Un Hitchcock dans le décor d'un Maigret...

Le scénario est en partie écrit par Polanski, et ça se sent un peu trop.

Le point de départ est l'idée hitchcockienne par excellence d'un mari dont la femme disparaît alors qu'il se situe dans une ville étrangère (ici Paris). La police étant d'une incompétence rare, il mène l'enquête, tombe sur une blonde intrigante et des méchants en costard.

Dit comme ça, on dirait presque un pastiche. Sauf que Polanski hésite entre un traitement sérieux (qui domine la plupart du temps) et une certaine ironie. Ironie vis-à-vis des relations franco-américaines, principalement. D'un côté, une galerie de policiers français incompétents, de garçons de café désobligeant, de couple se faisant un cuni dans l'escalier, de camions poubelles (un motif récurrent), d'autoroutes déshumanisées, d'immeubles décrépits côtoyant des immeubles de standing. Une image plutôt critique et laide du Paris des années 1980. De l'autre, une ambassade américaine tout aussi incompétente (ils sont même plus ridicules que les flics français, c'est dire), mais même le personnage de Walker n'échappe pas à cette ironie, et notamment sa manie de tout régler à coups de dollars ou de carte bancaire.

A la rigueur, pourquoi pas, mais il y a deux choses qui me chiffonnent. Tout d'abord le personnage de Michelle (Emmanuelle Seignier), assez stéréotypé de jeune vamp vaguement punk des années 1980. Les scènes d'action dans lesquelles elle apparaît font assez cliché, de la fois où elle manque de tomber du toît à la fuite du parking souterrain, en passant par la scène finale. L'ambiance années 1980 des bars/discothèques traversées a aussi très mal vieilli.

Et puis le personnage de Walker n'évolue pas vraiment, pendant le film. Il semble en retrait. Il veut retrouver sa femme, et ça se résume un peu à ça. A la fin il l'a, donc fin du film. Pour Polanski, ce qui comptait, c'était visiblement les rebondissements en chemin (la scène du toît, mémorable ; le réveil dans la péniche ; les indices, genre boite d'allumette avec un n° de tél., cassette de répondeur, etc...). Il manque au divertissement quelque chose qui lui donnerait un peu plus de consistance.

Le film a je dirais un dernier défaut : la bande-son d'Ennio Morriccone. Si si. Car Morriconne, en-dehors des Leone, ne fait pas vraiment dans le léger, et sa bande-son envahissante parasite plus l'action qu'elle ne la sert (la palme aux espèces de bruits de scie circulaire particulièrement brise-nerfs).

Comme la plupart des Polanski, on n'a pas envie de détester "Frantic". C'est une bonne chasse au McGuffin dans Paris, mais l'ambiance année 1980 et certains aspects un peu stéréotypés ou longuets n'en font pas un chef d'oeuvre.
zardoz6704
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le 1 mars 2013

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zardoz6704

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