Le titre annonce la couleur, puisque le film montre des personnes modestes qui vivent tant bien que mal. Parmi eux Roberto (qui d’ailleurs n’est pas le plus modeste) se retrouve "dans la panade" après avoir récupéré sa commande dans une… panaderia (boulangerie en espagnol). Avec une petite idée derrière la tête, il avait commandé un gâteau d’anniversaire particulier, en forme de ballon de football, un petit chef d’œuvre pour son concepteur. Sauf qu’en y réfléchissant bien (alors que le gâteau est sur le siège arrière de sa voiture), Roberto se torture avec des questions de plus en plus précises. Et si l’idée géniale qu’il avait eue avec ce gâteau allait se retourner contre lui, parce que certains détails lui avaient complètement échappés ? Qu’à cela ne tienne, puisqu’il considère que tout est possible avec de la détermination et de l’astuce (il gagne sa vie en faisant de la représentation pour des produits amaigrissants), Roberto va improviser de quoi parer à toute éventualité, du moins celles qu’il imagine…


Nous sommes en Argentine, dans le désert de Patagonie, région traversée par un axe où les routiers circulent et s’arrêtent dans des stations-service ou des boutiques dans des villages isolés. Don Justo tenait une de ces boutiques. Retraité, il l’a cédée à son fils qui semble plus intéressé par l’orientation de son antenne parabolique que par la vente. Pendant ce temps, don Justo amuse les gamins du coin en remuant ses oreilles à volonté. Ce qui n’empêche pas les gamins d’ironiser sur sa dégaine impayable. En effet, don Justo garde aux pieds des chaussures de sport très flashy cédées par des hollandais de passage. Des chaussures qui se révéleront, contre toute attente, quelque chose comme ses bottes de sept lieues (à moins qu’elles fassent de lui le hollandais volant) dès lors qu’il aura des indications sur le chien qui l’a abandonné depuis un bout de temps, le dénommé « Sale-Tête »…


La route de don Justo va croiser celle de Roberto. Le film suit également la trajectoire de Maria Flores, jeune mère vivant dans des conditions difficiles dans le même village que don Justo. Pleine de bonne volonté, elle s’occupe de son jeune enfant pendant que son mari est absent (travail ?) et qu’elle n’a même pas l’électricité. Incroyable mais vrai, l’une de ses amies lui annonce qu’elle a gagné un lot à un tirage au sort d’une émission de télé. Pour le retirer, elle doit se présenter sur le plateau, à San Julian ville située à quelques centaines de kilomètres.


Dans ce film où il affiche une réelle sensibilité, le réalisateur met en valeur un coin isolé de l’Argentine qui lui tient visiblement à cœur. Le film doit beaucoup à une ambiance particulière faite de silences et de belles couleurs dues à la photographie du chef opérateur Hugo Colace qui ne sont pas sans rappeler (par moments) l’esthétique de Bagdad café. C’est donc agréable mais sans doute un tantinet travaillé. Difficile de s’en plaindre, surtout que le réalisateur fait preuve d’un humour tout en finesse. Très pince sans rire, Carlos Sorin ironise gentiment sur ses personnages. Sans que cela en fasse un chef-d’oeuvre, son film répond à des questions aussi inattendues que :



  • Un animal (un chien en l’occurrence) peut-il faire la distinction entre le bien et le mal ?

  • Le prénom René(e) est-il plutôt masculin ou féminin ?

  • Quelle différence de valeur y a-t-il entre un nécessaire à maquillage et un robot à tout faire de cuisine ?


Un film dont l’ambiance séduit tranquillement, le réalisateur prenant son temps pour présenter des péripéties qui donnent beaucoup de charme à l’ensemble et rendent les personnages attachants. Cela va de la maladresse de Roberto à la naïveté de Maria Flores en passant par l’obstination de don Justo.

Electron
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le 5 oct. 2014

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