Disons que ça casse pas trois pattes à un Hawkman.

Petite remise en contexte :

Retour en arrière de pas moins d'une quinzaine d'années. La New Line Cinema planche sur le projet d'adapter le fameux super-héros de comics Captain Marvel (aujourd'hui renommé Shazam pour des raisons de concurrences évidentes). Dès les prémices du projet, le catcheur nouvellement reconverti en acteur Dwayne Johnson est mentionné jusqu'à être carrément contacté. Sauf que l'homme aux biceps aussi larges que mes cuisses éprouve davantage d'intérêt à obtenir le rôle de Black Adam, le rival / ennemi / anti-héros opposé à Shazam. Puis, plus de nouvelles, c'est le silence radio complet et ce, jusqu'à 2017. C'est cette année que le projet est remis sur les rails à la demande de Dwayne Johnson. Rails d'autant plus sûrs après les succès (principalement commerciaux plus que critiques) des derniers films du DCU, encourageant la production à tout miser sur cet antihéros interprété par l'homme devenu la nouvelle figure de proue des gros blockbusters bourrins des années 2010, ce même genre qui avait fini par s'essouffler à la fin des années 90.


Tell them the man in black sent you.

Le Kahndaq, nation fictive seule détentrice d'un minerai unique au monde et source d'énergie et sans limites qui n'est pas sans rappeler le vibranium du Wakanda, se voit être réprimée par un groupe de mercenaires nommé Intergang présent pour exploiter les ressources riches qu'offrent ces terres sans défenses. Après plusieurs années sans rien faire, voilà que le destin décide d'enfin les aider en leur envoyant une aide providentielle : Teth-Adam, ancien héros mythique qui avait disparu depuis des millénaires et qui aurait autrefois libéré le Kahndaq. Mais en plus de 5000 ans, le monde change, et les héros de la Justice Society ne voient pas vraiment l'arrivée de cet anti-héros aux méthodes archaïques d'un très bon œil, surtout que dans l'ombre, un ancien ennemi semble comploter pour obtenir sa vengeance...

Un film Marvel à la sauce DC... Ou l'inverse, je ne sais plus...

Au cours des quatorze dernières années, un nouveau genre de film a vu le jour, prenant au fur et à mesure une forme plus précise : le film de super-héros Marvel. Ce dernier se distingue par quelques éléments bien distincts mais deux ressortent principalement aujourd'hui : des combats aux effets visuels époustouflants et un humour plus ou moins bien géré, le plus souvent inclus sans qu'il ne soit réellement nécessaire dans des scènes qui auraient bien besoin de tension dramatique ou simplement se reposer des dix-neuf autres blagues de la scène précédente.

L'Univers Cinématographique DC avait décidé avec ses débuts sous la tutelle de Zack Snyder de s'en éloigner, comme l'excellent Man Of Steel, avec un ton bien plus sérieux, sombre, tendant parfois dans le mélodramatique. Et honnêtement, cette formule me plaisait on ne peut plus.


Mais voilà quelques temps que le DCEU semble vouloir faire un virage en termes d'idée, principalement en voyant que Marvel se faisait un pognon monstrueux avec une réponse critique jamais en dessous de la moyenne, avec des résultats que l'on connait dès qu'il tente de suivre le moule Marvel : un désastreux Suicide Squad cherchant à faire comme les Gardiens de la Galaxie sans en comprendre les qualités et les transformant en défauts, un Shazam tout juste passable, son humour devenant parfois trop envahissant, et un piètre essai de faire son Avengers avec Justice League, sans jamais avoir eu l'idée d'introduire tous les personnages de ladite équipe avant d'en faire un film donnant une intrigue rushée...


Pour Black Adam, l'enseignement semble enfin avoir été compris : c'est le film DC le plus Marvel qui soit mais il n'est pas mauvais contrairement à ses prédécesseurs qui s'y sont essayés... Bien au contraire même. Alors évidemment, le film n'est pas un chef d'œuvre et ne révolutionne pas le genre, mais ça tombe bien : ce n'est pas ce qu'on en attend car il ne l'a jamais promis.

Simplement, le film ne semble pas pleinement assumer son côté Marvel, retournant à ses racines DC en mettant des bon ralentis façon Zack Snyder, puis hop, petite blague Marvel, puis flashback à l'image sombre façon DC, puis dialogue sans aucun sérieux Marvel, puis... Je crois que vous voyez où je souhaite en venir.

Le personnage de comic relief d'Atom Smasher est l'incarnation même de la Marvelisation du film, n'étant là que pour faire rire sans jamais apporter la moindre pierre à l'édifice de l'intrigue. Néanmoins, aussi inutiles soient ses interactions pour l'avancée du scénario, il serait mentir de dire qu'il ne m'a pas diverti, ses interventions arrivant à parfois me faire souffler du nez, même si parfois, il lui arrive de se montrer envahissant dans un film qui souffre déjà d'un humour très présent pour un film DC. Il n'est pas non plus sans rappeler le personnage de Flash dans le film Justice League de 2017, dans le rôle de bouffon qui semble limité intellectuellement.

Un scénario des plus basiques.

Le film ne s'est jamais vanté d'être révolutionnaire, et cela s'applique aussi à son histoire. Pas de petites sous-histoires inutiles qui finissent sans résolutions, pas de scénario super élaboré avec des idées dignes de Christopher Nolan : le fil directeur est visible, linéaire, au point de facilement anticiper ce qui va se passer. Il n'y a aucune prise de risque, c'est sûr, mais au moins le film ne se montre pas trop gourmand et présente un déroulement logique, que l'on suivra sans problèmes. Le tout est orné d'un rythme efficace, et sait quand il doit agrémenter d'une scène de combat lorsque les personnages ne font que discuter depuis plusieurs minutes sans aucune action et sait quand il doit ralentir après une montée en termes de tension.

Quitte à être fade en bouche, autant être joli à regarder et écouter.

L'un des points où brille le plus le film est probablement dans son esthétisme. Outre le filtre jaune inhérent au cinéma américain dès que l'action se déroule dans un pays arabique avec un tant soit peu de désert, les couleurs et la lumière sont toutes deux l'un des points forts du film. Et cela se comprend lorsque l'on sait qu'il s'agit du même directeur de la photographie que l'excellent Joker de 2019, film qui m'avait particulièrement marqué par son esthétisme global.

La scène la plus marquante - ou du moins, qui m'a le plus marqué - et où la lumière est particulièrement bien utilisée, est celle où Black Adam se réveille de sa prison, libéré par le personnage de Sarah Shahi, ses nombreux éclairs éclairant la grotte sombre où la seule lumière naturelle est celle du soleil qui s'incruste comme elle peut au travers des failles du plafond.


Mais la lumière et les couleurs ne sont pas les seules qualités visuelles du film. En effet, la direction artistique gérée par Beat Frutiger - qui a déjà travaillé sur les deux derniers Avengers mais aussi quelques autres Marvel - n'est pas en reste, en particulier pour ce qui est des costumes, ces derniers étant tous sans exception magnifiques.

J'ai ici en tête celui d'Hawkman, moi qui m'inquiétais à l'idée de le voir adapté à l'écran, je fus agréablement surpris par le rendu visuel qu'il dégageait finalement, en particulier pour ce qui est de ses ailes. Alors certes, aussi joli soit-il, il est aussi d'une stupidité sans pareille pour ce qui est du pratique mais c'est aussi le cas dans les comics alors c'est un reproche que je ne peux lui faire. Celui du Doctor Fate est lui aussi fantastique, son casque et ses reflets servant de transition dans l'acte final est aussi l'une des rares idées un tant soit peu innovante pour ce qui est de la mise en scène alors je tiens à le souligner.


Les effets spéciaux sont loin d'être catastrophiques, si ce n'est même plutôt agréables à regarder, en particulier les effets des pouvoirs de la jeune Cyclone, le tout sublimé par les magnifiques couleurs de son costume qui semblent se mélanger avec ses pouvoirs lors de leur utilisation ou bien des crises de colère électrifiées du personnage éponyme de l'œuvre. La représentation des pouvoirs du Doctor Fate est elle aussi intéressante même si elle n'est pas sans rappeler celle de Mysterio de Spider-Man : Far From Home ou tout simplement de Doctor Strange dans le film du même nom. La représentation des pouvoirs de Black Adam est elle aussi plutôt bonne, en particulier dans une scène faisant étalage de sa puissance.

Je fais ici référence à la scène au ralenti sur fond de Paint It Black des Rolling Stones, qui souffrira sans le moindre doute de la comparaison avec les scènes au ralenti de Vif Argent dans les films X-Men : Le Commencement ou X-Men Apocalypse, ces dernières étant bien plus intéressantes, exploitant pleinement le potentiel du personnage et s'inscrivant dans la diégèse de l'œuvre - car le personnage écoute lui-même son Walkman, la musique se lance, pas parce que la chanson est cool et elle aussi fait référence au "Black" de Black Adam... - , contrairement à l'utilisation ici présente.

Enfin, Lorne Balfe signe ici une bande originale des plus réussies, avec un thème facilement reconnaissable aux instants épiques et graves et aux moments plus calmes et intimistes, symbole de ce protagoniste tiraillé entre l'héroïsme et sa part d'ombre, comme tout bon anti-héros. Mention honorable à la chanson originale de fin de générique, interprétée par Eric Zayne qui va s'empresser de rejoindre mes playlists Spotify.

Conclusion

Malgré un premier rôle se contentant de simplement froncer les sourcils pendant près de 2h pour témoigner de la complexité de son personnage et un second rôle se contentant du costume de bouffon - ainsi que d'un gamin insupportable que je préfère éviter d'aborder -, l'ensemble des acteurs se débrouille plutôt bien, en particulier Pierce Brosnan en Doctor Fate qui crève l'écran les rares fois où il y apparaît même si cela ne surprendra vraisemblablement personne.


De plus, le film saura faire esquisser bon nombre de sourires avec sa scène post-crédit pour le moins inattendue mais on ne peut plus agréable.


Pour conclure, Black Adam n'est pas un film brillant de par son originalité, aussi bien scénaristique que dans ce qu'il propose de manière générale, mais qui remplit son rôle de divertissement et qui permet d'un peu oublier les derniers films Marvel sortis en salle et de se dire que tout de même "Rien ne pourra être pire que Suicide Squad" avec une musique et une image aux petits oignons.

Koupin
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le 5 déc. 2022

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