Coin Locker Girl
6.4
Coin Locker Girl

Film de Han Jun-Hee (2015)

Alors que le cinéma coréen avait du mal à se relever, une jeunesse enragée constitua la nouvelle vague coréenne. Parmi cette jeunesse enragée, on peut retrouver des réalisateurs comme Park Chan Wook ou Bong Joon Hoo. Cette nouvelle vague a permis au cinéma coréen de repartir, pour le meilleur .. Mais aussi pour le pire.


Malheureusement, nous retrouvons aujourd'hui des thrillers coréens qui sont souvent du même acabits. Cela ne comprend pas seulement que les films de vengeance, cela va un peu au-delà. Si on devait caractériser ces films nous pourrions les résumer par (liste non-exhaustive) : du sang (beaucoup de sang), de la violence, de la torture, des principes moraux bafoués, des méchants increvables qui sont vraiment méchants (et parfois en costard), des complots et de bons gros anti-héros (histoire que ça soit encore moins moral. À croire qu'en Corée, tout le monde est méchant (et qu'ils ont tous des costards). Et comme ce sont des méchants, ils tuent des gens, donc quelqu'un s'empresse de tuer la personne responsable du crime, ce qui, techniquement, peut occasionner des règlements de comptes et vengeances qui ne s'arrêtent jamais. Après, c'est si on croit la Corée que l'on voit au cinéma.


Mais le problème, c'est que ces films ont aussi une esthétique assez similaire et fade. À croire, que le cinéma coréen s'enferme de plus en plus. Même si, je l'admets, quelque part je généralise un peu puisque certains réalisateurs savent nous proposer quelque chose de nouveau comme Su-Jin Lee avec A Cappella qui est vraiment une œuvre de génie alors qu'il aurait pu être un simple film sur la vengeance de Han Gong Ju, mais au lieu de ça, les victimes ne restent que des simples victimes. Ou A Hard Day de Seong-hoon Kim qui tournait par moment les codes du thrillers coréens en dérision.


C'est donc dans cette situation que l'on arrive au Festival de Cannes avec quatre films coréens sélectionnés (2 à Un Certain Regard, 1 en séance de minuit et le dernier en séance spéciale à la Semaine de la Critique). Je ne parlerai pas de Office, vu que je n'ai pas pu le voir encore. Les synopsis des trois autres annoncent plusieurs choses : du sang (beaucoup de sang), des complots et des méchants vraiment méchants (ils auront peut-être des costards avec de la chance.


Nous avons donc Madonna de Shin Su-Won où une infirmière arrive dans un hôpital où elle va trouver des complots, ainsi que des méchants (en costard). Puis, nous avons The Shameless de Oh Seung-uk sur un détective qui se lie d’amitié avec la petite amie d’un chef mafieux dans le but de le faire tomber où nous pouvons trouver du sang (beaucoup de sang), des méchants increvables et des complots. Puis enfin, Coin Locker Girl de Jun-hee Han qui parle de la vie d'une fille qui a été retrouvée bébé dans un casier de consigne automatique et qui se retrouve au sein d'une famille mafieuse, elle vit alors dans un environnement composé de sang (pas trop cette fois), de complots et de méchants (en costard).


Mais avant de critiquer ces films, il faut souligner que les différents sélectionneurs des différentes compétitions de Cannes ont fait l'effort de sélectionner des films qui tentent de se démarquer du thriller coréen de base (même s'ils restent tout de même assez consensuel pour du cinéma coréen du genre).


Les trois quarts de Madonna ont l'avantage de ne pas tomber dans la violence et torture facile. Mais la fin s'avéra être un condensé de cliché de thrillers coréens. Dommage puisque Shin Su-Won avait réalisé auparavant Suneung et avait réussi à en faire un bon film malgré une utilisation un peu forcée des codes du cinéma coréen (méchants, sangs, complots, etc) mais le message était suffisamment fort. Mais pas cette fois-ci avec Madonna.


The Shameless lui de son côté est strictement similaire à un thriller coréen de base, mais il arrive à se distinguer en ne sombrant pas dans la violence facile (sauf avec les phéromones de porc) et en ayant des complots qui sont intelligents et bien écrit. C'est un bon thriller coréen, mais qui n'innove presque pas.


Au final, des trois, le plus distingué, se sera Coin Locker Girl puisque malgré un scénario bancale.. très bancale.. le film ne sera jamais chiant.


Le scénario est comme je l'ai dit bancale. Par là, je ne sous-entend pas qu'il y a des incohérences mais qu'il est simplement facile et assez consensuel. C'est du déjà-vu, et ce pas seulement dans le cinéma coréen, mais aussi dans le cinéma américain et mafia etc.. C'est le traitement de l'histoire qui sera plus "coréen". De plus, certains choix ne sont pas toujours les meilleurs à mon goût. Par exemple, la fin peut sembler un peu longue car on se doute rapidement du déroulement de la suite du film. Il aurait été mieux de conclure sur la scène de type Requiem For A Dream Et justement, si je devais déterminer le point noir du film, je parlerai sans hésiter du scénario.


Tout n'est pas parfait non plus au niveau des personnages, qui ne sont pas (pour la plupart) nuls, mais très peu intéressants. Peut-être que le seul personnage vraiment intéressant, c'est celui de la jeune fille aux cheveux roses, Ssong, la sœur de Il-Young mais qui est largement sous-exploitée. par contre d'autres personnages sont assez clichés. Comme celui de l'handicapé, Hong-Joo. Les personnages du genre pouvaient être intéressants les premières fois où on les a utilisés au cinéma, mais ici, ils ne sonnent simplement que comme un outil scénaristique.


Le casting aide beaucoup pour redresser le scénario et ses personnages un peu fades. Heureusement que Kim Hye-Soo et Kim Go-Eun sont là pour rendre intéressant les personnages de Il-Young et de la mère en ayant une bonne prestance à l'écran. Sinon globalement le casting n'est pas mauvais (mais il ne brille pas non plus).


Mais ce n'est là où Coin Locker Girl devient un film intéressant (pas parfait mais intéressant).


Le premier point intéressant se situe dans le fait que malgré le costard d'un des méchants, le film ne tombe pas dans la facilité du thriller coréen de base. D'habitude, le monde entier est potentiellement méchant dans un thriller coréen, et les méchants sont vraiment méchants et les gentils sont des anti-héros. Ici c'est l'inverse, les gens sont tous potentiellement gentils (oui je sais, c'est très binaire comme façon de penser) et l'héroïne est clairement du bon côté du banc même si elle n'est pas toute blanche non plus. Et la mère, le frère, etc.. font quand même vachement preuve de compassion pour des méchants. Après, ce n'est pas à 100% différents des personnages de thriller coréen, mais on va dire 65%.


Autre point où le film se distingue, c'est au niveau de la violence qui n'est jamais facile ou excessive comme on le voit bien trop souvent aujourd'hui. Ici pas de phéromones de porc, de batterie de voiture ou autres objets destinés à tout sauf le pugilat. Ici, la mafia est uniformisée, tout le monde est au couteau. Et au final, ça renforce quand même pas mal la crédibilité du film.


Le dernier point, et il est majeur, c'est que le film possède une vraie personnalité. La musique n'est jamais poussive ou à contrario absente, elle est, sans se faire remarquer, au bon moment, quand il faut. Mais ce n'est pas tant au niveau du sonore que le film trouve sa personnalité, plus au niveau visuel. Les images de promotion comme celle ci ou celle ci retranscrivent bien l'ambiance et les couleurs du film. Tout le film a cette esthétique très colorée et limite néonée qui lui est propre. Et comme lorsque l'on regarde Old Boy par exemple, l'identité visuele du film permet que l'on se souvienne du film, qu'il nous marque etc.. (c'est vrai pour le cinéma en général, mais dans le genre du thriller coréen, c'est une des seules solutions pour se démarquer).


Au final, même si le film souffre énormément de son scénario et de son côté thriller coréen, il essaye réellement de se démarquer. Mais nous sommes arrivés à un tel niveau de saturation pour les films du genre que ça ne suffira pas à en faire un bon film, voire incontournable. Mais il reste un film à voir puisqu'il a le mérite d'essayer de changer les choses. C'est pourquoi je lui mets un 7/10, soit la meilleure note possible pour un thriller coréen de base. Pour mettre un 8, un 9 ou même un 10 à un thriller coréen, il faudra vraiment qu'il apporte quelque chose de nouveau dans ce genre du cinéma coréen qui orthonormé.

Créée

le 9 juin 2015

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Yerp Ono

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