Christopher Smith nous a tellement habitué à mieux...

"Creep", "Severance", "Triangle", "Black Death", ... Impossible pour tout bon fan de film de genre d'être passé à côté du nom de Christopher Smith dans les années 2000 tant la patte du cinéaste s'est révélée toujours extrêmement séduisante dans les différents registres de l'horreur où il s'est aventuré (personnellement, je voue une totale admiration à "Triangle"). Mais, depuis, le réalisateur anglais semblait vouloir s'envoler vers d'autres horizons en s'essayant au thriller avec "Detour" ou, plus étonnant, à la comédie de Noël avec "Get Santa". "The Banishing" apparaît donc comme une espèce de revirement assez surprenant dans sa filmographie, un retour aux sources à son genre de prédilection qui ravit bien entendu celui ayant adoré ses premiers films mais qui peut aussi faire craindre une forme de régression de son cinéma...


Pour fêter son retour, Smith a mis les petits plats dans les grands et nous convie rien de moins que dans la demeure la plus notoirement hantée d'Angleterre : Borley Rectory ! Et, vous l'aurez déjà compris, dans le but de faire subir le courroux de forces surnaturelles à une pauvre famille, en l'occurence la femme et la fille d'un vicaire parties rejoindre ce dernier pour habiter ces lieux lugubres à l'aube de la Seconde Guerre Mondiale.


Tout en déployant l'habituelle panoplie du film de fantômes, "The Banishing" va avoir comme particularité de développer la hantise subie par ces héros à partir des parts d'ombre qu'ils cherchent à étouffer aux yeux d'autrui. Si cela touche directement ses personnages principaux à travers les non-dits du couple entre cet homme de foi et sa femme ayant vécu une terrible épreuve, le film va en permanence élargir cet angle d'approche à quasiment tous ceux amenés à interagir avec eux afin de révéler leur véritable nature derrière les apparences. Évidemment, le contexte de la montée du fascisme, avec la manipulation des parts les plus obscures des masses populaires, tombe à pic, Smith en profite de plus pour pointer du doigt les contradictions de l'Église de l'époque, avec ceux à l'origine de la malédiction, du mari vicaire et aussi de son supérieur, qui, sous couvert de vouloir rassembler une communauté, agit dans le secret avec un comportement digne de la mafia (voire pire encore). Enfin, même d'un point de vue plus large, le look et le comportement tout bonnement extravagants du personnage de Sean Harris sont un parfait mirage quant au vrai rôle qu'il tiendra dans toute cette histoire.


Au-delà du fond, Christopher Smith va également répercuter à l'écran cette fixation sur les multiples facettes humaines pour les matérialiser dans ce qui donnera les meilleures séquences du film. Probable clin d'oeil à "Triangle" et à la thématique du dédoublement au sens large qui jalonne quelques-uns de ses films, le gimmick utilisé ici permettra d'offrir des manifestations surnaturelles atypiques et de nous immerger facilement dans la perte de repères grandissante de l'héroïne incarnée par Jessica Brown Findlay.


Hélas, malgré de vrais bons moments d'étrangeté dans l'atmosphère du long-métrage, ces efforts ne pourront eux-mêmes faire oublier le manque cruel de surprises au sein de son récit. De leur mise en place jusqu'à leur résolution attendue, les enjeux n'auront de cesse de suivre un cheminement très linéaire, inscrivant "The Banishing" dans une veine beaucoup trop classique du film de maison hantée que même l'angle choisi, les discours critiques et les artifices de Smith ne sauront affranchir de l'extrême banalité avec laquelle ils nous sont délivrés. On sortira forcément déçu de "The Banishing", s'interrogeant sur ce qui a vraiment intéressé Smith sur la pertinence de cette proposition hormis l'opportunité d'utiliser certains TOCs de mise en scène qu'il affectionne car, en l'état, il est clair et net que ce film d'épouvante ne peut prétendre rivaliser un tant soit peu avec les hits de ses débuts.
On remarquera tout de même que le cinéaste n'a pour une fois pas participé à l'écriture du scénario de ce projet et ce n'est sûrement pas un hasard s'il est aussi oubliable...

RedArrow
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le 2 mai 2021

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