« Au bout du conte » est le dernier opus né de la collaboration du couple Agnès Jaoui – Jean-Pierre Bacri. Depuis que j’ai découvert « Cuisines et dépendances », j’ai une affection particulière pour l’acteur le plus râleur du cinéma français. Je suis donc toujours aux aguets de chacune de ses apparitions sur grand écran. Je n’avais pas vu la bande-annonce de ce film avant de m’asseoir dans mon siège. J’étais donc vraiment curieux de découvrir le nouveau rôle incarné par mon bougon préféré. L’affiche nous le présentait sous des traits boudeurs. Il partageait le premier plan avec une Jaoui déguisé en fée. En retrait, on découvre un jeune couple en train de danser. Quels liens unissent tout ce beau monde ? Presque deux heures sont au programme pour nous les conter…

Le site Allociné (www.allocine.fr) décrit le synopsis avec justesse : « Il était une fois une jeune fille qui croyait au grand amour, aux signes, et au destin ; une femme qui rêvait d’être comédienne et désespérait d’y arriver un jour ; un jeune homme qui croyait en son talent de compositeur mais ne croyait pas beaucoup en lui. Il était une fois une petite fille qui croyait en Dieu. Il était une fois un homme qui ne croyait en rien jusqu’au jour où une voyante lui donna la date de sa mort et que, à son corps défendant, il se mit à y croire. »

Rapidement, on perçoit que « Au bout du conte » est construit comme un film choral. Chaque scène nous présente de nouveaux personnages dont on devine qu’ils sont amenés à se croiser à moyen terme. Dans un premier temps, on voit naitre plusieurs intrigues indépendantes qui se succèdent tout au long du film. Elles semblent liées entre elles par un thème commun : la croyance. L’attrait de ce type de narration est d’offrir une histoire sans temps mort du fait d’un grand nombre de personnages. A l’opposé, cette structure ne peut pas empêcher les comparaisons. Chaque « conte » ne nous touche pas avec la même intensité. On se passionne certains, on n’est plus neutre devant d’autres. Résultat, par moment, cela génère un sentiment curieux. On s’immerge de manière irrégulière dans les enjeux de la trame.

Cette différence d’intérêt résulte en grande partie de la différence de talents des interprètes. Le casting n’est pas uniforme sur ce plan-là. La jeune génération souffre de la comparaison avec leurs ainés. Chaque apparition de Bacri est un moment de bonheur cinématographique. On pourra lui reprocher de jouer tout le temps la même partition. Mais pourquoi donc ? Il est génial. Le personnage incarné par Agnès Jaoui est également très touchant par ses qualités et ses défauts. Dominique Valadié est une ex-épouse remarquable qui arradie l’écran à chacun de ses passages. A contrario le couple central incarné par Agathe Bonitzer et Arthur Dupont est assez mièvre et fade par comparaison. La prestation des deux espoirs français n’est pas catastrophique mais elle est tellement moins envoutante que celle des « anciens ». Résultat, l’histoire d’amour entre ce chaperon rouge et son prince charmant ne nous intéresse que par les interactions qu’ils ont avec les personnages secondaires à leurs aventures.

Le titre annonce une histoire dans l’univers des contes. Cette thématique est finalement assez anecdotique. Elle se construit davantage par une succession de clins d’œil parsemés tout au long de la narration. On découvre une allusion à la pantoufle de vair de Cendrillon, au petit chaperon rouge, au grand méchant loup, à la Belle au bois dormant ou à la pomme de Blanche-Neige… Cela fera aisément naitre un sourire chez le spectateur mais il ne faut chercher au-delà un message subliminal. Le film est construit de manière solide sans réelle prétention. Les décors sont simples. On se rapproche du théâtre sur ce plan-là. Le film ne demande pas nécessairement à être découvert dans une grande salle de cinéma si on met de côté le plaisir personnel d’être plongé dans une salle obscure.

En conclusion, j’ai passé un bon moment devant « Au bout du conte ». Beaucoup de scènes sont touchantes. De nombreuses répliques ou situations font mouches. Je regrette juste toutes les intrigues ne soient de même qualité. Si le fil conducteur de l’amourette des deux jeunes avait été plus enthousiasmant, cet opus aurait pu marquer cette première partie d’année 2013 sur le plan cinématographique…
Eric17
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le 12 avr. 2013

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Eric17

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