Inutile de passer par quatre chemins : si la première partie de Dune était une exposition, ce second acte est une transition et on pourrait avoir la sensation de s’être fait floué par Denis Villeneuve, lui qui se montre assez gourmand en termes de teasing pour un « pas si » potentiel prochain film.

Mais comment pourrait-on lui en vouloir ? Trois ans après avoir remis au goût du jour l’œuvre de Frank Herbert, le canadien nous replonge la tête dans le sable et nous gratifie d’un second cadeau cinématographique spectaculaire qui nous happe littéralement dès les premières minutes.

Plus dense que son prédécesseur, ce deuxième volet regorge d’action mais se veut également tout aussi intrigant, voire même plus complexe, les intentions des personnages pouvant donner lieu à quelques débats houleux. Pourtant, le spectateur d’aujourd’hui n’est jamais véritablement perdu car notre guide dans cette découverte du monde d’Arrakis est une sorte de croisement entre Anakin Skywalker de Star Wars et Jake Sully d’Avatar avant de se muer en un Dr Manhattan de Watchmen omnipotent, si bien que Dune semble être à la source, voire la source elle-même, de la fiction telle que nous la connaissons aujourd’hui.

Néanmoins, la distance qui pouvait déjà se faire sentir durant la première partie vis à vis des personnages est maintenue à l’égard de nous autres spectateurs. L’entreprise de s’attacher aux personnages peut donc toujours s’avérer ardue. A titre d’illustration, nous pouvons évoquer Lady Jessica qui, de manière pour le moins surprenante (et décevante), est rapidement mise au second plan, tout comme le duo Skarsgård-Bautista qui cède sa place à un Austin Butler psychotique et qui est exécuté sans réelle émotion. Les nouvelles têtes, parmi lesquelles nous pouvons trouver Florence Pugh ou Léa « Kaa du Livre de la Jungle » Seydoux, ne sont malheureusement pas épargnées.

Cela étant dit, il est indéniable de constater que ce second acte a davantage de cœur par rapport au film de 2021, l’amour naissant entre Paul et Chani constituant un pan important de l’histoire. Stilgar, qui était pourtant si neutre et austère dans la première partie, se montre ici sous un visage beaucoup plus pieux et contribue également à ce regain d’âme car c’est à travers lui qu’est véhiculé l’humour du film. Ce dernier est d’ailleurs un peu étriqué et peut avoir tendance à nous faire sortir du récit. Du cœur, le score composé par Hans Zimmer, qui rempile pour l’occasion, n’en manque pas non plus : si elle s’avère peut-être moins tonitruante que n’avait pu l’être la précédente, cette nouvelle partition du compositeur met, en effet, un point d’honneur à l’émotion et va même jusqu’à reprendre le rythme du thumper pour le transformer en battement de cœur.

De même, l’austérité ambiante est mise à mal par l’envergure des images. C’est bien simple : tout laisse à croire que l’équipe de Villeneuve s’en est allé sur la planète Arrakis pour adapter de la manière la plus crédible possible le roman d’Herbert. Avec cette seconde partie, le réalisateur d’Arrival place la barre un cran au dessus, tant au niveau de l’immersion que de l’action, en comparaison de la précédente. Quelques soucis de rythme peuvent être relevés ici et là mais la lumière, les paysages et les décors sont tels que le spectateur est sidéré par l’ampleur du travail artistique.

En guise de mention spéciale, on ne pourra que remercier Denis Villeneuve d’avoir fait l’impasse, à la différence de Lynch, sur les modulateurs de voix et d’avoir pris quelques libertés bienvenues vis-à-vis du roman, notamment concernant le personnage de Chani. Pour sûr, Zendaya nous livre une version une version de la jeune femme fremen qui a plus de caractère que celle de Sean Young et il nous tarde de savoir ce que lui réserve le canadien : en espérant que le « it’s not over yet » lancé à l’attention de Paul durant le dernier quart d’heure débouche sur un troisième film, à l’instar de son « this is only the beggining » qui concluait le premier volet. En revanche, le choix d’avoir, de nouveau, opter pour une actrice pour prêter ses traits à un personnage masculin (Souheila Yacoub succède à Sharon Duncan-Brewster) s’avère, là encore, assez anodin. Par ailleurs, le fait d’avoir retirer, en partie, le personnage d’Alia peut susciter quelques frustrations (d’ordre chronologique entre autres).

Vous l’aurez compris, cette seconde partie n’est pas sans défaut mais force est d’admettre que ce space opera dantesque continue d’émerveiller comme peu l’ont fait avant lui et qu’un troisième film ne serait pas de refus ! 8/10 !

vic-cobb

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