Cisco Pike
6.5
Cisco Pike

Film de Bill Norton (1971)

*Il y a des lapsus qui ne s'inventent pas.


Découvert grâce au documentaire de Sophie Huber sur Harry Dead Stanton (la typo est trop belle pour que je la corrige, merci Twombly) portant son nom et sous-titré "Partly Fiction", évoqué lors d'une séquence aux côtés de Kris Kristofferson dont c'est ici la première apparition au cinéma, "Cisco Pike" appartient à la catégorie des films moyens. Pas de faute éliminatoire, pas de coup d'éclat. L'appréciation dépend avant tout du rapport personnel qu'on entretient avec le contexte de production, l'époque ou la thématique, et le cadre des années 70 naissantes suffit amplement à titiller ma magnanimité.


Les premiers éléments narratifs pourraient faire penser à un "The French Connection" (sorti l'année précédente) du pauvre, avec la présence de Gene Hackman largement mise en avant dans le rôle d'un flic en charge du narcotrafic. Mais le personnage, en plus d'être corrompu jusqu'à l'os, est en lui-même extrêmement secondaire, moteur initial de l'action qui disparaîtra pendant l'essentiel du film pour finalement ressurgir dans une séquence finale assez peu inspirée. Certaines finitions font cruellement défaut. Le récit tourne essentiellement autour d'un autre personnage, celui de Kristofferson, un chanteur peinant à percer dans le milieu et emmêlé dans plusieurs trafics de drogues. Victime d'un chantage, il doit écouler un énorme stock d'herbe en un weekend. Évidemment, il signe lui-même la bande-son du film.


Extrait : https://www.youtube.com/watch?v=XdEkqmP-RDo


La trame purement narrative offre relativement peu d'intérêt, et même les principaux intéressés ne semblent guère y accorder beaucoup d'attention. Une drôle de distance flotte entre les acteurs et les personnages qu'ils sont censés interpréter. Ce qui, par contre, est vraiment attachant, c'est l'atmosphère qui règne, en prise directe avec l'esprit de la décennie. Le rapport à la drogue, à l'amour, au sexe, à l'indépendance : on est (très agréablement, à titre personnel) immergé dans une époque, de l'esthétique aux thématiques. Il y a Karen Black, personnage féminin typique de ces années, même si elle se fait voler la vedette par Viva, égérie d'Andy Warhol, dans la peau d'une droguée enceinte totalement à l'ouest, à la présence presque fantomatique. Il y a Doug Sahm dans un rôle proche de la réalité, en zikos d'une maison de disques country folk, comme un témoin hippie.


Mais il y a surtout Harry Dean Stanton qui déboule au milieu du film d'on ne sait trop où, directement dans la baignoire du couple protagoniste. Totalement à l'ouest, sous l'influence manifeste de restes d'héroïne et de speed, empreint de défaitisme, un peu comme si le Billy d'"Easy Rider" s'était échappé de son film. Le sel d'un tel film se concentre dans l'univers gravitant autour de Kristofferson, qui prend d'ailleurs la peine de construire un vrai personnage de cinéma, au-delà de son image de musicien cultivée depuis 1970. L'artificialité de la séquence finale ne saurait entièrement balayer cela.

Morrinson
6
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le 23 nov. 2017

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Morrinson

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