A cappella
7.1
A cappella

Film de Lee Su-Jin (2014)

Le réalisateur sud-coréen Lee Su-Jin nous propose avec "A Cappella " un teaser dramatique primé d’ores et déjà, et à plusieurs reprises, au Festival du Film International de Rotterdam, à ceux de Marrakech et de Deauville. Cet opus raconte l’histoire de Han Gong-ju, interprétée par Chun Woo-hee, qui est envoyée dans un autre établissement alors qu’une enquête a lieu dans sa ville d’origine. Han Gong-ju pourra-t-elle surmonter son passé douloureux et obsédant ? En effet, la jeune adolescente, délaissée par ses parents, a été victime d’un viol collectif de la part de jeunes gens de son lycée et a dû quitter celui-ci pour un autre, alors que sa compagne, enceinte à la suite de ce viol, vient de se suicider. L’un de ses professeurs l’accompagne et la confie à sa mère qui, après l’avoir froidement accueillie, finit par s’attacher à elle. La jeune fille est d’autant plus discrète dans son comportement que l’enquête au sujet du viol n’est pas terminée et que son innocence n’est pas encore prouvée, car les agresseurs assurent qu'elle était consentante. La jeune fille ne fait pas moins son possible pour tenter de se réinsérer dans la vie et mener une existence normale auprès de ses nouvelles compagnes, dont l’une s’intéresse plus particulièrement à elle et l’encourage, ayant remarqué ses dons pour le chant, à venir les rejoindre dans leur chorale a cappella. Mais le passé est trop obsédant et l'adolescente ne trouve de vraie détente qu’à la piscine où elle s’entraîne à faire des longueurs, persuadée que si elle est capable de nager bien et longtemps, elle s’en sortira et pourra ré-envisager sa vie normalement, car qui sait nager peut survivre.


Voilà un scénario qui ne manque pas de qualité et offre, malgré un contexte dramatique, une issue positive, un désir, ô combien louable pour une jeune fille blessée, de surmonter son épreuve et de se reconstruire mais, malheureusement, il manque de rigueur dans son narratif et oscille sans cesse entre passé et présent de façon brouillonne, ce qui prive le récit de cohésion. Dommage, car l’interprétation est bonne, la jeune Chun Woo-hee endosse ce rôle avec une gravité convaincante, n’en fait ni trop, ni pas assez, nous touche par sa retenue et sa pudeur et les scènes les plus pénibles sont filmées sans mélo excessif. Toutefois, il manque quelque chose à ce film : une vision peut-être plus intériorisée du cheminement psychologique de la victime. On reste en lisière, sans jamais aller au-delà de façon formelle, si bien que l’émotion ne survient pas autant que nécessaire alors que le sujet est une intéressante réflexion sur des pratiques de plus en plus courantes en Corée comme ailleurs. Il aurait fallu peu de chose pour que tout bascule mais, voilà, la caméra n’est pas suffisamment introspective pour nous bouleverser véritablement, on ne fait que constater que le mal-être de la jeunesse coréenne est très proche de celui de la jeunesse occidentale. Amer constat. Avec ce premier long métrage, Lee Sujin nous prouve néanmoins ses qualités de mise en scène, sa direction d’acteurs qui est remarquable et sans faille, son courage à s’attaquer à un sujet sensible et difficile avec une incontestable maîtrise de l’image et surtout de nous montrer sans concession les terribles ravages qu’une agression telle que celle-ci peut causer chez un être sans défense. Reste l’admirable courage de la victime qui entend se relever de cette indignité et faire face à nouveau à l’avenir.
abarguillet
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le 19 nov. 2014

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