7