Absente des écrans depuis 2002 et la réception mitigé de son K-19, la cinéaste Kathryn Bigelow revenait aux affaires en 2009 avec The Hurt Locker, remportant au passage l'Oscar de la meilleure réalisatrice, une première dans l'histoire.


Derrière ses atours de film-débat sur l'intervention américaine en Irak, The Hurt Locker ne se contente pas d'être un énième film de guerre mais raconte une toute autre chose. Se gardant bien de donner un avis personnel sur la situation géo-politique, extrêmement complexe, la cinéaste préfère s'attarder sur les répercussions humaines d'une telle situation.


A partir d'une mise en scène mobile et immersive (ce qui ne va malheureusement pas sans une poignée de plans pas toujours très lisibles), Kathryn Bigelow capte le quotidien de soldats plongés dans un conflit qui les dépasse, des hommes et des femmes faisant simplement leur boulot et tentant de rester en vie une journée de plus. Un point de vue loin de tout humanisme larmoyant ou bellicisme malvenu, retranscrivant avec force et tension la paranoïa ambiante qui plane au-dessus de tous les protagonistes, qu'il s'agisse de l'armée ou des civiles, chacun ne pouvant s'empêcher de voir un ennemi potentiel dans le regard de l'autre.


Un regard neutre qui pourra déstabiliser, voir rebuter, surtout que Bigelow ne brosse à aucun moment le spectateur dans le sens du poil, abordant des sujets controversés et inconfortables, comme le difficile (voir impossible) retour à la vie civile de citoyens programmés pour tuer et désormais inaptes à vivre dans notre société. A cela, la réalisatrice ajoute une réflexion passionnante sur la dépendance à l'adrénaline, sujet qu'elle avait déjà abordé à travers Point Break et Strange Days, et qui trouve ici une conclusion inconfortable mais pertinente, à l'image d'un final souvent mal interprété mais tombant comme un couperet.


Utilisant sa toile de fond pour mettre à jour des points importants mais peu abordés car inconfortables, beaucoup refusant de croire que l'on peut éprouver un plaisir masochiste dans une situation aussi apocalyptique, Kathryn Bigelow signe une fois encore une oeuvre forte et plus intelligente qu'il n'y paraît, aussi spectaculaire que couillu dans son message, portée par une troupe de comédiens justes et impliqués, Jeremy Renner en tête.

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le 20 déc. 2015

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Gand-Alf

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