Un diamant de comédie, intelligente et fine, hors des sentiers battus avec une Cate Blanchett impéri

Par où commencer ? Les qualificatifs semblent manquer pour définir ce joyau brut qu’est cette comédie qu’on pourrait catégoriser à la fois d’intello et psychologique mais qui sait être en même temps accessible et universelle. Richard Linklater, dont le talent semble se bonifier avec les années et au fil des œuvres, signe un film inqualifiable, à la fois simple et complexe, mais définitivement inoubliable qui regorge d’idées de mise en scènes et narratives. Et il se dote d’un atout de poids en la personne de Cate Blanchett qui ajoute un rôle majeur de plus à une filmographie déjà bien fournie dans le genre. Ce long-métrage est un véritable coup de cœur et il semble destiné à une belle carrière dans la course aux récompenses l’année prochaine. Et, si le public développe un temps soit peu de curiosité hors du formatage industriel d’Hollywood, il pourrait également toucher le cœur du public et briller au box-office.


« Bernadette a disparu » est un mille feuilles de cinéma très riche, que ce soit en thématique abordées ou en surprises quant à son déroulement totalement imprévisible. Un mille feuilles dont on découvre chaque nouvelle couche avec un appétit dévorant et les yeux écarquillés de bonheur, le sourire vissé aux lèvres. Du cinéma pur et d’une finesse inouïe qui parle de la vie, de l’humain et de tout ce que l’existence recèle de joies, de tristesse et de contradictions. Linklater a adapté le roman de Maria Sample avec une ferveur d’orfèvre et a taillé un diamant de personnage. On se souviendra longtemps de Bernadette, de cette femme un peu misanthrope, un peu asociale et très singulière mais d’une richesse humaine qui nous met face à nos propres destins. Le film commence comme une banale comédie bobo (et il est vrai que le contexte bourgeois peut sembler au début un frein à l’identification) mais devient au fil des minutes une passionnante parabole sur ce qu’on peut faire de nos vies, sur le but de l’existence. La créativité comme moteur de vie est au centre de cette œuvre qui se révèle doucement mais surement au fil d’une narration habile et maligne. Dans l’ingéniosité d’une séquence où un montage alterné nous présente Bernadette de son point de vue à elle et de celui de son mari ou par le biais d’une vidéo You Tube, sorte de biographie du personnage. Ou encore lors de ses discussions très drôles avec son assistante virtuelle.


Et dans ce rôle difficile, l’actrice caméléon se glisse de nouveau avec un génie d’équilibriste pour nous livrer une performance digne de toutes les louanges. Dans chacun de ses gestes, chacune de ses expressions faciales et grâce à d’excellents dialogues écrits pour l’occasion, elle nous bluffe. Le sous-estimé Billy Crudup n’est pas en reste pour lui donner la réplique, en retrait mais bien à sa place. Et second couteau non négligeable ici, Kristen Wiig fait des merveilles avec un personnage à priori caricatural que le script et son incarnation rendent profondément vrai. Car tout sonne juste et c’est d’une intelligence incroyable sous des dehors qui pourraient passer pour prétentieux et auteuristes. La psychologie sonne vrai et n’est jamais pesante quand l’humour se fait discret mais fait mouche à chaque fois grâce à pléthore de situations excentriques (dont certaines amenées à devenir culte). Et le final en Antarctique donne un côté exotique mais jamais vain, qui montre l’importance de fuir pour se retrouver. Car là est tout le sens d’un film aux multiples niveaux de lectures et qui pourra toucher beaucoup de monde par bien des aspects. L’apothéose et la cerise sur le gâteau pour un final émouvant comme jamais qui finit de nous convaincre qu’on vient de visionner l’un des plus beaux et surtout l’un des plus intelligents films de l’année, peut-être le meilleur même. Bernadette on n’est pas là de t’oublier !


Plus de critiques cinéma sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.

JorikVesperhaven
9

Créée

le 16 août 2019

Critique lue 1.7K fois

9 j'aime

3 commentaires

Rémy Fiers

Écrit par

Critique lue 1.7K fois

9
3

D'autres avis sur Bernadette a disparu

Bernadette a disparu
FrankyFockers
5

Critique de Bernadette a disparu par FrankyFockers

Etonnant de réaliser que le nouveau film de Linklater n'est même pas sorti en salles en France. Un peu moins étonnant quand on le voit, même s'il est très beau plastiquement, une plastique froide et...

le 23 oct. 2020

3 j'aime

Bernadette a disparu
Fatpooper
6

Une femme

Merci Cate, c'est grâce à ton insistance si ce film a été tourné dans des décors naturels et non sur fond vert ! L'intrigue est globalement correcte. La mise en place est longue, très longue, et même...

le 15 mars 2020

3 j'aime

Bernadette a disparu
Selenie
5

Critique de Bernadette a disparu par Selenie

Dès le début on se trouve dans l'archétype de la comédie dramatique bobo et indé, une famille riche qui semble tout avoir pour être heureuse, une intrigue qui tient sur un timbre poste mais menée par...

le 26 mars 2021

2 j'aime

Du même critique

Les Animaux fantastiques - Les Crimes de Grindelwald
JorikVesperhaven
5

Formellement irréprochable, une suite confuse qui nous perd à force de sous-intrigues inachevées.

Le premier épisode était une franchement bonne surprise qui étendait l’univers du sorcier à lunettes avec intelligence et de manière plutôt jubilatoire. Une espèce de grand huit plein de nouveautés,...

le 15 nov. 2018

93 j'aime

10

TÁR
JorikVesperhaven
4

Tartare d'auteur.

Si ce n’est une Cate Blanchett au-delà de toute critique et encore une fois impressionnante et monstrueuse de talent - en somme parfaite - c’est peu dire que ce film très attendu et prétendant à de...

le 27 oct. 2022

88 j'aime

11

First Man - Le Premier Homme sur la Lune
JorikVesperhaven
4

Chazelle se loupe avec cette évocation froide et ennuyeuse d'où ne surnage aucune émotion.

On se sent toujours un peu bête lorsqu’on fait partie des seuls à ne pas avoir aimé un film jugé à la quasi unanimité excellent voire proche du chef-d’œuvre, et cela par les critiques comme par une...

le 18 oct. 2018

81 j'aime

11