Bent Hammer s’est notablement fait connaitre en 2003 avec son film Kitchen Stories dans lequel un groupe d’enquêteurs suédois du Home Research observe, compile et analyse les gestes quotidiens, les pratiques usuelles et les habitudes comportementales d’hommes célibataires dans leur cuisine, en vue de concevoir la cuisine idéale.


Ce n’est sans doute pas un hasard si le réalisateur norvégien s’est intéressé à cette situation d’observation des comportements de gens simples dans leur environnement familier, tant son cinéma (quatre films depuis celui-ci) est empreint de cet intérêt ethno- sociologique et s’attache à observer et mettre en scène des individus ordinaires dans des situations de la vie quotidienne. Dans ses films Bent Hammer porte avec tendresse et poésie un regard généreux sur les « vies minuscules » d’un petit monde d'anonymes, de gens modestes ou marginaux. Il prouve ici une fois de plus son aisance dans la peinture des petites misères quotidiennes de personnages que l'on pourrait croiser au détour de n'importe quelle rue. Même si le film est bien ancré dans un univers nordique enneigé, les saynètes qu'il nous conte sont universelles dans leur propos.


Le scénario de Home for Christmas s’inspire d'un recueil de nouvelles écrites par l'écrivain norvégien Levi Henriksen « Only Soft Presents Under The Tree ». Il tisse plusieurs récits, instants de vie de personnes dont les destins s'enchevêtrent durant le réveillon de Noël dans un petit village norvégien. Le film raconte leur histoire entre humour et morosité, solitude et tendresse ; un conte de Noël mélancolique où les gens ne sont pas tous forcément frappés de bonnes intentions.


Après un prologue apparemment sans lien avec le reste et qui se passe dans les Balkans en hiver, le film s'intéresse à plusieurs événements se déroulant une nuit de Noël en Norvège. C’est l’histoire d'un écolier qui prétend que sa famille protestante ne fête pas Noël pour pouvoir passer le réveillon avec une petite camarade musulmane ; celle d'un homme qui se déguise en Père Noël pour voir ses enfants chez son ex-femme dont il est séparé ; celle d'un ancien grand footballeur tombé dans l'alcoolisme qui croise la route d’une ancienne amie, vendeuse de sapins de Noël, qui prend pitié de lui et lui offre de la nourriture et un abri ; celle d'une femme convaincue que son amant adultère va enfin quitter sa femme ; celle, clin d’œil à la Nativité et à l’errance de Joseph et Marie, d’un couple de migrants Kosovar dont la femme est sur le point d’accoucher dans une maison abandonnée. Jusqu’à la dernière scène (qu’il faut taire) qui clôt le film de manière terriblement émouvante et poétique. Une petite dizaine d’histoires qui donnent l’impression de n’en faire qu’une, tant le montage est remarquable, et s’équilibre entre les récits délicats et joyeux et ceux plus tristes ou tragiques.
Bent Hammer réalise une fois de plus un film très humaniste qui mêle fantaisie et tragédie. Conte de Noël jamais larmoyant ni plein de bons sentiments, à la limite du pathétique et de la naïveté, il porte un regard plein de tendresse sur ces anonymes du quotidien avec humour, un peu de tristesse, une formidable empathie, et des touches discrètes de solidarité. Un film de Noël qui fait chaud au cœur sans être mièvre.

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le 16 déc. 2021

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