Dans les conditions du Dogma 95, style créé par Thomas Vinterberg et Lars von Trier qui allait inspirer tant de films ensuite, et terriblement opportun pour l’occasion, nous voici invités aux 60 ans du chef d’une famille de la noblesse danoise, dans leur immense demeure, au milieu de tous leurs amis bourgeois encostumés, anciens complices d’affaires et vieille garde générationnelle à l’appui.
Caméra sur l’épaule, dans le strict instant présent, sans musique ni accessoire qui n’appartienne déjà au décor naturel, on accompagne la sœur et les deux frères, différents mais visiblement instables, perturbés, et progéniture restante du patriarche à l‘autorité d’acier, après le récent suicide d’une autre sœur. Autour d’une mêlée aristocrate bien éméchée, une mère obsédée jusqu’au dramatiquement ridicule par la bienséance et l’image du clan, l’évolution improvisée de la fratrie les amènera, chacun à sa façon, à la mise à mort publique du despote paternel à la puissance chancelante.
Tiraillés, pressurisés, dépersonnalisés, incroyables d‘authenticité, de courage et de pitoyable soumission palpable d’anciens enfants névrosés, les trois protagonistes devront surmonter leurs tremblements et leurs dénis, à l’instar de leur sœur morte, crever les abcès qui les aliènent depuis si longtemps, et à l’occasion de cette arène improvisée, tenter de renaitre en bouleversant irréversiblement leurs sorts et celui de leur famille.
Cette gifle époustouflante de réalisme, de douleur non dite, de génie de la simplicité intime, raconte un inoubliable drame familial, exhibe la torture à perpétuité de certaines victimes, et dénonce surtout l’hypocrisie criminelle des vices en principe si bien hermétiques dans une classe sociale décadente qui interdit le scandale.

Créée

le 23 mai 2017

Critique lue 448 fois

8 j'aime

2 commentaires

etiosoko

Écrit par

Critique lue 448 fois

8
2

D'autres avis sur Festen

Festen
Petitbarbu
8

L'important, c'est la famille.

Fever Ray - I'm not Done Pour son premier métrage dans le cadre du mouvement Dogme95, Vinterberg nous immerge dans un repas de famille bourgeois prenant place dans le manoir familial, isolé dans la...

le 22 août 2015

82 j'aime

9

Festen
Thieuthefirst
8

Recette pour un Festen (Critique en service commandé pour Hunky-Dory #03)

Avant toute chose Festen est un film déroutant sur le plan formel. En effet l'image tremblotte en permanence et présente un grain plus ou moins marqué tout au long du film (quand elle n'est pas...

le 23 oct. 2011

54 j'aime

11

Festen
Cmd
8

Le Roi se meurt

Je vais commencer par m'excuser. Comme ça si jamais il t'arrive quoi que ce soit, au moins, j'aurais tenté déjà de me faire pardonner mon offense. Au cas où tu ne l'aurais pas encore remarqué, je te...

Par

le 5 mars 2015

47 j'aime

9

Du même critique

Jungle
etiosoko
8

Un miraculé de l'Amazonie

Après 3 ans de service militaire israélien, Yossi Ghinsberg joue le touriste aventurier en Amérique du Sud, en sympathique amateur d’explorations originales et de pachanol, avant de se laisser...

le 26 nov. 2017

31 j'aime

4

Aquaman
etiosoko
4

Epitaphe super-héroïque

Chez Marvel, okay, j’avais pigé que c’était devenu de la pétarade non-stop et du dessin animé, mais là, mince, oh non, voilà que les super-héros de chez DC sombrent à leur tour dans les...

le 18 févr. 2019

30 j'aime

7

Premier Contact
etiosoko
8

Notre langage induit notre conceptualisation

Douze gigantesques vaisseaux spatiaux extra-terrestres stationnent chacun en un point précis de la Terre depuis plusieurs jours. Armées, politiques, philosophies, religions, sociétés, économies, sont...

le 1 mars 2017

30 j'aime

7