On arrive dans le film comme on débarquait dans la série: en suivant le cheminement d’un écrit qui entre par les communs, passe de mains en mains pour finir entre celles du comte. C’est avec lui qu’on prend connaissance du contenu du journal ou du pli qui nous a menés ici.
Au naufrage du Titanic de la série répond ici une meilleure annonce: celle d’une visite royale.
En attendant l’effet est le même: si on connait déjà les lieux, on frémit d’y remettre les yeux, et cette fois sur grand écran, si on découvre Donwton abbey, on est frappé par la richesse des décors et costumes, par le passage des sous-sols dépouillés aux étages richement ornés.
En une séquence on est embarqué dans un autre univers, et on sait qu’on va en prendre plein les mirettes.


Le film garde les atouts qui ont fait le succès de la série: décors et costumes soignés, traitement en parallèle des petites gens et de leurs patrons. Organisation à tous les étages.
On aime aussi suivre le protocole, découvrir combien le choix d’une tenue (ou sa non-réception) peut devenir primordial, et comment tout s’imbrique dans cette société délicieusement surannée.


Malheureusement le film ne justifie jamais vraiment son existence, et on ne peut s’empêcher de trouver tous les rebondissements terriblement artificiels, et les différentes intrigues peu palpitantes.
Mais en y repensant, c’était déjà ce qu’on pouvait reprocher à la série surtout sur ses dernières saisons. Seulement, le traitement au fil des épisodes est plus dilué, permet d’installer chaque histoire, rend les ficelles moins flagrantes qu’elles ne le sont quand l’action doit être condensée en 2 heures.


L’ensemble du film est un énorme fan service: qui essaie à la fois de montrer l’ensemble des personnages (en trouvant le moyen de faire reprendre du service à certains), de leur offrir à tous leur petit moment de gloire, de montrer combien ils sont tous formidables et vont nous manquer, et puis surtout de les laisser sur de jolies promesses pour l’avenir.


On apprécie chaque partie du décorum qui fait le charme de l’univers déployé par la série, on mesure une fois de plus le chemin parcouru depuis le 1er épisode, et puis surtout pour la première fois on se retrouve à partager notre amour pour la demeure anglaise et ses occupants, on constate qu’on est nombreux, et d’âges différents à prendre du plaisir devant l’écran, et à rire des délicieuses répliques de la brillante aïeule (parfaite Maggie Smith).
C’est dans ces moments qu’on se dit que terminer l’aventure au cinéma a du bon, ça offre le loisir de vérifier à quel point la série a pu être marquante pour beaucoup de monde, ça crée une sorte de connivence dans la salle, ça pousse à sourire et à se délecter davantage encore parce qu’on sent qu’on n’est pas seul dans notre situation.


Le tout sans oublier bien sûr de nous faire du pied à grand renfort de “que sera le domaine dans 100 ans?” (ben demandez-nous les gars, nous on est déjà dans le “1 siècle plus tard”).
Le clin d’oeil est appuyé, on pourrait presque trouver cette opération séduction écoeurante, mais il y a cette petite musique entêtante qui vient brouiller notre lucidité et nous fait replonger dans 9 années d’aventures britanniques.
On ressort de là en se disant qu’on aimerait sans doute vivre les aventures des descendants des filles Crowley, même si rien n’égalera le charme dont nous a régalé la série au fil des épisodes - changement d’époque oblige.


Si on aime l’ambiance downton, alors on excuse le scénario du film qui n’arrive pas à faire naître le suspens, qui ne sait pas quoi faire de ses domestiques et les place dans une révolte complètement farfelue, qui en voulant traiter tout le monde finit par ne traiter de rien, et qui donne le beau rôle à l’ensemble de nos héros. (Il aurait été difficile de choisir d’en ternir un en fin de parcours, par contre on aurait pu assister à un vrai moment dramatique - et on en a peur un instant).


On passe l’éponge sur ce qui manque pour que le film marque les esprits pour ne garder que l’essentiel: l’ambiance délicieuse d’une société d’un autre âge, l’excellence d’une maison respectable dont on essaie de maintenir le prestige, et des acteurs qu’on a tellement suivis qu’ils finissent par faire partie de la famille.


On quitte le domaine et on regagne notre civilisation presque surpris de constater qu’on n’est pas encore en hiver, alors que voici le genre de petite douceur qu’on aimerait savourer au coin du feu, en buvant un bon thé agrémenté de petits gâteaux anglais.
C’est comme ça en tout cas qu’on prendra plaisir à redécouvrir la saga Downton abbey à l’occasion.

iori
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le 14 oct. 2019

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