Un film bancal


Beaucoup de zones d'ombres demeurent dans ce film. La caméra ne s'attardent pas, si ce n'est sur la sensualité de Solal et Ariane. Mais, rapidement, le contexte historique, pourtant clé de l'oeuvre et la critique acerbe de la bureaucratie européenne des années 30 tombent dans l'oubli. Le montage est parfois incohérent. Peut-être que Glenio Bonder, le réalisateur, qui va mourir durant le montage du film avait une bien meilleure idée, mais malade il semble ne pas avoir achevé son travail. Quel dommage car il y a aussi en puissance, dans ce film, de belles qualités. Lorsque celui-ci s'attarde sur les scènes d'amour, comme pour combler du vide, on se demande pourquoi...


L'âme de Cohen intacte


Une chose demeure pourtant. Le film est lisse, si bien qu'il ne peut gâter véritablement l'oeuvre de Cohen. Déjà, malgré ses défauts, la fascination amoureuse de ces deux êtres voués à une mort certaine, dans un contexte lourd de sens suffit à raviver le souvenir littéraire. La caméra, parfois, film avec une beauté froide des décors luxueux, comme pour souligner la solitude de ces deux êtres coupés du monde, perdus dans leurs passions destructrices. Deux, trois scènes évoquent les souffrances de Solal, diplomate juif voué à fuir une Europe antisémite. Mais ce n'est qu'évoqué. Comme si, c'était à nous, spectateur et lecteur, de faire le lien, entre les incohérences flagrantes du montage et l'oeuvre littéraire à laquelle le film se rattache tant bien que mal. Parfois, le film étonne par des paroles poétiques, reprises du texte directement. Et, finalement, derrière l'aspect très convenu du film se cache l'essence de l'oeuvre géante d'Albert Cohen. L'histoire est magnifique. La passion est incroyable. Une belle musique envoutante nous fait rapidement oublier la vacuité d'un film presque inachevé, sorte de brouillon fantasque, excellent dans l'idée, bancal dans les faits. Tout était là. Mais, il faut croire que Belle du Seigneur restera à jamais inadaptable.


Envie de le relire...

Tom_Ab
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste 2014 : une année cinématographique

Créée

le 11 févr. 2014

Critique lue 1.9K fois

Tom_Ab

Écrit par

Critique lue 1.9K fois

D'autres avis sur Belle du seigneur

Belle du seigneur
MarcoSerri
4

Sur le papier c'est magique.

1936 : le livre de l'amour sur fond de montée de l'abjection nazie. Solal, français, juif et haut-secrétaire dans une Société des Nations qui perd pied face aux massacres des éthiopiens par...

le 21 nov. 2013

4 j'aime

5

Belle du seigneur
Viktoria__Malyu
10

Critique de Belle du seigneur par Viktoria Malyuchkova

I’m greatly impressed by the film. Glenio Bonder is a genius and his film though partly unfinished is a chef-d'oeuvre due to his deep understanding of the inner sense and general spirit of Cohen’s...

le 22 juin 2013

2 j'aime

Belle du seigneur
Jolene
3

Critique de Belle du seigneur par Jolene

Que de longueurs ! Une histoire d'amour qui n'avance pas. Des passages qui n'ont pas lieu d'être... C'est bien la première fois que je regarde autant de fois ma montre au cinéma.

le 30 juin 2013

1 j'aime

Du même critique

La Passion du Christ
Tom_Ab
8

Le temporel et le spirituel

Le film se veut réaliste. Mais pour un film sur le mysticisme, sur un personnage aussi mythique, mystérieux et divin que Jésus, il y a rapidement un problème. Le réel se heurte à l'indicible. Pour...

le 26 déc. 2013

60 j'aime

4

The Woman King
Tom_Ab
5

Les amazones priment

Le film augurait une promesse, celle de parler enfin de l’histoire africaine, pas celle rêvée du Wakanda, pas celle difficile de sa diaspora, l’histoire avec un grand H où des stars afro-américaines...

le 7 juil. 2023

50 j'aime

3

Silvio et les autres
Tom_Ab
7

Vanité des vanités

Paolo Sorrentino est influencé par deux philosophies artistiques en apparence contradictoires : la comedia dell'arte d'une part, avec des personnages clownesques, bouffons, des situations loufoques,...

le 31 oct. 2018

29 j'aime

4