L'espoir (ou le déni, selon le point de vue) est une force étonnamment puissante, suffisamment en ce qui me concerne pour refuser de croire, jusqu'au bout du bout, que la clef scénaristique de Deux jours à tuer soit cette solution d'une évidence à pleurer se dessinant dès le tout début. Persuadée - par pure affection pour la distribution ou par total oubli de ce que je connaissais de l'œuvre de Becker - qu'en dépit de ses défauts de forme évidents, le film s'avérerait avoir un propos nouveau ou tout au moins sincère et brut sur la dépression nerveuse ou la définition du bonheur, la chute n'en fut que plus rude.

Dès lors que cette chute finale - qui narrativement est donc si prévisible qu'elle n'en est pas une - a ôté le (très) peu d'intérêt que consistait les scènes précédentes, pourquoi faire un quelconque effort et pardonner la scénarisation bien peu organique, les dialogues totalement dépourvus de naturel, la direction d'acteurs d'un ridicule achevé et la mise en scène sans aucune inspiration ? Deux jours à tuer apparait comme un beau gâchis, noyant ses quelques bonnes idées dans d'insupportables effets de manche narratifs et passant à coté des nombreux sujets et sous-intrigues qu'il aurait pu aborder (la satire sociale sous-jacente est faite sans la moindre nuance, finissant presque par se retourner pour glorifier la bourgeoisie, la scène pivot du dîner empile les clichés, le thème de la filiation est maltraité au possible...)

Le film aurait réellement gagné à être à la fois moins bavard dans ses épouvantables dialogues, et plus parlant dans sa mise en place des personnages : le fait est que sans le moindre background, aucune raison ne nous est jamais donnée d'avoir quoique ce soit à faire d'Antoine Méliot, de sa femme, de son père ou de la copine de son pote. Tout au juste ressent-on une vague envie de lui coller une baffe ça et là, mais un zeste d'antipathie pour le degré zéro de l'empathie ne motive en rien à rester assis devant l'écran. Se payant en plus le luxe de véhiculer une fausse nostalgie sentant plutôt le rance et un package de valeurs vieille France cher au style Jean Becker, ce brouet immonde compte comme 80 minutes parmi les plus longues du cinéma français, à éviter même en ayant pile une heure vingt à tuer. Quitte à totalement perdre son temps il est des rediffusions quotidiennes de soap-opéras bien moins pénibles.
Julie_D
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le 1 juil. 2010

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Julie_D

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