Des images d’archives de Navy SEALs à l’entraînement, faisant subir à leurs corps les pires tortures. « Transformez la douleur en agressivité ! », lance l’instructeur. Le générique du nouveau Peter Berg, DU SANG ET DES LARMES, ne fait aucun mystère sur ses protagonistes : des machines surhumaines à qui l’on a appris à faire de leur souffrance un moteur. La voix-off du soldat Marcus Luttrell qui suit confirme : « Nous voulions l’affrontement ».

Là sont posées les bases d’un film dansant sur le fil du rasoir, car Berg, fort d’un cinéma à l’efficacité brute, alliant caractérisation fine des personnages et mise en scène rageuse, sait qu’on ne traite pas les conflits contemporains comme la Seconde Guerre mondiale. Les enjeux sont soumis à d’autres grilles de lecture, à des tensions géopolitiques aux lignes moins claires. On sait donc gré à DU SANG ET DES LARMES d’explorer les deux bouts du spectre de l’Opération Red Wings.

Lorsque des SEALs chargés de tuer un leader taliban sont surpris par des bergers, ils décident de les laisser partir, non sans un long débat moral. Au risque de se voir rattrapés par leurs ennemis. Ce qui arrive. Une première partie faite de dialogues déconcertants comme « Meurs pour ton pays, je vivrai pour le mien » ou « Je regrette de ne pas avoir tué plus de talibans ». Gênant ? Evidemment !!!

Rarement conflit armé avait été représenté avec une telle sauvagerie ou une semblable intensité. Les balles fusent, les obus pulvérisent la rocaille et les corps dans un ouragan de fureur. Ce récit où les chairs sont suppliciées, découpées brûlées, déchirées, manie réalisme et puissance évocatrice avec une maîtrise rare, faisant de chaque mort une séquence déchirante et sublime. On se souviendra longtemps du regard d'Axelson, attendant qu'une dernière rafale l'arrache au champ de bataille. Peter Berg ne cherche pas à dénoncer l'horreur de la guerre ou exalter une quelconque fibre nationaliste, il s'incline devant son sujet pour rendre un hommage puissamment humble au Soldat, au Combattant

Sauf que s’opère ensuite un renversement. Chaque événement de la seconde partie va venir commenter, par un effet de miroir, ce qui a précédé. Des Afghans entament le même débat que les SEALs. Berg filme des villageois avec le même élan, comme des héros. Il observe la douleur d’un peuple. Bâtit une relation incongrue entre un local et Luttrell… Un contrepoint étonnant et poignant, non dénué de grosses maladresses – dont un générique de fin déchirant et instructif.

Reste que ce morceau de cinoche a l’intelligence de ne pas se repaître des instincts les plus condamnables auxquels aurait succombé un faiseur forcément moins éclairé que l’auteur Peter Berg !!!
Yoann_Carré
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le 19 janv. 2014

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