Un huis-clos étouffant, mené à la baguette par un binôme de réalisateurs qui ont vécu la situation plusieurs fois (le film sent le vécu à plein nez, et marque d'autant plus), et campé viscéralement par le quatuor d'acteurs très investis. D'un côté de la table, deux époux qui s'aiment et veulent s'installer gentiment aux États-Unis pour travailler, de l'autre, deux flics qui démontent une à une les informations renseignées dans leur biographie, à la recherche d'un mariage blanc pour une carte verte (un mélange de couleurs qui ne leur plaît pas)... Quels secrets se cachent dans ces pages, qui essaie d'édulcorer une réalité, qui dramatise les faits, qui invente des histoires ? Border Line nous fait toujours goûter au stress et à la détresse de ses personnages (on commence à râler quand l'épouse ne peut pas avoir son verre d'eau, ou que les flics font des histoires pour son hypoglycémie...), coupés du monde, dans un lieu labyrinthique (on les change d'emplacements sans arrêts, on ne comprend rien à la géographie, on est comme eux, des souris dans un laboratoire, et on panique avec eux), mais on ne perd jamais de vue que les inspecteurs n'ont peut-être pas tort, ont peut-être des infos qu'il nous manque sur le passé d'un des mariés, et on cogite à cent à l'heure à chaque révélation pour essayer de trouver la solution. Eh bien, on est bien contents d'avoir vu le film dans une avant-première pleine à craquer, car on s'est senti bien bête face au twist de dernière seconde, et l'hilarité générale ultra-bruyante de la salle de nous rassurer : on s'est tous faits avoir. Une écriture qu'on aimerait vraiment voir plus souvent, pour un film plus que prenant. Pour l'anecdote : si vous ne comprenez pas pourquoi le bulletin radio du début se concentre sur le Mur entre les États-Unis et le Mexique érigé par Trump, il s'agit d'une pique des réalisateurs, tendant à souligner le racisme prégnant aux USA, puisque l'info est qu'il y a trop de dons de particuliers pour monter le mur, les américains donnent trop d'argent pour se couper des autres (alors que les dons aux assos sont en pleine chute libre...). Rappelez Michael Moore, il y a un sujet à faire. Prenez votre passeport, et allez vous asseoir, l'inspecteur arrive pour 1h14 d'interrogatoire dont vous ne ressortirez pas indemne.

Aude_L
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le 6 avr. 2024

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