Pour les adeptes de la maison qui rend fou d'Astérix en Iran...

C’est en visionnant des bandes annonces sur le site Allociné que j’ai découvert il y a quelques semaines la sortie en salle de Chroniques de Téhéran. J’avais trouvé le concept du film original et intéressant. Les images proposaient une succession de scénettes en plan fixe mettant en lumière les aberrations de l’administration iranienne. J’étais intrigué de savoir si le dispositif conservait son efficacité supposée sur les quatre-vingts minutes du film. Une seule manière d’avoir la réponse : aller le voir en salle…


Réalisé par Ali Asgari et Alireza Khatami, le scénario propose neuf scènes d’une petite dizaine de minutes chacune. Elles sont toutes construites de la même manière. En plan fixe, une personne est filmée en train de discuter avec un membre de la société iranienne (policier, commerçante, employé municipal, directeur des ressources humaines…). À chaque fois, tout débute d’une situation initiale à l’apparence simple et anecdotique puis prend un tour complexe et désagréable pour des raisons souvent absurdes et pathétiques.


Le risque de ce type de construction narrative est l’attrait inégal ressenti pour l’intrigue d’une scène à l’autre. Cette difficulté est ici surmontée. J’ai en effet trouvé la qualité scénaristique des situations plutôt constante et l’ensemble cohérent et agréable. L’autre risque potentiel était de souffrir de la dimension répétitive. Sur ce plan-là, je dois bien avouer que malgré la courte durée du film j’ai ressenti un petit peu de lassitude sur la fin. L’effet de surprise disparait et l’aspect routinier prend parfois le dessus. Ce n’est pas bien grave mais juste un petit peu dommage.


Du fait de la mise en scène minimaliste, l’écriture des dialogues et le choix des acteurs sont fondamentaux pour obtenir un ensemble de qualité. La réussite est ici au rendez-vous. Les différents interprètes de ces vignettes du quotidien sont remarquables de justesse. Le réalisme qu’ils dégagent sublime des dialogues efficaces et crédibles. En tant que spectateur, je me suis rapidement passionné pour les enjeux de chaque scène qu’il s’agisse du choix du prénom d’un nouveau-né, de la perte d’un chien, d’un entretien d’embauche ou de l’essayage d’une tenue. Les dialoguistes et les directeurs de casting sont vraiment à féliciter !


Il est évident que cette succession de vignettes a une dimension politique. Le réalisateur propose une critique d’un régime en exposant les aberrations du quotidien subies par la population. Par réflexe, on sourit des échanges sans queue ni tête entre monsieur ou madame tout le monde et l’institution. Puis, on réalise que tout cela n’a rien d’une caricature. Il s’agit de la réalité. Émotionnellement, cela ne m’a pas laissé insensible. Il s’agit incontestablement d’un film prenant humainement.


Pour conclure, Chroniques de Téhéran est un film agréable et intéressant. Le manque de rythme que je pourrai lui reprocher est largement compensé par la richesse du propos, la qualité des dialogues et le talent des interprètes. Je vous conseille donc de découvrir cet opus assez original qui ne vous laissera pas indifférent.


Eric17
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Cinéma 2024 et Les meilleurs films de 2024

Créée

le 21 avr. 2024

Critique lue 3 fois

Eric17

Écrit par

Critique lue 3 fois

D'autres avis sur Chroniques de Téhéran

Chroniques de Téhéran
Procol-Harum
8

Acte de résistance

Certains films à petit budget décrivent une réalité locale qui, de manière progressive, s'étend et englobe la perspective plus large de l'universel. Chroniques de Téhéran d’Ali Asgari et Alireza...

le 10 avr. 2024

9 j'aime

Chroniques de Téhéran
JeanG55
8

Qu'il fait bon vivre en théocratie !

Voici un film très particulier de deux cinéastes iraniens Ali Azgari et Alireza Khatami vu aujourd'hui en salle.D'après ce que j'ai lu dans un article de Télérama, Alireza Khatami, cinéaste en exil...

le 29 mars 2024

7 j'aime

9

Chroniques de Téhéran
mymp
7

Tu n'as rien vu à Téhéran

À l’écran, une ville s’éveille. On entend les bruits et les agitations qui résonnent, les voix des gens et les oiseaux, les klaxons et les sirènes tandis que la lumière du jour se fait plus vive, et...

Par

le 15 mars 2024

6 j'aime

Du même critique

Astérix chez les Pictes - Astérix, tome 35
Eric17
5

Pour les adeptes de fin de traversée du désert...

Cette année marquera une date importante de la bande dessinée française. C’est en effet la première fois que les aventures des deux plus célèbres gaulois ne sont nés ni de la plume de René Goscinny...

le 11 nov. 2013

33 j'aime

11

Succession
Eric17
8

Pour les adeptes de dysfonctionnement familial...

Succession est une série que j’ai découverte à travers la lecture d’un article qui lui était consacré dans la revue Première. La critique qui en était faite était plutôt élogieuse. Les thématiques...

le 13 août 2018

23 j'aime

5

Django Unchained
Eric17
8

Critique de Django Unchained par Eric17

De manière incontestable, « Django unchained » est l’événement cinématographique de ce début d’année. Chaque nouvelle réalisation de Quentin Tarantino ne laisse pas indifférent l’univers du septième...

le 3 avr. 2013

23 j'aime

1