Boro in the Box
7.7
Boro in the Box

Court-métrage de Bertrand Mandico (2011)

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« Je suis un réalisateur mort et polonais. »

Ce moyen-métrage s'est imposé comme la foudre dans l'eau calme de mes soirées dominées par l'attente - et, en vérité, quelle exaltation! Ah, si mon pouce n'avait achoppé sur le bouton central de ma télécommande, hasard curieux m'ayant ouvert les portes d'une vigoureuse recherche formelle à montrer aux yeux divergents de la multitude, ma lacunaire culture cinématographique m'eût promptement prohibé la vie de Walerian Borowczyk relatée en abécédaire. Bien entendu, j'avais entendu résonner de-ci de-là le nom très beau de Mandico ; néanmoins, curieusement, chacun des divers extraits que l'on en présentait ne me procuraient qu'une curiosité lasse, réticente à se laisser palper ; peu à peu, donc, j'en arrivai à oublier ce cinéaste gardé en suspens, ce au grand dam de ma médiocre ouverture d'esprit.
Tyché remédia à cette omission.
Dans la scène première, l'étrangeté se meut au-devant, caractérisée par ce bonhomme terreux étendu en travers du chemin pour mirer subrepticement la culotte des jouvencelles ; il s'agira de la genèse de notre histoire, celle, en effet, d'un pornographe de l’œil. À la suite du mariage hâtif entre l'homme de la route et l'une de ces jeunes filles, Borowczyk naît enceint d'un corps cubique : une boîte léguée à la rivière parmi le fracas des remous. (Je demeure vague, il faut bien conserver quelque mystère...) L'enfant croîtra dès lors jusqu'à la vie, puis vivra jusqu'à la mort. Une série de vignettes existentielles concernant cette errance de l'art au moyen de l'essence du mot, plutôt godardienne avec son utilisation de panneaux narratifs.
Assuré par une mise en scène échevelée et un montage tout en feintes techniques, Boro in the Box rappelle Jodorowsky de par sa fascination bienvenue pour les oiseaux, et beaucoup aussi Lynch pour son atmosphère tant érotique qu'équivoque. La tristesse s'écoule de regards séquentiels que l'expérimentation éparpille tantôt sur un drap, tantôt sur une toile ; une frénésie lubrique est alimentée par le mouvement des individualités entrechoquées. Ajoutons à ce constat que le jeu ténu d'Elina Löwensohn, voix-off, sied à merveille à son rôle de mère défroquée.
Une surprise fantasque, à l'image - je crois - des autres réalisations de Mandico.

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le 21 avr. 2021

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C'est comme si David Lynch racontait l'histoire de Walerian Borowczyk dans l'univers de Béla Tarr

Autrement dit, c'est fascinant. Bertrand Mandico passionné... Bertrand Mandico poète... Bertrand Mandico esthète du dégoût et du nihilisme cru... Bertrand Mandico l'innovateur... Bertrand Mandico...

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