Glorious
5.7
Glorious

Film de Rebekah McKendry (2022)

C’est bien la première fois que je vois un scénario pareil : un homme déprimé se retrouve enfermé dans les toilettes d’une aire de repos, où une voix mystérieuse dans la cabine voisine lui fait une proposition sinistre à travers un glory hole, bien que cette voix n’ait rien de lubrique en tête. Vous ne savez pas ce qu’est un glory hole ? Hé bien, écoutez, je vous laisse chercher ça par vous-même sur Google, mais pour résumer, il s’agit d’un trou dans un mur ou une cloison permettant des pratiques sexuelles anonymes. Et donc cette voix qui se clame être une identité divine fait comprendre à cet homme que le destin tout entier de l’univers repose sur ses épaules. Oui, ni plus ni moins, rien que ça. Hé bien croyez-le ou croyez le pas, moi ça m’a intrigué, alors j’ai regardé Glorious, et le résultat est à la fois étrange et plutôt très sympathique. Si si, je vous jure. Attention, possibles spoils dans la suite de cette chronique.


Encore inédite chez nous, Glorious est une petite production arrivée en exclusivité aux States sur la plateforme Shudder. Elle est basée sur un histoire courte de Todd Rigney, un des scénaristes du film, substantiellement retravaillée pour être un long métrage par deux autres scénaristes, Joshua Hull (Chopping Block) et David Ian McKendry (Psycho Granny). L’ensemble est mis en scène par Rebekah McKendry qui signe là son troisième long métrage avec peu de moyens mais une réelle envie de bien faire et de proposer au spectateur quelque chose qui le surprendra. J’avoue qu’un huis-clos fantastico-horrifique dans des chiottes publiques d’une aire de repos, celle-là, je ne l’avais pas vu venir. Huis-clos oblige, et bien que l’introduction et quelques flashbacks nous sortent un peu de là, le film va se dérouler dans une seule et unique pièce de quelques mètres carrés que vous pouvez imaginer bien craspec. Non, il ne s’agit pas ici de ces aires d’autoroute de luxe nettoyées trois fois par jour, mais bien d’un petit truc dans un trou paumé sans entreprise de nettoyage pour rendre la chose attrayante. Huis-clos oblige également, le nombre de personnage est extrêmement limité puisque durant 80% du film, l’acteur Ryan Kwanten (Dead Silence, la série True Blood) va échanger avec une voix, celle de l’excellent J.K Simmons (Spiderman, Whiplash) qu’on ne verra donc jamais. Rassurez-vous, Glorious ne se résume pas à deux personnages qui discutent dans des chiottes dégueulasses. Les choses deviennent rapidement étranges, passant d’une rencontre un peu inconfortable à un cauchemar halluciné rempli de néons multicolores, ponctué de tentatives d’évasions du personnage principal ainsi que de quelques moments sanguinolents bien craspecs histoire de ne pas donner l’impression que le film tourne en rond. On nage ici en plein film d’horreur cosmique mâtiné d’humour noir, dans lequel on sent très vite les inspirations lovecraftiennes car oui, il y a du Cthulhu là-dedans.


Ryan Kwanten s’investit complètement dans son rôle tragicomique et arrive à rendre son personnage très rapidement crédible. La voix de J.K. Simmons donne un côté décalé à ce dieu de la Destruction et leurs plaisanteries sont ludiques au début, ce qui est surréaliste compte tenu du cadre un peu sordide de l’action. Le scénario semble imprévisible car on n’a aucune idée de vers où le film veut nous amener. On nous distille au compte-goutte les tenants et aboutissants, aussi bien sur ce que ce dieu peut bien faire ici et ce qu’il veut exactement, que sur l’histoire du personnage central (via des flashback). La mise en scène est de très bonne facture, la réalisatrice va explorer cette petite pièce de fond en comble via des mouvements de caméra parfois étranges, des cadrages et des angles inhabituels, et donner un visuel très 80’s avec des néons roses, rouges et violets quasi phosphorescents. Certaines séquences frôlent l’onirisme, tout en étant complètement hallucinées au point qu’on se demande si ce qui se passe est réel ou s’il s’agit simplement d’un lendemain de cuite difficile pour le héros. Dommage qu’on ait parfois l’impression que le scénario soit étiré au maximum, et ce malgré les 1h19 que dure le film. Certaines scènes, comme l’arrivée du gérant de l’aire de repos, ne servent au final à rien si ce n’est à amener un peu de gore histoire d’appâter le chaland. Glorious aurait clairement été plus efficace en moyen métrage de 40 minutes mais, malgré tout, si on se prend au jeu, on passe un bon moment à la fois fun et étrange.


Encore inédit chez nous à l’heure où j’écris ces lignes, Glorious est un film étonnant, mélangeant horreur cosmique et humour noir, qui a certes du mal à tenir son concept de départ sur la durée mais qui propose malgré tout un divertissement des plus honnêtes.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-glorious-de-rebekah-mckendry-2022/

cherycok
6
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le 20 oct. 2022

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