Contrecoups
5.4
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Film de Charlie McDowell (2022)

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Une belle maison aux allées d'orangers et piscine bordée de belles pierres où un homme goûte les fruits, se repose au bord de l'eau et visite les pièces tout naturellement, avant que son allure incertaine nous renseigne sur son statut d'intrus, pour lentement, quitter les lieux...Jusqu'à faire demi tour pour évidemment introduire la confrontation par l'arrivée inopinée des propriétaires. Dès cette scène, on sait déjà que le temps sera long, notre voleur attendant patiemment d'être vu, et l'on se demande si son incapacité à trouver une bonne planque, ne serait pas un hommage aux Monty Python à se cacher sans bouger...mais au vu de tous.
Charlie McDowell semble vouloir redistribuer les codes du genre par ses changements de tons qui si au départ piquent notre curiosité, aura tendance à les introduire parfois maladroitement, jouant du comique, du drame, de la satire sociale, et de l'hémoglobine, sous ce si beau soleil californien, invitant plutôt à la tranquillité qu'à la violence des échanges.
Si Jesse Plemons que l'on apprécie de rôle en rôle et montre son talent à les diversifier ici alternant entre bonhomie et arrogance du monde des affaires, au jeu que l'on imagine jouissif, Jason Segel à l'aise dans le flou de son personnage, bienveillant, avec son physique flottant aidant à nous le présenter comme maladroit et soumis à une situation qui dérape, c'est Lily Collins, peu crédible à son réveil bien poussif, servie par des dialogues sans intérêt, qui ne prendra conscience de sa relation toxique, que grâce à un autre homme. Un comble pour la portée féministe voulue de l'exercice, et qui nous fait encore regretter les choix de certains réalisateurs à donner des rôles à leurs compagnes. On pourra trouver particulièrement bienvenue la réponse aux plaintes de l'épouse m'enlevant les mots de la bouche, par un beau j'en ai rien à foutre, mais nous introduire ce voleur inadapté comme élément déclencheur de la prise de conscience féminine, étonne, d'autant plus qu'il semble n'avoir jamais vraiment de suite dans les idées.


La bonne idée pourtant étant d'instaurer une ambiance invitant aux relations des plus courtoises, aux dialogues polis et respectueux, toutes en fourberie et manipulation pour cette colocation obligée. Les kidnappés useront de toute leur fausse bonne volonté à trouver une solution au départ du voleur et dans les meilleures conditions. L'occasion d'introduire le milliardaire qui évoluera un peu moins à son avantage au fil de l'histoire et de ses contraintes pour en filigrane marquer la main mise sur sa jeune épouse mais viendra polluer les joutes verbales que l'on espérait avec plus de verve.
Une première partie sympathique teintée d'humour noir et de nombreux ratés, où la tension montera crescendo nous donnant à voir l'évolution des personnages confrontés à leurs propres vérités. On regrette alors que la suite s'étiole et introduise un quatrième personnage inutile pour donner un peu de grain à moudre à une narration qui étire ses scènes. Les caractérisations ou les motivations n'offrent pas plus de complexité ou de profondeur si ce n'est de détailler trois comportements pour trois strates sociales, un peu grossières pour cette lutte des classes et cette dénonciation d'une société de gagnants, fière de l'être, accablant tout sur son passage.


L'introduction laissera donc la place au duel psychologique souligné par les comportements de chacun. L'arrogant mari, son épouse mal traitée et le voleur fébrile. Malheureusement, si le huis clos peut se prêter aux ambiances étouffantes, nos trois colocataires vaquent tranquillement à leur occupation sans que l'on ne ressente d'angoisse ou de claustrophobie, voire même de danger. Notre voleur étant certainement le moins dangereux des trois.


On peut alors sourire quand le propriétaire a l'excellente idée de proposer une somme bien supérieure à celle demandée par son kidnappeur, ou lors d'une tentative de fuite, en le voyant zigzaguer lourdement entre les orangers pensant ainsi se rendre invisible et perdre son poursuivant, pourtant juste derrière lui. Un peu moins quand le cinéaste décide de pimenter le tout par un interlude inattendu qui si il n'était pas dramatique, serait franchement risible pour trouver son apothéose dans un final décomplexé et hargneux, que malheureusement, on avait deviné depuis longtemps, et qui vient clore la confrontation, comme un cheveu sur la soupe.


Un thriller sans surprise qui jouera de ses acteurs, de ses décors, de sa belle photo et de ses jeux de caméra, à combler sa facilité scénaristique.

limma
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le 31 mars 2022

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