La critique complète du Huzar sur le toit : https://lehuzarsurletoit.substack.com/p/dune-villeneuve-releve-le-defi-haut
(...) Grâce au sens de la composition de Villeneuve et au travail du directeur de la photographie Greig Fraser, Dune est visuellement grandiose. C’est également une fable très politique, dotée de personnages ambigus, au premier rang desquels le héros Paul Atréides (Timothée Chalamet) dont le cheminement échappe à toute classification binaire (on est loin du « côté obscur de la force » de Star Wars). Foncièrement pessimiste, Villeneuve écorne le mythe du « sauveur » et le recours à l’homme-providentiel. S’achevant sur une trahison intime déchirante, le film laisse d’ailleurs un goût amer. Contrairement à Lynch, qui occultait cette dimension pourtant essentielle, Villeneuve s’approprie aussi la critique herbertienne de la théocratie. Plus que la religion en tant que telle, Herbert condamnait le lien entre le politique et le religieux, qui favorise les systèmes d’oppression. (...)
Souvent comparé au Seigneur des anneaux pour son souffle épique, Dune suit pourtant une philosophie qui lui est diamétralement opposée. Frodon incarnait le héros humble, qui sauvait les peuples de la Terre du Milieu par une trajectoire sacrificielle, là où Paul Atréides semble se laisser corrompre par la soif de pouvoir. L’eschatologie chrétienne inspirant Tolkien différencie son œuvre de celle d’Herbert où transpire la méfiance à l’égard des religions instituées. En cela, et parce qu’il brouille les frontières entre le bien et le mal, Dune est bien le miroir des incertitudes de notre époque.