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On était impatients de découvrir Crimson Peak sur grand écran. Le film promettait d’être intriguant, romantique et gothique à souhait, le tout porté par un excellent trio d’acteurs (Mia Wasikowska, Tom Hiddleston, Jessica Chastain). Le résultat, sans être entièrement décevant, n’est pas tout à fait à la hauteur des attentes. Il faut dire que le métrage sombre plus souvent que de raison dans le grand-guignol, avec une surenchère dans le macabre qui prête parfois à sourire, sans oublier des fantômes en veux-tu, en voilà, qui finalement n’apportent pas grand-chose à l’histoire. C’est bien dommage car les personnages et l’intrigue de départ sont captivants. Comme à son habitude, Tom Hiddleston campe parfaitement l’anti-héros torturé Thomas Sharpe, un aristocrate désargenté cachant un lourd secret derrière ses manières de gentleman, tandis que Mia Wasikowska incarne la jeune femme innocente sur laquelle un piège machiavélique se referme. A leurs côtés, Jessica Chastain est effrayante de froideur dans le rôle de Lucille, la sœur de Thomas. Quant à la demeure des Sharpe, Allerdale Hale, ancienne, tombant en ruines — un trou dans la toiture laisse pénétrer dans le hall d’entrée feuilles mortes et flocons de neige —, elle représente la quintessence de la demeure gothique post-moderne, vision étrange, déformée et grotesque des vieilles bâtisses britanniques, à laquelle se superpose par instants l’image de la maison hantée des parcs d’attractions.


Comme le Labyrinthe de Pan, Crimson Peak est marqué par une vraie recherche visuelle. La palette chromatique du métrage ne cesse d’osciller entre clair-obscur et rouge sang, ce rouge qui est aussi la couleur de l’argile que Thomas cherche à exploiter. La terre elle-même semble saigner, telle une victime muette des agissements des Sharpe, et lorsque le personnage marche sur la neige, il laisse derrière lui des traces de pas rouge sang.


Il faut voir Crimson Peak comme un pastiche, une sorte de lointain hommage à un genre, celui du récit gothique où de pures jeunes filles font face à des êtres malfaisants dans un environnement hostile. De ce point de vue, le film de Guillermo Del Toro est une réussite malgré son côté grand-guignolesque. Il reprend en effet tous les ingrédients classiques de ce type de récit, ainsi que le thème de la décadence aristocratique. Les Sharpe appartiennent à un monde moribond, tout est en ruines chez eux, de leur demeure ancestrale à leur moralité et leur propre psyché. Ils sont déjà en passe de devenir semblables aux fantômes qu’Edith voit. La relation dénaturée qu’ils entretiennent les rend presque pitoyables car, à mesure que le film avance, on comprend qu’ils sont eux-mêmes prisonniers de leurs propres démons, prisonniers d’un passé inavouable qui les enchaîne à Allerdale Hale et les empêche de s’arracher au mont ensanglanté (le Crimson Peak du titre). Chez eux, la folie a depuis longtemps pris le pas sur la raison.
Il est regrettable que le premier tiers du film en dévoile déjà trop sur la suite de l’histoire. On devine assez vite que Thomas et sa sœur ont une relation ambiguë et qu’Edith encourt un grave danger en épousant Thomas. L’intrigue en devient assez prévisible. Un peu plus de suspense et un peu moins de grand-guignol auraient été bienvenus. Reste la performance des acteurs et la (re)création d’un monde étrange et inquiétant, aux portes de la folie. Pas si mal.

Jessalynn_ImFin
5
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le 23 oct. 2015

Critique lue 357 fois

Jessalynn_ImFin

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