Dans ce documentaire se focalisant sur les études pour devenir infirmier, Nicolas Philibert est plus pertinent lorsqu'il décide de traiter en biais de la réalité du métier.


La première partie se concentre sur la formation, les cours (grâce auxquels on sent que le métier est porté par des valeurs hautes, de l'énoncé abrupt de la déontologie dont chaque phrase fait sens en passant par un laïus sur l'idée que jamais l'intérêt financier ne doit entrer en jeu dans le jugement du soin), les exercices accompagnés par des professeurs dont on sent d'ores et déjà la présence forte et leur encadrement, aux partiels, simulations de cas pratiques. Une partie construite comme une journée de cours classique mais balayant habilement plusieurs mois.


La deuxième s'immisce un temps aux cotés de quelques élèves en stage dont on devine quelques visage récurrents et qu'on commence à voir comme des personnages qu'on connaitra bien mieux dans la troisième partie. Ces stages sont l'occasion d'une entrée concrète sur le terrain, montrant avec frontalité mais toujours pudeur l'exercice du soin, l'application sur des corps, bien vivants, des personnes en chair dont Philibert s'amuse presque à filmer les réactions, plus ou moins conciliantes, face aux premiers soins apportés par ces étudiants déjà praticiens.


La troisième se concentre enfin sur des dialogues entre professeurs et élèves revenant sur l'expérience de leur stage.
C'est en captant leurs questions, leurs réactions, leurs peurs, leurs soulagements, leurs envies, leur émotion vive, leur fragilité parfois heurtée par la réalité du corps et la violence d'un métier (malmené financièrement notamment), que se dessinent des portraits humains, aux valeurs fortes et aux mentalités solides, et où Philibert parle étonnamment mieux, car en diagonale, du métier si engageant d'infirmier. En somme c'est dans cette dernière partie, la plus longue, la moins vivante car faite de simples discussions, que le réalisateur livre en fin de compte son meilleur, dans cette galerie de jeunes femmes et hommes, tour à tour véritablement drôles ou bouleversant (cette jeune fille qui craque au moment du récit qu'elle rapporte d'une jeune immigrée qui pour survivre a dû vendre son corps). En leur laissant prendre frontalement la parole, et en capturant le regard de soutien et d'écoute de leurs professeurs le réalisateur dessine en filigrane un futur prometteur et un cercle vertueux entre patient, étudiants infirmiers et professeurs, et livre un très beau film.

Charles_Dubois
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs documentaires, Les meilleurs films de 2018, Les meilleurs films français de 2018 et Journal Cinéphile de 2020

Créée

le 15 déc. 2020

Critique lue 114 fois

Charles Dubois

Écrit par

Critique lue 114 fois

D'autres avis sur De chaque instant

De chaque instant
Fwankifaël
7

Fais un voeu

Nota : film vu en avant-première au Café des Images de Caen, en présence du réalisateur Quand on lui demande quel lien il fait entre le vent d'hiver agitant les arbres du jardin de l'hôpital Maison...

le 11 sept. 2018

4 j'aime

De chaque instant
Boubakar
6

Une vocation

A la suite de problèmes de santé survenus en 2016, Nicolas Philibert a voulu réaliser un documentaire sur les infirmières et infirmiers, et il a donc suivi pendant plusieurs mois les élèves d'un...

le 19 avr. 2023

De chaque instant
Tinou
5

Critique de De chaque instant par Tinou

Nicolas Philibert s’efface complètement pour mieux laisser les intervenants s’exprimer. Aucun commentaire, aucune réponse face à la caméra mais des moments de vie pris sur le vif. Il cherche à nous...

le 3 mars 2021

Du même critique

Les Blues Brothers
Charles_Dubois
5

Critique de Les Blues Brothers par Charles Dubois

Film emblématique d'une génération, The Blues Brothers n'a pas réussi à me convaincre. En tous cas pas totalement. Certes je n'ai pas passé un mauvais moment, j'ai même ri franchement à certains...

le 29 déc. 2015

18 j'aime

Her
Charles_Dubois
10

30 Putain de minutes

30 minutes. 30 putain de minutes. Je crois n'avoir jamais sorti aussi longtemps mon chien. C'est le temps qu'il m'a fallu pour arrêter de pleurer. Pas de tristesse. Pas de joie non plus. De...

le 23 juil. 2014

16 j'aime