Âmes libres
6.6
Âmes libres

Film de Clarence Brown (1931)

" A lot of people don't believe that gag about being born equal."

Les plus:


On retrouve les thèmes chers aux « Forbidden Hollywood », ces films sortis au début des années 30 et rapidement interdits après leur sortie par le code Hays : alcoolisme (on est en plein dans la Prohibition), délinquance, relations hors mariage et surtout un personnage principal féminin fort et indépendant (ici une jeune fille de la haute société dont le père avocat alcoolique est la brebis galeuse de la famille). Bien avant les discours féministes actuels d’aujourd’hui, les femmes de ces petits films au rythme soutenu tenaient le haut de l’affiche et menaient les hommes par le bout du nez avec une facilité rafraichissante.


La relation entre ce père veuf et sa fille unique jouée par Norma Shearer est d’ailleurs fort atypique et l’intérêt principal de ce film. Dès la première scène, une ambiguïté s’installe car on y voit l’héroïne s’habiller avec désinvolture en compagnie d’un homme plus âgé. Alors que tout laisse penser qu’on est témoin d’une relation hors mariage entre un homme marié et une jeune fille, les échanges entre les deux protagonistes nous apprennent dans un deuxième temps qu’il s’agit d’une relation filiale. Une relation fusionnelle (limite incestueuse ?) comme rarement représentée au cinéma, puisque la fille va passer un étrange marché avec son père,


renonçant à sa relation amoureuse s'il renonce à la bouteille .


Autre intérêt notable du film : Clark Gable en gangster ignoble, ce qu'il réussit toujours effroyablement bien. Même dans un second rôle, sa présence magnétique vole la vedette aux autres acteurs. Le film est aussi l’occasion de voir Clark Gable et Leslie Howard se battre pour une femme avant « Autant en emporte le vent ».


Les moins:


Si la première partie est légère et enlevée et laisse espérer une jolie histoire d’amour transcendant les classes, la deuxième partie m’a personnellement beaucoup moins convaincue, à cause d’un discours trop moralisateur (la censure commençait-elle à peser ?). Clark Gable, le bootlegger avec lequel Norma Shearer noue une relation passionnée, va être remis rudement à sa place. Quand il demande à l’avocat la main de sa fille, ceui-ci ne cache pas son dégoût : « Le seul moment où je déteste la démocratie c’est quand un bâtard de votre genre oublie d’où il vient… Quelques billets sales et une chemise propre et vous venez envahir le bon côté de la ville. ». Et quand le malfrat se révèlera effectivement un goujat, Norma Shearer aura elle-même ces mots de mépris : « J’ai découvert que les porcs doivent rester avec les porcs ».


La résolution de l’intrigue, passablement tirée par les cheveux, verra donc les aristocrates rester entre eux, au-dessus de la lie des vulgaires voyous (avec qui ils ont pourtant noué des liens tout le long du film, le père comme client, et la fille comme amante).


Un peu décevant si l’on compare à d’autres « Forbidden Hollywood », comme « l’Ange blanc » ou « Jewel Robbery » pour ne citer qu’eux, où l'héroïne choisissait au final de partir avec le sympathique malfrat, avec un manque total de respect pour la bienséance particulièrement jouissif.


Autre aspect qui m’a dérangé : l’actrice principale, Norma Shearer, a un jeu très théâtral sans doute hérité du cinéma muet, parfois énervant. De même, le plaidoyer final tenu par le père avocat m’a semblé plus grandiloquent que touchant.


Pour résumer, un film intéressant, avec une femme forte tiraillé entre différents types d'amour et de désirs. Original et avec un Clark Gable savoureux. Mais j'imagine que la romantique indécrottable en moi


espérait qu'il embarque la fille, ce qui me laisse un peu sur la fin avec en dernière partie un procès larmoyant superflu.

Do_Cha
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le 3 mai 2021

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Do_Cha

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