Choose or Die
4.2
Choose or Die

Film de Toby Meakins (2021)

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La malédiction d'une génération sur les nouvelles

Qu'il est bon de se réfugier dans le doux cocon réconfortant et parfois idéalisé à l'extrême des 80's pour fuir le marasme de notre époque actuelle ! L'industrie hollywoodienne l'a bien compris en ressuscitant à peu près tous les titres les plus célèbres de ces années glorieuses, même Netflix (où sort ce "Choose or Die") a bâti une grande partie de son image de marque sur "Stranger Things", devenu le parfait modèle de série surfant sur les bonnes vibes des 80's. Mais ce rapport excessif d'un public adulte à la nostalgie de ce qui s'apparente à l'innocence d'un monde révolu et la manière avide dont les studios l'exploitent ne corrompent-ils pas finalement cette "magie" d'autrefois tant recherchée tout en démontrant une incapacité à créer de nouveaux rêves pour les générations actuelles ?


Mine de rien, sous ses airs de banal film de "jeu vidéo qui tue", le film de Toby Meakins fait figure d'un ironique cheval de Troie dans la matrice netflixienne avec ce sous-texte bien plus élaboré qu'il n'y paraît.
Là où "Choose or Die" s'ouvre sur un père de famille au train de vie visiblement aisé et aficionado d'une culture 80's dont il se sert d'échappatoire à son triste quotidien, c'est pour mieux lui faire subir la terrible malédiction que représente cette passion par l'intermédiaire d'un ancien jeu vidéo, le bien nommé "Curser" s'inspirant des premières adaptations vidéoludiques du type "livre dont vous êtes le héros" avec un joueur confronté à une série de choix dans le but d'avancer au sein de son histoire.
Puis, quelques temps après, dans une Amérique dont la société nous est présentée (avec trop d'insistance) comme au bord du gouffre, le jeu maudit va prendre désormais pour cible Kayla, symbole d'une jeunesse abandonnée dans la déliquescence ambiante, à cause d'un ami se rêvant tout comme elle programmeur et passionné notamment par la technologie des années 80. Par l'idée plutôt sympathique de matérialiser les choix meurtriers du jeu dans la réalité, le film va prendre un malin plaisir à se servir des conséquences d'une tragédie qui a touché personnellement Kayla et sa mère pour confronter la première à des niveaux du jeu de plus en plus insurmontables...


En tant que simple slasher de jeu vidéo meurtrier avec ce mode opératoire ainsi établi, "Choose or Die" a tendance à s'enfermer dans un cheminement des plus prévisibles, les prochaines victimes des dilemmes imposés à Kayla apparaissent toutes désignées, le film optant pour le parti pris de se focaliser intimement sur le sort de son héroïne et de son entourage très restreint sans chercher à multiplier d'autres victimes extérieures (enfin à part une malheureuse en guise de test), le tout accompagné de l'inévitable enquête sur les origines du jeu dans le but de tenter d'enrayer sa malédiction. Heureusement, au-delà d'un budget que l'on sent restreint (sans doute pour ça d'ailleurs qu'il choisit de ne pas trop se disperser), le film parvient à miser sur d'amusantes trouvailles de mise en scène sur certaines de ses épreuves et de leurs incarnations violentes dans notre réalité où la suggestion n'empêche nullement la naissance d'une vraie tension s'appuyant sur les ressorts psychologiques de ses personnages (l'attaque de l'appartement pour ne citer qu'elle). De ce point de vue, sans une trop grande surenchère d'artifices, "Choose or Die" fait donc bien mieux que d'autres longs-métrages autour d'un jeu maudit ("Stay Alive" par exemple), aidé par des personnages solides de surcroît, mais reste tout de même assez conventionnel par le manque de surprise de son déroulement dont on croit en plus rapidement deviner sa destination.


Mais non ! "Choose or Die" va avoir le mérite de déjouer nos attentes sur son dernier acte qui a la bonne initiative de remettre sur le devant de la scène le message bien pensé de conflit générationnel sur lequel il s'est ouvert (et sur lequel nous-mêmes avons débuté cette critique). Le combat contre le boss final ne sera en effet pas celui auquel on aurait pu s'attendre et va vraiment retranscrire littéralement à l'image l'affrontement d'une jeune génération aux rêves volées par une autre qui cherche à se maintenir dans une bulle de réconfort décadente. Encore une fois, la qualité d'astuces de mise en scène pour traduire physiquement les tenants et aboutissants de ce combat sur les protagonistes par leur façon de prendre l'ascendant l'un sur l'autre se révélera extrêmement maligne et démontrera que "Choose or die" avait bien plus d'intelligence sous le capot à faire valoir au niveau de ses thématiques que bon nombre de films du genre bien plus insignifiants en ce domaine.
Ses derniers instants bien plus ordinaires (avec un énième épilogue en forme d'ouverture à une potentielle suite) et sa très courte durée nous rappelleront son carcan scénaristique de petit slasher fantastique qu'il n'a hélas pas su totalement transcender mais on en gardera malgré tout le souvenir d'un agréable "parasite" au message fort dans le catalogue de Netflix.
Mineur mais loin d'être bête si on lui donne le degré de lecture qu'il convient.

RedArrow
6
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le 15 avr. 2022

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RedArrow

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