Glory
6.9
Glory

Film de Edward Zwick (1989)

Tout n’est jamais noir ou blanc, exception notable faite de l’Armée confédérée avant que Lincoln n’autorise les régiments noirs. C’est ce nœud historique que vient cueillir Zwick & avec lui les fleurs d’un scénario tout prêt, gloire incluse. Un bouquet qu’il n’hésitera pas à salir néanmoins, & ce n’était pas forcément là un choix facile comme il en résulte que la poésie de certains plans se trouve comprimée par l’ambiance lourde.


Il veut faire un film de guerre & il n’est pas question qu’on ait l’impression de voir autre chose que des combats, comme s’il partait des préjugés qu’il n’y a pas de place pour tout & que le contexte n’importe pas : trop refermé sur sa petite crédibilité, le film est dépourvu d’antécédents & les rapports humains sont censés tenir tout seuls – ce qu’ils s’empressent de ne pas faire dans le cas des rôles désolants de la mère & de l’ami de Shaw.


Shaw, c’est le colonel, héros de la nation & de l’histoire, qui commande le régiment de couleur. C’est aussi Matthew Broderick & je ne comprends pas comment ce gars pouvait être un premier choix pour le rôle. Il est mou. On lui fait jouer un petit colonel, un fils de bonne famille pas trop bête qui se trouve forcé d’apprendre la guerre sur le tas, certes, mais c’est surtout, pendant un bon tiers du film, un petit acteur sur lequel pèse trop la responsabilité de figurer l’incompétence militaire & qui fiche tout par terre dans l’intervalle.


Les dialogues ne l’aident guère. ”Teach them properly”, ”deal with this man” : ”enseignez-leur correctement”, ”occupez-vous de cet homme”, autant de lignes sans punch qui hésitent entre ridiculiser l’inexpérience & garder le minimum de poigne militaire dont le résultat est, au mieux, de transformer le personnage en jouet pour le spectateur. Il faut attendre que les choses se compliquent pour pouvoir apprécier des scènes complexes révélant, au fur & à mesure que Shaw & son acteur se bonifient, qu’il y avait une volonté véritable de faire naître le militaire de sa propre incompétence. Ce que cela révèle surtout, c’est que l’effet est forcé & qu’on avait trop misé sur une guerre de masse dont l’anticipation est fade : même Freeman (a l’inverse de Washington, par contre) voit sa prestation bridée, comme pour confirmer qu’aucun acteur n’avait le droit de faire le film à lui tout seul.


Les combats en eux-mêmes, quoiqu’érigés en matière d’achèvement, sont le point fort. Grâce à une reconstitution à base de volontaires & à une pyrotechnie hors-pair, c’est tout le souffle d’une guerre civile énorme que l’œuvre se met à respirer – un peu tard. De simplement représenter la guerre avec franchise ne la rend pas mémorable pour autant.


Quantième Art

EowynCwper
4
Écrit par

Créée

le 3 févr. 2020

Critique lue 930 fois

2 j'aime

Eowyn Cwper

Écrit par

Critique lue 930 fois

2

D'autres avis sur Glory

Glory
Val_Cancun
6

Band of Brothers

Un honnête film de guerre hollywoodien, qui a le mérite de s'intéresser à un conflit assez peu représenté au cinéma : la Guerre de Sécession. En prime, "Glory" se concentre sur la création du premier...

le 29 juil. 2020

15 j'aime

6

Glory
justinb
10

Glory

La guerre de Sécession ravage les Etats-Unis. Le jeune Robert Gould Shaw est promu colonel du premier régiment de soldats noirs, engagés volontaires dans une guerre qu’ils croient être la leur. Ils...

le 25 déc. 2020

8 j'aime

Glory
Thibox
8

Un film sous-estimé

Synopsis: En 1862, après l'émancipation des Noirs américains, le gouverneur du Massachusetts décide de former un régiment exclusivement composé d'hommes de couleur et d'en confier le commandement au...

le 7 févr. 2016

8 j'aime

2

Du même critique

Ne coupez pas !
EowynCwper
10

Du pur génie, un cours de cinéma drôle et magnifique

Quand on m’a contacté pour me proposer de voir le film en avant-première, je suis parti avec de gros préjugés : je ne suis pas un grand fan du cinéma japonais, et encore moins de films d’horreur. En...

le 25 oct. 2018

8 j'aime

Mélancolie ouvrière
EowynCwper
3

Le non-échec quand il est marqué du sceau de la télé

Si vous entendez dire qu'il y a Cluzet dans ce téléfilm, c'est vrai, mais attention, fiez-vous plutôt à l'affiche car son rôle n'est pas grand. L'œuvre est aussi modeste que son sujet ; Ledoyen porte...

le 25 août 2018

7 j'aime

3

La Forêt sombre
EowynCwper
3

Critique de La Forêt sombre par Eowyn Cwper

(Pour un maximum d'éléments de contexte, voyez ma critique du premier tome.) Liu Cixin signe une ouverture qui a du mal à renouer avec son style, ce qui est le premier signe avant-coureur d'une...

le 16 juil. 2018

7 j'aime