Une histoire passionnelle portée par ses actrices mais trop austère et alourdie de fins à répétition

Voici un nouveau film qui met en exergue le lourd poids des traditions et de la religion sur l’homme. En l’occurrence ici deux femmes. Deux femmes qui se sont toujours aimées mais dont l’amour n’a pas pu s’épanouir à cause des coutumes et des règles édictées par la communauté juive orthodoxe londonienne. Des traditions archaïques à la limite de l’obscurantisme qui freinent voire interdisent la liberté d’aimer qui l’on veut et de vivre sa vie comme on l’entend. Sur ce point, « Désobéissance » réussit bien à nous faire comprendre l’épée de Damoclès perchée au-dessus de Ronit et Esti. Un amour lesbien pointé du doigt auquel la fuite de la première a mis un terme mais que son retour ranime dès le premier regard. Le film évite d’être un réquisitoire pour plutôt se concentrer sur les faits, il observe mais ne juge pas, se tient plutôt à distance pour ne pas devenir un pamphlet anti-religieux.


Cependant, si l’on arrive à ressentir la passion qui étreint ces deux personnages, on ne peut nier que le film s’avère trop austère et froid pour réellement nous emporter. Sebastian Lelio qui nous avait surpris avec son très beau « Une femme fantastique » (Oscar du meilleur film étranger) se tient trop à distance de ces personnages et ne parvient à rendre compte de la fougue de cette passion que par intermittences. La pudeur de ces images confine parfois à l’ascétisme dans la représentation qu’il fait de cet amour. Peut-être pour être en accord avec la rigueur de la religion juive orthodoxe. Mais le lenteur du long-métrage ajoutée à une tonalité déprimante et des images terne n’est pas toujours du meilleur effet. Cette froideur clinique dans l’esthétique est souvent préjudiciable aux émotions qui devraient traverser de plein cœur le spectateur. Seules deux scènes (celle de l’hôtel et celle dans la maison du père défunt) cristallisent une tension sensuelle et sexuelle souvent aux abonnées absentes.


Mais « Désobéissance » bénéficie du soutien de deux actrices très concernées qui font beaucoup dans la relative réussite du film. Rachel Weisz comme Rachel McAdams sont impeccables et il y a une symbiose parfaite entre elles qui révèle un choix de casting judicieux, laissant le troisième personnage de ce simili triangle amoureux interprété par Alessandro Nivola, un peu en retrait. On regrette également une fin à répétition qui n’aide pas à voir clair dans les intentions de l’auteur. En effet, cette œuvre n’en finit pas de finir alors qu’elle aurait pu se terminer d’une seule manière et ainsi trancher. Dans tous les cas, si l’on apprécie le réalisme de cette histoire d’amour contrariée, on aurait apprécié plus de fougue, plus de chaleur humaine et donc plus de passion et d’émotions dans ce film qui en manque cruellement. On est trop tenu à distance et on reste un peu sur notre faim malgré un sujet traité de front et le bel investissement de son magnifique duo d’actrices.


Plus de critiques cinéma sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.

JorikVesperhaven
6

Créée

le 15 juin 2018

Critique lue 577 fois

2 j'aime

Rémy Fiers

Écrit par

Critique lue 577 fois

2

D'autres avis sur Désobéissance

Désobéissance
Alicia_87
9

Liberté chérie

En adaptant librement le roman « La désobéissance », le réalisateur chilien Sebastián Lelio, nous offre dans son troisième film, le traitement des thèmes qui lui sont chers. Fortes,...

le 18 juin 2018

16 j'aime

12

Désobéissance
Maddiem
7

Le goût amer de la liberté

S’il ne fait aucun doute que l’interprétation des deux actrices principales de Désobéissance était des plus magistrale, Rachel McAdams étant pour moi ici au sommet de son art, et n’ayant d’ailleurs...

le 15 juin 2018

10 j'aime

Désobéissance
Pequignon
5

Le désir... et c'est tout.

Encore un film qui souffre de sa bande-annonce. J'essaie de ne pas regarder les bandes-annonces, ce n'est pas toujours facile. Problème ici : le sujet annoncé arrive au bout d'une heure de film...

le 3 juil. 2018

7 j'aime

Du même critique

Les Animaux fantastiques - Les Crimes de Grindelwald
JorikVesperhaven
5

Formellement irréprochable, une suite confuse qui nous perd à force de sous-intrigues inachevées.

Le premier épisode était une franchement bonne surprise qui étendait l’univers du sorcier à lunettes avec intelligence et de manière plutôt jubilatoire. Une espèce de grand huit plein de nouveautés,...

le 15 nov. 2018

93 j'aime

10

TÁR
JorikVesperhaven
4

Tartare d'auteur.

Si ce n’est une Cate Blanchett au-delà de toute critique et encore une fois impressionnante et monstrueuse de talent - en somme parfaite - c’est peu dire que ce film très attendu et prétendant à de...

le 27 oct. 2022

88 j'aime

11

First Man - Le Premier Homme sur la Lune
JorikVesperhaven
4

Chazelle se loupe avec cette évocation froide et ennuyeuse d'où ne surnage aucune émotion.

On se sent toujours un peu bête lorsqu’on fait partie des seuls à ne pas avoir aimé un film jugé à la quasi unanimité excellent voire proche du chef-d’œuvre, et cela par les critiques comme par une...

le 18 oct. 2018

81 j'aime

11