Confier la réalisation du biopic d'une des plus grandes reines d'Angleterre à Shekhar Kapur, cinéaste bollywoodien confirmé, a du sens. Le cinéma indien est surtout connu pour savoir mettre en scène le faste des cours royales, pour soigner ses décors et ses costumes, et pour chorégraphier des danses époustouflantes. On retrouve tous ces aspects dans Elizabeth, avec plus ou moins de réussite. Le film a été récompensé par l'oscar des meilleurs costumes, ça c'est réussi. Il y'a aussi deux séquences dans lesquelles Elizabeth (Cate Blanchett) danse avec son amant (Joseph Fiennes) un peu à la façon de Bollywood. Des scènes assez belles mais néanmoins inutile. Ca c'est plutôt raté.
Autre point qui caractérise le cinéma indien c'est la lourdeur de la mise en scène. Malheureusement cela se retrouve ici, notamment avec des ralentis mal à propos, et le générique d'ouverture à peine digne d'un téléfilm, ce qui m'avait fait redouter le pire.
Le scénario est là pour rattraper ces lourdeurs. On suit avec intérêt l'évolution d'Elizabeth de son sacre jusqu'à son réel avènement plusieurs années plus tard. La chronologie n'est d'ailleurs pas très clair sur ce point. Aspirant d'abord à la réconciliation entre catholique et protestant par le dialogue et le compromis, elle est contrainte à son grand désespoir de durcir sa politique face à l'intransigeance et l'ambition de certain de ses opposants. Une pacifiste convaincue résignée à assassiner ses opposants pour éviter la guerre, et ne pas dire tel l'Ulysse de Jean Giraudoux "elle aura lieu". Ainsi c'est le portrait d'une reine que l'exercice du pouvoir à détruit intérieurement qui est présentée ici.
Vu avec 20 ans de recul, le casting est très intéressant car rempli d'acteur promis à un avenir plus ou moins grand. Avec en tête Cate Blanchett qui n'est pas encore l'immense star que l'on connait aujourd'hui. Joseph Fiennes connaitra la consécration avec la sortie de Shakespeare in Love seulement quelques mois plus tard. Daniel Craig dans un rôle secondaire mais lourd de sens, celui d'un prêtre messager sensé apporté le coup fatal à Elizabeth. Enfin Emily Mortimer, actrice habitué aux très bons seconds rôles, ici au tout début de sa carrière. Les deux vétérans du casting, Richard Attenborough et Geoffrey Rush, sont à la hauteur de leur talent. On peur regretter le rôle guignolesque de Vincent Cassel assez malvenu, mais on peut se réjouir de voir un Eric Cantona sobre et sérieux.
Shekhar Kapur livre ici un biopic plutôt réussi, malgré des libertés prises avec la réalité historique. Mais bon, c'est un film qu'on veut, pas un documentaire (c'est le fan de Braveheart qui parle). Un film intéressant, mais pas passionnant, du fait du manque de profondeur de certains personnages, et qui vaut surtout pour la force de son casting.