A Man
6.5
A Man

Film de Kei Ishikawa (2022)

Un film japonais, très japonais. Qui aborde pêle-mêle nombre de thèmes souvent présents dans le cinéma contemporain du pays du soleil levant : la famille, la filiation, l'identité, la fuite et le deuil. Le tout sur fond de chronique douce-amère de la société japonaise actuelle, dont le spectateur pourra percevoir qu'en dépit de différences culturelles manifestes, elle partage un certain nombre de tares communes avec celles de l'Europe occidentale : chaines d'information continues, racisme, complotisme, séparatisme des classes dominantes urbaines pour n'en citer que quelques unes. Avec un petit plus côté nippon (mais pour combien de temps encore ?), puisque la peine de mort y est toujours en vigueur.

Si le film est présenté comme un thriller, j'ai trouvé pour ma part qu'il n'avait rien de tel. Le rythme est tout sauf haletant (ce qui n'implique pas que le film soit chiant pour autant) et le regard tendre de son réalisateur prédomine largement sur la violence, qui est plus suggérée que filmée explicitement aux rares moments où elle se produit. On est plutôt ici dans un exercice de style intimiste, mais dans lequel une part de mystère serait préservée, à travers essentiellement cette question d'identités multiples, de personnages qui cherchent à s'effacer d'une société et d'une socialisation dont ils ne veulent plus. Mais je ne suis pas sorti de la salle obscure avec les nerfs à vif; plutôt apaisé et relaxé au contraire, un peu comme après une séance de natation à la piscine.

Ça ne sera sans doute pas le film de l'année, pas suffisamment saisissant pour ça. Mais ça reste un bon moment de deux heures de cinéma, solidement réalisé et très bien interprété : Sakura Ando - déjà excellente dans "Une affaire de famille" (dont les thématiques sont d'ailleurs assez proches de celles de "A man" - y est remarquable, avec un jeu très sobre, pudique, tout en sentiments contenus. Au delà de son seul personnage, on ressent d'ailleurs, tout au long de la pellicule, le poids des conventions sociales de la société japonaise, dans laquelle prime une politesse derrière laquelle chacun cache son ressenti profond, ce qui est également une forme de fuite (intérieure). Tout de même, j'attends désormais le réalisateur japonais qui, à l'instar de Murakami dans ses bouquins, saura faire ressortir plus ouvertement les ressentis profonds de ses compatriotes.

Marcus31
7
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le 5 févr. 2024

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