Si je vous dis Gérard Philippe, il y a de fortes chances que ce nom n'évoque rien aux plus jeunes d'entre vous à moins que vous n'ayez des parents cinéphiles ou avez eu des cours de cinéma durant lesquels nombreux enseignants font étudier des "classiques" du siècle dernier; y compris ceux réalisés du temps des films en noir et blanc.

Parmi eux, il est fort probable que l'on vous a montré celui-ci

https://www.youtube.com/watch?v=-sHVgIik_bU

Cinquante et un ans avant le film Fanfan la Tulipe 2003 avec Vincent Perez sortait le film Fanfan la Tulipe 1952 avec Gérard Philippe.

L'oeuvre devint si populaire qu'elle ressortit en 2000 en version colorisée afin de la remettre visuellement au goût du jour. Exploit qui fut réussi la colorisation choisie n'étant ni exagérément flashy, ni bâclée dans son rendu final afin de se faire de l'argent facile sans se casser la tête mais demeurant sobre et proche du réalisme (malgré quelques hics comme certains [mais très peu de] passages proches du Technicolor pas trop naturel des années 30) au point que ceux qui découvriraient le film uniquement en version colorisée ne pourraient probablement pas deviner que le film est originellement sorti en noir et blanc.

Revenons au film lui-même. Considéré comme une "fiction historique", le cadre spatio-temporel est placé en France durant la Guerre de Sept ans, l'Histoire avec un grand H n'est qu'un prétexte pour permettre à l'histoire avec un petit h de se dessiner; celle d'un jeune garçon crédule nommé Fanfan qui s'engage dans l'Armée Française pour échapper à un mariage forcé.

Né d'une simple chanson du XIXe siècle, le personnage éponyme devint si populaire qu'il eut le privilège d'avoir de très nombreuses adaptations dont celle dont nous sommes en train de parler.

Que vaut ce film?

Et bien s'il est qualifié de magistral par de nombreuses personnes, autant dire que ce n'est pas vraiment le cas de l'oeuvre elle-même.

Non pas que le film soit mauvais; bien au contraire. Mais il est avant tout un divertissement plus qu'autre chose. Cependant, il s'agit d'un divertissement très bien écrit avec beaucoup d'ironie et de second degré sur la figure du vaillant héros-soldat modeste qui, après avoir vaillamment combattu aura la main de la Princesse en récompense.

En effet, le protagoniste est à la fois un dragueur agaçant (sans compter le fait que le film fait de nombreux sous-entendus sur le sexe parfois pas si sous-entendus que ça) et un garçon naïf croyant à la "Princesse Charmante"...

...alors que cette dernière ne lui accorde pas le moindre regard...

...la love-interest du personnage principal n'est pas une belle languissante attendant le Prince Charmant mais une jeune fille cynique et moqueuse ou encore l'Armée et les Puissants sont montrés comme des clowns snobs faisant des stratégies de combat absurdes, la guerre est décrite comme élégante et plaisante où "on s'entretuait avec grâce" ou encore que la narration nous mettant dans le bain de l'Histoire explique que les Royaux trouvèrent la guerre si plaisante qu'ils la firent volontairement durer sept ans. Nous voilà ainsi face à des mots proches du style de Voltaire durant le chapitre de la guerre de Candide où "Rien n'était si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux armées."

Et ce n'est pas tout: certains moments dramatiques deviennent comiques de manière habile...

...entre une pendaison tragique foirée ou bien un combat épique où un méchant meurt de manière ridicule...

...tout en étant englobés dans une intrigue sérieuse avec de vrais enjeux...

...une guerre qu'il faut gagner, des personnages "nuisibles" contre lesquels il faut lutter, un ennemi à battre.

Mais malgré tous ces très bons aspects, le film n'est pas sans défauts.

(notamment à cause d'une fin trop rapide, bâclée et frustrante)

En effet, ceux qui aiment les récits narratifs précis ne trouveront pas leur bonheur en regardant ce film étant plus une suite de péripéties qu'une histoire globale cohérente. De plus, alors que durant une bonne partie de son récit Fanfan la Tulipe 1952 est plus moqueur envers ses personnages qu'autre chose, certains clichés ne sont pas détournés mais acquis pour rester à leur place sans la moindre ironie comme le meilleur ami du héros effacé présent uniquement pour renforcer la valeur du protagoniste.

; et n'oublions pas le méchant très méchant, la demoiselle en détresse et même, hélas, Fanfan lui-même qui, durant le troisième acte du récit, devient vraiment un vaillant héros-soldat permettant la victoire de son pays sur leur ennemi.

De plus, le film se permet de contenir de l'homophobie faisant grincer les dents gâchant le visionnage durant certaines séquences.

Ainsi, malgré son ironie et son second degré, Fanfan la Tulipe 1952 reste un basique Voyage du héros, certes, divertissant mais dire qu'il est magistral est exagéré car il se contente de faire rire avant toute chose parfois même au prix de ne pas se soucier tant que ça de son scénario. Cependant, l'humour fait avec brio et les personnages écrits avec une ironie assumée font que ce film vaut vraiment le visionnage.

BlackBoomerang
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le 2 sept. 2022

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