La démarche de Jacques Audiard pour son « Dheepan » part d’un bon sentiment. Enfin j’imagine. Casse-gueule par nature, le désir ardent de rendre hommage à Peckinpah et à ses «Chiens de Paille» en proposant un remake dans une cité de France d’aujourd’hui, n’est pas l’idée la plus novatrice qui soit, surtout pour le mec qui y est déjà allé de la relecture cinématographique avec son «De battre mon coeur s’est arrêté». Mais soit, pourquoi pas. J’adore les chiens, j’adore la paille, j'adore "Les Chiens de paille".


Rapidement abandonné, le projet se mue en son négatif absolu.
Faux remake avec de «faux» acteurs, doublé d’une fausse romance pour un faux film naturaliste shooté en cinémascope, ça donne un faux vigilante, une œuvre hybride, auréolée d’une Palme d’Or qui l’aura, comme d’habitude, plus desservie que portée.


S’il conserve l’arrivée d’étrangers dans un pays qui n’est pas le leur, c’est une famille qu’il choisit de mettre au centre de son récit, un père, une mère, une fille, associés au doigt mouillé pour quitter un pays en guerre. Il se focalise sur l’exact opposé du personnage qu’incarnait Dustin Hoffman dans le brûlot de Peckinpah : au matheux binoclard, Audiard oppose une bête de guerre, ex-Tigre tamoul qui doit s’adapter dans un nouveau monde en domptant le félin en lui.
Le cheminement est inverse mais tous les chemins mènent à Rome.


Quelques points noirs pourtant...
Si on peut accepter, en se pinçant le nez, la représentation de la banlieue qu’on mettra sur le compte de la fantasmagorie de l’auteur, il est plus difficile d'appréhender son choix hasardeux de casting (Vincent Rottiers en Brahim, c’est un peu comme si tu prenais Elie Semoun pour jouer Leatherface) et une fin guimauve qui dénote. De piano.


Jacques Audiard garde cette place singulière dans la morne plaine du cinéma français où il continue de creuser son sillon, entre série B et film d’auteur, s’éloignant davantage des dialogues pour épouser la narration par l’image. Lui, le "fils de", faire un film quasiment intégralement en Taboulé, si c’est pas tuer le père, je ne m’appelle plus Henry-Hugues.


Moi, j’ai mis 8 mais c’est parce que j’adore les moustachus au cinéma.
Chaplin, Bronson, Reynolds, Rochefort, Domenech, Sam Elliott, Ron Jeremy, ZeBigNowhere ou Michel Blanc, Lee Van Cleef, Catherine Deneuve, Omar Sharif, Joseph Staline, le Sergent Garcia et maintenant, donc, Antonythasan Jesuthasan.


La bise.
DjeeVanCleef
8
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le 16 oct. 2017

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DjeeVanCleef

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