Des fois je me demande pourquoi je me complique la vie. C'est vrai, comment voulez-vous que j'écrive quelque chose d'original sur Blade Runner. Il existe déjà de nombreux essais, d'analyses super recherchées, des tonnes de vidéos et d'articles publiés. Je n'ai pas grand chose à ajouter, en fait je dirais même que je n'ai rien à ajouter.
Je ne vais pas non plus m'étendre sur le niveau d'adaptation de l'histoire de Philip K. Dick, n'ayant pas lu « Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? ».
Et je ne vais non plus parler des différentes versions du films, cinéma, Director's Cut, Final Cut, Workprint. Ah on s'en fout ! Pour simplifier les choses, si vous ne l'avez pas vu, évitez la version cinéma et sa voix off maladroite (décision prise par le studio et on voit bien qu'Harrison Ford n'a pas envie de bosser). La version Final Cut étant celle privilégiée par son réalisateur, qui corrige certaines erreurs (sans faire une George Lucas) et qui à mon avis est la meilleure.


Je vais dire quelque chose de méga cliché mais c'est tout de même la vérité. Il y a des films comme ça, dès le premier visionnage, qui changent une vie. C'est un amour inconditionnel qui se créé dès les premières minutes, le premier plan. Je me souviens de Novembre 2019 comme si c'était hier, non je n'ai pas découvert le film à cette époque...il se déroule à cette date. Les flammes, le paysage urbain, cet œil. Une merveille visuelle je vous dis !
Ce n'est pas uniquement cette introduction, le film est absolument magnifique de bout en bout. Les effets spéciaux n'ont pas pris une ride, ou presque, une énième preuve que les images de synthèses c'est bien mais on peut offrir une vision réaliste et crédible au spectateur sans pour autant aller dans la surenchère. C'est un problème trop récurrent dans beaucoup de films modernes, il faut savoir doser et utiliser correctement la technologie qui est à notre portée. Souvent le mélange des deux, les effets générés informatiques et ceux en dur, font qu'un film ne sera pas daté aussi rapidement (Jurassic Park, Mad Max Fury Road ou les derniers Star Wars en date me viennent immédiatement en tête).
Je m'éloigne un peu du sujet...
J'ai juste envie de me noyer et qu'on m'abandonne dans cet univers.
Ces buildings immenses dont la hauteur ne semble jamais en finir. Cette nuit qui semble durer des jours durant, d'ailleurs je ne sais toujours pas si c'est stylistique ou si c'est lié aux catastrophes climatiques annoncées au début du film. Réellement peu importe, j'aime la nuit. Et je vous ai parlé de la pluie ? Je pourrais passer des heures, juste à parler de ça. C'est peut-être le pire endroit pour vivre mais peu importe, c'est chez moi ! Il y a une certaine beauté dans ce monde délabré.


Mais ce n'est pas la seule chose qui est de toute beauté !


Il y a aussi et surtout Vangelis. J'ai généralement un peu de difficulté avec son style, j'ai rien contre les synthés j'adore John Carpenter. Mais des fois c'est trop, trop entendu surtout (je pense à toi les chariots de feu). Ici c'est tout le contraire, ça colle parfaitement à l'ambiance véhiculée. A la fois étranger, ce sentiment de solitude, ce côté synthétique, ce Jazz futuriste...nous sommes bien dans un film noir, dans un futur plus ou moins proche (même si du coup maintenant c'est le passé). Mention particulière pour l'extrait « Tales of the Future » qui pope à plusieurs moments du film, avec la merveilleuse voix de Demis Roussos qui chante en Arabe. Cela renforce une fois de plus ce sentiment d'être dans un monde alien qui n'est pas tout à fait le notre, tout en étant quand même le notre. Et puis c'est cool d'avoir une réunion impromptue des Aphrodite's Child (allez donc écouter l'album 666 au passage).


Plus tôt je parlais de 2019, j'attends encore de voir les gens s'habiller comme Roy Batty, cette classe absolue. C'est d'ailleurs la meilleure façon de décrire Rutger Hauer, il était l'un de ces acteurs à toujours être au top peu importe la qualité du film. Un atout trop rare mais qui permet de suite de savoir si un acteur est réellement bon ou non.
Loin de moins de dire du mal du reste du casting.
Je pense que tout le monde est d'accord pour dire du bien de la prestance d'Edward James Olmos. Qui prend tout la place alors qu'il n’apparaît que dans peu de scènes et parle quasi constamment dans une langue qui n'existe pas (on parle de cityspeak, mélangeant Japonais, Espagnol, Allemand, Hongrois, Français et Chinois).
J'ai un peu de mal avec Sean Young des fois, mais comme dans le Dune de Lynch, bah non là je peux pas la détester. Ce mélange étrange entre innocence et femme fatale est assez troublant. Mais par contre c'est quoi cette touffe de cheveux !
Daryl Hannah y est à la fois à son plus sexy et son plus terrifiant, combien de mecs et de femmes voudraient mourir étouffés entre ses cuisses comme dans la scène de baston entre elle et Harrison Ford.
En parlant de lui justement, avec le personnage de Rick Deckard, il arrive à trouver le bon ton pour le style du film. On le voit rarement exprimer ses émotions ou ses sentiments, il est limite plus robotiques que les replicants (pourtant eux synthétiques).


Je pense que tout le monde a capté que c'était l'un des messages principaux du film. L'humanité et qui le plus humain dans cette histoire. Il s'agit du slogan de la Tyrell Corporation : « Plus humain que l'humain », c'est aussi une super chanson de White Zombie.
On arrête pas de parler du manque d'empathie de la part des réplicants, mais tout du long ce n'est qu'une quête au prolongement de la vie. Certes la bande de Roy n'hésite pas à tuer pour arriver à leur fin. Mais ce but est finalement assez compréhensible, qui voudrait avoir une espérance de vie aussi courte, qui aimerait être un esclave de la société ? On voit Roy exprimer sa tristesse envers Pris, de même pour Rachael (qui est un nouveau modèle mais tout de même). Ils ne devraient pas non plus être sensibles à la vie animale mais Zhora semble apprécier son serpent.
De l'autre côté, comme je disais plus haut, Deckard semble beaucoup plus monolithique et de ce fait moins humain que les réplicants. D'où l'éternel débat sur sa réelle identité ou non, selon Ridley Scott il est un réplicant, selon Harrison Ford non, selon le second film...bah je sais pas trop ça reste ambiguë et je pense que nous n'avons pas besoin d'une réponse définitive.


Et puis il y a aussi cette scène, le monologue que tout le monde adore. J'entends déjà certaines personnes le réciter comme une poésie apprise par cœur. Attention c'est un spoiler majeur sur l'une des scènes finales du film, je vous préviens !
Mais c'est tout de même l'un des meilleurs passages de l'histoire du cinéma. L'un des moments les plus poétiques de tout le fait, celui qui nous fait encore plus douter sur l'humanité...je cite :



« J’ai vu tant de choses que vous, humains, ne pourriez pas croire. De
grands navires en feu surgissant de l’épaule d’Orion. J’ai vu des
rayons fabuleux, des rayons C, briller dans l’ombre de la porte de
Tannhäuser. Tous ces moments se perdront dans l'oubli...comme...les
larmes...dans la pluie. Il est temps de mourir. »



C'est marrant, j'avais pas grand chose à dire mais au final j'ai quand même réussi à écrire un pavé.
Alors oui j'avoue que je n'ai pas inventé la roue, j'ai rien apporté de neuf à l'édifice mais il fallait que je parle de ce film qui est tellement cher à mon cœur. Je l'ai peut-être vu une dizaine de fois, ce qui est peu à comparer de certains de mes autres films préférés. Mais aucun d'entre eux ne m'a touché comme celui-ci. Je pense qu'avec Taxi Driver, peut-être le premier Parrain et sûrement Lost Highway, cela fait partie des films qui m'ont donner envie de plonger dans le cinéma, qui ont établi mon amour inconditionnel pour cet art.
Parce qu'au final, même si Blade Runner suinte la mélancolie et la solitude, c'est un film qui me pousse dans mes retranchements émotionnels et me rend heureux.

Hairy_Cornflake
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le 6 janv. 2022

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Hairy_Cornflake

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