De Niro et Hoffman sont sur un bateau. Ils se dirigent vers une île, l’île aux marionnettes, située sur le continent de la parodie politique-fiction. Et dans l’affaire, les gogos c’est nous. Je ne sais pas si on les avait déjà mis ensemble dans le même film ces deux là, mais la rencontre est tout sauf banale. Avec en plus une découverte blonde, Anna Heche qui fait le lien entre les deux, et ça devient explosif, le fou rire n’est pas loin.
De Niro en spin doctor manipulateur de l’opinion, et Hoffman en producteur doré mais frustré, artiste raté donc, ça promet. Ils ne sont jamais aussi bons que quand leurs personnages sont ternes; de discrets hommes de l’ombre, des cerveaux cachés derrière. C’est sur ce genre de rôles là, qu’on voit si un acteur est bon ou pas, s’il sonne juste ou pas.
Donc, le sommet de l’Etat leur donne l’occasion de briller à nos deux stars. Le président des Etats-Unis à eut une histoire de fesses extraconjugale just’avant les élections, (Bill Clinton ?), et il faut trouver un truc pour faire diversion. Nos deux lascars ne trouvent pas mieux que d’inventer une guerre imaginaire contre l’Albanie. Et le plus énorme n’est même pas que ça marche, mais que c’est crédible, et là, ça fait franchement peur. Si c’était une comédie dramatique, on se serait dit que c’est exagéré. C’est une parodie, donc on prend le truc en pleine poire, sans pouvoir rien faire, sinon se dire que c’est peut-être vrai. Gagné! Lévinson arrive à mettre dans le même sac, la chèvre et le chou, le vrai et le faux, sans que les deux ne s’annulent par contraste grotesque. On rit, et ça va même loin, on plonge dans l’absurde le plus le burlesque. (L'épisode du crash de l’avion, fallait oser le faire quand même !). No spolier. Le patriotisme aveugle, le charity business genre « We are the world », l’idiotie américaine généralisée, la crédulité, tous en prennent pour leur grade. On assiste à la manipulation médiatique en mode souterrain, tout ce que l’on ne voit pas habituellement. En gros, on voit notre monde actuel et sa dépendance aux médias. Et la facilité avec laquelle on peut être manipulé par ces mêmes medias. Les seconds rôles en rajoutent dans la qualité, (H Macy, Harrelson, Heche), tout ça respire le travail bien fait, d’où le problème que me pose ce film. Et si cette comédie n’était pas une comédie mais un pamphlet politique bien dissimulé, doublé d’un message d’intérêt public ?
Pour preuve je vais faire une petite digression. Le lendemain, au boulot, je prends ma pause, et dans la télé du réfectoire, je vois la photo d’une petite fille toute sale, avec un chiot dans les bras. C’est une réfugiée ukrainienne. Tout le monde est touché par le sort des ukrainiens en guerre. Puis on montre la photo d’une asiatique qui est rescapée d’une catastrophe naturelle. Tout le monde a le coeur serré. Et là, le journaliste intervient alors pour nous dire de nous méfier des images que l’on trouve sur internet, (ou à la télé), car tout ce que l’on vient de voir est faux. La première photo est tirée d’un concours de photographie, (rien à voir avec l’Ukraine, donc), et la deuxième est tirée d’un film, preuves à l’appui. Fin de la démonstration. Mais moi je vais encore plus loin. Ce que j’ai vu précédemment est-ce vrai ? On nous a montré au journal télé une vidéo, dedans des gens qui assaillent un camion chargé de riz, au Burkina-Faso. Le journaliste local avait dit que les policiers n’étaient pas les derniers à piller. Est-ce vrai ? Le prix du sac de riz flambe là-bas, 500 francs CFA, une fortune. C’est ce qu’on a dit, mais est-ce vérifié ? Ensuite on passe à une vidéo amateur, de mauvaise qualité, où on voit des femmes-soldats ramper dans la boue, en train de prendre des coup de lianes par des instructeurs. Est-ce vrai ? La journaliste pakistanaise qui raconte ça à l’air honnête, gentille, émue, derrière ses lunettes teintées, d'accord, mais est-ce vrai ? Vous voyez ce que je veux dire ? La vérité n’est jamais là où on l’attend.

Angie_Eklespri
9
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le 16 sept. 2014

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Angie_Eklespri

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