C’était l’une des grosses attentes de cette année pour les jeunes français et une grosse crainte pour les cinéphiles, Brice 3 est, selon toute logique, le film français qui devrait faire la course en tête au box-office 2016 aux côtés des Tuche d’Olivier Barroux et de Camping 3 de Fabien Onteniente. Ajoutez à cette attente une promotion rondement menée avec une communication marketing comme on en voit rarement : simulation d’une fuite du film sur Youtube en guise de critique du téléchargement illégal, Jean Dujardin en featuring avec Big Flo et Oli sur le titre Pour un pote et les multiples produits dérivés, partenariats, émissions qui virevoltent autour de la sortie du long-métrage de James Huth. Brice 3 est donc un de ces films qui me servent d’argument afin d'étayer mon propos selon lequel les productions françaises, plus particulièrement les comédies françaises, sont désormais presque exclusivement concentrées sur le travail de marchandising qui précède la sortie en salles d’une œuvre. Le but étant de vendre un film, peu importe sa qualité.


En lui-même, Brice 3 est mauvais avec une mécanique de la vanne qui s’enraye en jouant avec ses anciens rouages qui ont fait son succès. Attention, ceux qui avaient apprécié Brice de Nice en 2005, apprécieront (quoique) la suite plus absurde avec un Dujardin on ne peut plus m’enfoutiste et des blagues encore plus bêtes… Tous les anciens personnages sont repris ici avec les mêmes traits caractériels, les mêmes mimiques et donc les mêmes procédés comiques qui lassent. Ajoutons peut-être que le personnage principal gagne en autodérision par moments dans ce deuxième volet de la saga (oui parce qu'en fait c'est Brice 3 parce que le deux il l’a cassé… avant même la publication de la première bande annonce on sentait déjà la lourdeur s’approcher). Sinon à part cette subtilité négligeable, le héros est toujours aussi stupide avec ses références cinématographiques de beauf et le scénario est tellement maigre qu’il n’avait même pas le contenu pour charpenter la réalisation d’un court métrage. N’étant pas la cible de cette mauvaise suite, je ne m’y suis pas attaché et je n'ai pas non plus cherché à la défendre. En revanche, le pré-ado ayant surfé sur la vague d’immaturité de 2005 et ayant adhéré à toutes les vannes d’écervelés de l’époque pourra vous dire que le film est subtil car absurde et dénué de sens, en omettant bien sûr de vous dire que le rythme décousu du film ne sert en rien le vide intersidéral du scénario.


S’agissant d’absurde et de comique de situation j’ai toujours été un bon client, appréciant Ionesco depuis la lecture forcée de Rhinocéros en cours de français. Je suis même allé jusqu’à apprécier La tour 2 contrôle infernale d’Eric Judor, qui malgré la débilité des personnages s’est complétement enfoncé dans un procédé irrationnel plaisant avec des faits dépassant l’entendement. Ce même Eric Judor qui a joué dans Steack de Quentin Dupieux, référence récente du non-sens au cinéma, a su me convaincre par son illogisme, délaissant toute pratique solennelle afin d’éviter ce que James Huth fait dans son film, la morale. Le réalisateur essaye de nous synthétiser l’incompatibilité qu’il existe entre l’égocentrisme et l’humour. Ce passage tout aussi auto dérisoire que le tournant que prend le personnage de Brice s’avère navrant et incongru, laissant son spectateur à la ramasse se demandant où est passé son héros du début de film. Et puis, c’est dans l’air du temps, les 50% des aspects comiques de Brice 3 puisent leur source dans le cliché et les stéréotypes à l’instar des dernières super productions françaises…


Bon bien entendu, quelques petits sourires et esclaffements restent inévitables comme lors du duel entre Alban Lenoir et Jean Dujardin quand ce dernier brise le quatrième mur pour s’adresser à son spectateur et s’affranchir d’une situation cocasse. Ce n’est pas faute de l’avouer et puis le reste est tellement raté qu’on s’en veut presque d’avoir ri à un moment. Brice 3 c’est l’histoire d’un mec qui casse tout et tout le monde, même le rythme de son film. C’est l’histoire d’un mec dont les sottises ne nous font pas ou plus rire, c’est l’histoire d’un drôle d’acteur oscarisé qui malgré les opportunités de l’étranger continue de s’adonner à des rôles de boulets dans des comédies françaises. C’est l’histoire d’un mec qui un jour va tourner avec Martin Scorsese et l’autre jour va jouer et réaliser Les infidèles… C’est tout autant de contradictions qui hantent aujourd’hui la carrière d’un des acteurs français les plus populaires au monde. Pas de doute le roi de la glisse c’est bien lui, continuera-t-il longtemps ses zigzags entre cinéma d’auteur et mauvaises comédies grand public ? Apparemment, il en faut pour tout le monde…

baptistevanbalbergh
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le 24 oct. 2016

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The Passenger

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