Le cinéma d'auteur de Kervern et Delépine se démarque clairement de la masse. De l'absurde de situation, une réflexion socio-politique ludique, tout ce que j'aime dans ce genre plus ou moins décalé ... et pourtant jamais je n'adhère totalement au style de Kervern et Delépine. Drôle d'ironie...
Les personnages lunaires apportent une curieuse fraîcheur au cinéma des deux compères. C'est la misère et les injustices qui guident leur plume comme une expression pacifiste, à travers l'art, de l'opposition aux inégalités sociales et à l'intolérance grimpante. Cette singularité se caractérise par une idée comique se déployant tout le film durant. Ici, les auteurs s'amusent à relier deux opposants politiques par une action féministe tout aussi burlesque. L'exagération continue et donc le moteur narratif qui justifie amplement l'aura positive entourant le cinéma de Kervern et Delépine.
Maintenant, c'est aussi un cinéma qui peut diviser. Un style déconcertant dont la lenteur, sans être péjorative, peut être nuisible à l'investissement du spectateur. Il faut évacuer une chose importante, que l'on aime la lenteur, le comique de répétition, l'absurde et le burlesque, ne signifie malheureusement pas que En même temps est un parie gagné d'avance. Aussi pertinent soit le propos et aussi efficace soient les comédiens (Jonathan Cohen, India Hair, Vincent Macagne, ...), le traitement est sporadiquement fatiguant, voir réellement épuisant. La faute à un style qui n'arrive jamais à évoluer, une impression de retomber sur les mêmes archétypes, sur une répétition de cadre, ou plus problématique, une finalité bien trop prévisible et convenue.
C'est un cinéma sincère, qu'on se le dise, mais un cinéma prisonnier de son idée originale et des obsessions filmiques et auteuristes de ses réalisateurs.