Bientôt 70 ans pour la créature la plus mythique de l'histoire du cinéma. Et l'année prochaine marquera également les 10 ans d'existence du MonsterVerse qui a débuté en 2014 par la version de Gareth Edwards, et que constituent 4 films et 2 séries. Un univers cinématographique dont je suis franchement mitigé côté films. Après un Godzilla vs Kong qui m'a énormément déçu en 2021.


D'ailleurs, le récent trailer de sa suite Godzilla x Kong: The New Empire prévu pour 2024, ne me vend vraiment pas du rêve. Loin de moi l'envie de juger un film pas encore sorti, mais ce que j'en vois m'a l'air d'être dans la plus pure continuité de son prédécesseur. D'autant plus qu'il sera à nouveau réalisé par Adam Wingard (Death Note version Netflix, on n'oublie pas), et qu'on y reverra quelques visages familiers dont je me serais bien passé. À l'exception de Jia, la petite qui communiquait avec Kong par le langage des signes, et atteinte de surdité dans la vie réelle.


Mais quelques mois en arrière en septembre, la première bande-annonce du dénommé Godzilla Minus One fut dévoilée. Film live japonais distribué par la Toho, réalisé par Takashi Yamazaki, et sorti le 3 novembre 2023 là-bas. S'affranchissant donc totalement du MonsterVerse américain. Un trailer qui a fait son buzz avec 10 millions de vues à l'heure où cet article est publié. Et qui m'aura procuré de sacrés frissons. Ma seule hâte était d'aller le voir dès que possible. Sauf que ça ne se sera pas passé comme je l'imaginais.


Puisqu'on aura appris courant novembre, que ce film ne sera projeté dans l'Hexagone que les jeudi 7 et vendredi 8 décembre 2023 en France. Uniquement dans une cinquantaine de cinémas Pathé, et en 4DX ou IMAX. Autant dire qu'avec un créneau aussi restreint, en pleine semaine, et avec un billet chiffré à une vingtaine d'euros, très peu de personnes risquaient d'aller le voir.


La raison sous-jacente étant que le distributeur historique des films Godzilla qu'est la Toho, réclame d'énormes coûts liés au droit d'exploitation de sa franchise phare en dehors de son territoire d'origine. C'est pour ça que son précédent film Shin Godzilla / Godzilla Resurgence sorti en 2016 (que je n'ai pas vu), n'a été projeté que durant des festivals. Le seul bon point à en tirer c'est qu'une diffusion aussi courte ne lui imposera pas la chronologie des médias. Et qu'il pourrait débarquer assez rapidement en streaming et en physique.


Mais ça reste un énorme gâchis. Surtout quand on sait qu'il est déjà le plus gros succès de l'histoire des films japonais pour un live action. Et ayant engrangé plus de 60 millions de dollars au box-office mondial pour un budget estimé à 15 millions. 


Petit budget pour grand résultat


Oui, "seulement" 15 millions de dollars. Ça reste un chiffre pour le commun des mortels, mais pour un blockbuster de cette époque, c'est dérisoire. À titre de comparaison, c'est 15 à 20x moins que les dernières productions Marvel et DC.


Et c'est là toute la magie de ce film japonais. D'arriver à faire si bien, avec si "peu". Ne serait-ce qu'en termes d'effets visuels avec un Godzilla plus terrifiant qu'il ne l'a jamais été. Et n'ayant absolument pas à rougir de ses homologues américains. Pas même de la version d'Edwards qui fut assez respectable avec du recul. Où la bête avait mis plus d'une heure à se montrer, et étant dépeinte davantage comme une divinité protectrice plutôt qu'une menace.


Alors que dans Minus One, c'est tout l'inverse. Car non seulement on nous met directement dans le bain (et c'est le cas de le dire), en nous introduisant frontalement face à la créature dès les premières minutes. Et en plus de ça, c'est un danger absolu n'hésitant pas à s'en prendre à la population. Avec des scènes de destruction et de chaos très bien rendus et dignes des films catastrophes à gros budget.


D'ailleurs, son iconique souffle atomique n'a jamais aussi bien porté son nom. La séquence où on le voit dégainer pour la première fois, m'a fait décrocher la mâchoire. C'était spectaculaire, et encore plus avec une 4DX qui a amplifié tous les effets visuels, sonores, et sensoriels. Rien de mieux pour ressentir le rugissement de ce Kaiju comme si on était réellement face à lui. Et sans vous mentir, j'étais encore un peu sonné après être sorti de la salle.


D'ailleurs, l'excellente composition de Naoki Satō dépeint avec brio l'ambiance générale du film qui ne transpire pas la joie. Avec des morceaux tantôt épiques, tantôt mélancoliques. Parmi mes favoris, "Godzilla Suite II" qui reprend le thème phare de la créature. Ma préférée "Divine" dont le titre se suffit à lui-même (et qu'on entend dans le tout premier trailer). Et "Resolution" où on peut littéralement entendre l'espoir.


À chacun sa guerre


J'ai un gros problème avec les protagonistes humains dans les derniers Godzilla. Soit ils sont sous-développés, soit complètement stupides. Rien ne donnait envie de nous y intéresser ou d'avoir de l'empathie pour eux. Surtout dans des films où le principal intérêt réside en ces créatures qui crèvent littéralement l'écran.


Et c'est l'exact opposé dans le film de Yamazaki. Où l'on suit des personnages parfaitement authentiques, d'époque, et pas stéréotypés pour un sou. Tentant de survivre dans un Japon ravagé par une guerre qui leur a fait tout perdre. Et présentant les stigmates encore béants d'Hiroshima et Nagasaki. Deux catastrophes nucléaires dont Godzilla en est la parfaite allégorie.


D’ailleurs, je me dois de faire un parallèle avec le film américain Oppenheimer de Christopher Nolan. Qui, dès sa sortie mondiale en juillet dernier, a été censuré au Japon parce que J. Robert Oppenheimer inventa la bombe atomique qui rasera les villes citées plus haut. Alors qu'en réalité, ce biopic ne montre rien de tout ça. Il ne se contente que de narrer la vie de ce scientifique tourmenté. Le processus de création de cette arme de destruction massive. Et les conséquences judiciaires qui en auront découlé.


Par contre, ça n'a pas l'air de déranger les Japonais de faire un film qui certes, ne parle pas explicitement de ces catastrophes. Mais raconte une histoire qui en est nettement inspirée et avec des images explicites. Est-ce qu'ils ont ils vraiment pris le temps de visionner Oppenheimer avant de prendre la décision de le bannir de leur territoire ? Puis de toute manière, on a appris récemment via un article de Deadline.com, que l'embargo serait levé courant 2024 au Japon. Bref, revenons aux protagonistes.


Parmi eux, Koichi Shikishima incarné par Ryūnosuke Kamiki. Un pilote désigné Kamikaze durant une Seconde Guerre mondiale touchant à sa fin, mais forcé de vivre couvert de déshonneur après avoir fui ses obligations. Le point de non-retour étant la scène d'ouverture où il fait face à la créature pour la première fois. Un moment qui lui laissera de lourdes séquelles psychologiques. Et lui faisant réaliser que sa propre guerre commence à peine. Pas seulement contre Godzilla, mais surtout contre lui-même en quête de sa rédemption. En tout cas je l'ai trouvé très bon et très juste dans son rôle.


Et il en est de même pour Noriko Oishi (Minami Hamabe) qui fut très touchante. Et avec qui Shikishima se liera d'affection. Tout comme ce dernier, elle sera aux premières loges face à la furie de Godzilla. C'est sûrement le personnage qui m'aura fait le plus de la peine dans ce film.


D'une manière générale, l'essentiel du casting s'en tire largement avec les honneurs. Mention spéciale au personnage de Kenji Noda (Hidetaka Yoshioka), le scientifique du groupe qui sera chargé d'établir un plan d'action afin d'en finir avec Godzilla. Le tout sans aucun appui du gouvernement Japonais dont la moindre intervention militaire pourrait réveiller les tensions entre l'occident et l'Union soviétique alors en pleine guerre froide. C'est donc livré à elle-même, qu'une population déjà bien affaiblie, devra s'unir pour faire face à une menace sans précédent qui les dépasse largement. Et je trouve ça beau.


Conclusion


Je suis tellement dégouté que sa programmation fut aussi restreinte chez nous. Car on est clairement face à un film dramatique et surtout humaniste, qui fera date et doit être vu par le plus grand nombre. Une claque visuelle avec un Godzilla parfait. Un casting excellent et porteur d'espoir. Une très belle bande-son. Une histoire prenante même si j'ai quelques réserves concernant la toute fin du film. Et d'une manière générale, un message fort envers un Hollywood qui doit très sérieusement en prendre de la graine. Encore une fois, un film avec un budget aussi loin des standards et qui arrive à faire mieux que les autres, cela relève du miracle.


Je suis loin d'avoir tout vu concernant la franchise, mais pour moi, c'est le meilleur film Godzilla à être jamais sorti. Il y aura un avant et un après ce Minus One c'est certain. En espérant que ça élèvera un peu le niveau des blockbusters qui ont clairement perdu de leur superbe ces dernières années.

Nindo64
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le 22 déc. 2023

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