PRENDS GARDE A TOI pauvre spectateur...

Une femme danse un flamenco douloureux sur une planche au milieu du désert mexicain. ça fait tacatac.

Des types mal intentionnés se pointent, demandent à la dame : "où est-elle ?" et tuent la dame. Le "elle" du où est-elle, c'est Carmen qu'ils n'ont pas réussi à trouver, on se demande comment ils ont fait... On ne saura pourquoi ils cherchent Carmen, pourquoi ils tuent sa mère. Mais Carmen prend son baluchon et part pour tenter de passer la frontière direction Los Angeles la cité des rêves et des anges réunis sans oublier de se tartiner la tête avec le sang de sa mère.

Aidan, ex marine post traumatisé d'Afghanistan aide ponctuellement les milices à la frontière à empêcher les clandestins d'entrer sur le sol sacré étasunien. Et se ravise. Et tue un des psychopathes qui piste l'envahisseur mexicain. Aidan et Carmen s'échappent ensemble, volent une voiture non surveillée par l'United States Border Patrol (USBP in french «Patrouille frontalière des Etats-Unis») avec une facilité déconcertante et, scène suivante tombent dans les bras l'un de l'autre. C'était écrit, ils sont beaux et ils sont en cavale poursuivis par des flics qui s'appuient sur leur voiture et réfléchissent (enfin, je suppose qu'ils réfléchissent).

Carmen et Aidan se réfugient chez Masilda (Rossy de Palma) la tante de Carmen qui tient un club paillettes et carmin la Sombra Poderosa. Et justement, Carmen est danseuse, comme maman, comme tata et rien de mieux pour soigner un deuil que danser en pleurant.

Pour comprendre comment ce salmigondis confus et prétentieux revisite le mythe de Carmen, il faut être dans la tête de Benjamin Millepied. Mais Bizet et Mérimée doivent se retourner dans leur tombe ou s'en foutre bel et bien car en dehors du titre du film et du prénom de la demoiselle : aucun rapport. Ici aucune jalousie meurtrière pas plus que d'amour non partagé. Les deux tourtereaux fricotent ensemble.

Mais où le réalisateur néophyte, qui devrait retourner à ses entrechats dare dare, a-t-il bien voulu en venir ? Le mystère reste total. Aux jolies images initiales et prometteuses du désert succèdent celles d'un road movie vite statique et poussiéreux où les pauvres acteurs s'agitent comme des pantins laissés à l'abandon par un scénario abscons, sans queue ni tête aux dialogues misérables. Le tout entrecoupé de scènes dansées tellement approximatives qu'on a du mal à croire que le réalisateur est ou a été danseur, étoile et chorégraphe. Elles sont par ailleurs parachutées sans la moindre logique et ne parviennent pas à donner le moindre sens au reste. Mal filmées et sans inspiration elles ne sont même ce qui aurait pu être un des atouts du film. Quant à la musique pseudo religieuse, elle est tellement envahissante et patapoufesque, qu'elle écrase encore davantage le film et le rend aussi inaudible qu'irregardable.

Bancal et mal fagoté le film abandonne le spectateur à un ennui profond voire à une certaine colère. Il faut vraiment avoir "la carte" ou être ami avec la famille Rassam pour obtenir le financement d'un projet aussi vide et ampoulé.

Rossy de Palma s'éclate comme une fofolle et ne ferait bien qu'une bouchée de Paul Mescal mais je l'ai vu avant. Ceux qui auront le courage de s'aventurer apprécieront la grande subtilité des remarques lorsqu'il paraît... (smiley qui se tape le front). Le pauvre se demande ce qu'il fait là. On lui met une guitare entre les mains et il chante, pas mal du tout. On le met torse nu pour admirer que oui... bon, tout est parfait et parfaitement à la bonne place. Il risque aussi un pas de deux avec Carmen. On ne lui en veut pas. Ce film sera l'erreur d'un début de carrière très prometteuse (Aftersun, la merveilleuse série Normal people en attendant Gladiator 2). Melissa Barrera, absolument inconnue, est mimi. So what ?

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le 26 juin 2023

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