68 Kill
5.9
68 Kill

Film de Trent Haaga (2017)

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Lorsque je m’étais lancé dans Chop (2011), premier film de Trent Haaga, je ne connaissais rien du film et, à la sortie du visionnage, j’étais ravi du spectacle qui m’avait été proposé. On était loin du grand film, mais le spectacle était bien fun et bien méchant. C’est exactement ce qu’il vient de se passer avec son deuxième film, 68 Kill, dispo chez nous sur la plateforme ShadowZ à l’heure où j’écris ces lignes, je n’en attendais rien car je ne savais même pas de quoi ça parlait et j’en sors des plus agréablement surpris. Faut dire que j’aime bien les films où le héros se retrouve dépassé par les évènements qui lui tombent sur le coin du museau, avec un humour méchant. Ça tombe bien car c’est exactement le cahier des charges de ce 68 Kill réalisé par un rejeton de la Troma. Eh oui, encore quelqu’un issu de l’écurie Troma puisque Trent Haaga, en plus d’avoir fait l’acteur dans leurs productions, a également scénarisé Deadgirl et Toxic Avenger 4.


Avec 68 Kill, Trent Haaga adapte un roman du même nom écrit par Bryan Smith et son terrain de jeu va être l’Amérique et ses travers (non, pas ceux que les texans grillent et tartinent de sauce barbecue bien grasse). Haaga dresse un portrait d’une Amérique profonde malade, bien ravagée du ciboulot, où l’argent fait tourner les cerveaux, même quand il ne s’agit « que » de quelques dizaines de milliers de dollars, 68000$US pour être exact. Le personnage principal ne prend même pas la peine de verrouiller la porte de sa caravane parce que « il n’y a rien qui vaille la peine d’être volé ». Les personnages de manière générale sont stripteaseurs, nettoyeurs de fausses septiques, caissier de nuit dans une supérette, que des emplois humbles et sans avenir sentant bien le désespoir économique sous-jacent. Alors forcément, dans toute cette ambiance nauséabonde, la volonté de pratiquement tout le monde est de tromper, mutiler ou tuer quiconque se trouve entre eux et ces fameux 68000$US. Mais cela n’est qu’une toile de fond pour la petite satire du féminisme extrême, qu’on commence à voir depuis quelques années, qui elle est en premier plan. Tous les personnages féminins sont ici des femmes dominantes et l’homme, notre héros, n’est plus que l’ombre de lui-même, obligé de s’effacer ; un faible qui a oublié ses parties génitales dans un autre pantalon. Les femmes y sont ici toutes plus chtarbées les unes que les autres, seul le personnage de Violet est là pour apporter un peu de nuance. Mais il en est de même avec les personnages masculins, parce qu’entre le frère taré dont la grande passion est de découper des femmes et de garder les morceaux dans du formol ou le proprio qui ne pense qu’au cul, au point de se filmer en plein ébat, puis de regarder ses vidéos la nuit en s’asticotant le manche, les hommes ne sont au final pas beaucoup mieux lotis.


Les personnages sont une des grandes forces du film. Ils sont tous complètement fous et il n’y en a pas un pour rattraper l’autre. Le travail du casting est d’ailleurs à saluer, chaque acteur / actrice assumant complètement le personnage loufoque qui lui a été attribué et balançant ses répliques parfois cinglantes sans sourciller. On sent l’influence du cinéma de Quentin Tarantino, avec ces dialogues mordants suivis de gunfights versant dans le gore, mais également celle des frères Coen avec ce héros looser qui pourrait être un pas si lointain cousin du personnage de Nicolas Cage version Arizona Junior. Le scénario se lance assez rapidement et, passé les 20 premières minutes, les péripéties rocambolesques vont s’enchainer pour le pauvre personnage principal et vont ébranler ses hypothèses naïves sur la nature humaine. Le film s’embourbe parfois dans une certaine redondance, sur la perversité de certains personnages, mais 68 Kill sait malgré tout suffisamment se renouveler. Tout s’enchaine, comme s’il n’y avait pas de temps à perdre, ce qui rend le film assez énergique. L’humour et certaines situations sont parfois bien corrosives. On est dans de l’humour noir un peu pince-sans-rire, versant parfois dans le mauvais goût et le gore. On a connu plus méchant mais on sent bien que l’esprit Troma plane non loin de là, lui donnant un petit côté bis (assumé) des plus frais. Le fait qu’un tueur en série sadique ne soit au final qu’une menace mineure dans cette vie où tout le monde semble être un dégénéré ricanant (ou pire), en dit long sur la volonté de Trent Haaga de dépasser les limites de la politesse du cinéma de genre. Tout n’est pas parfait, il y va parfois avec de très gros sabots (l’introduction avec sa mouche coincée dans du miel, métaphore un peu grossière d’un homme englué dans l’énorme pot de miel qu’est sa copine), mais on passe clairement un bon moment devant 68 Kill.


Deuxième film et dernier film en date du rejeton de la Troma Trent Haaga, 68 Kill est un très sympathique divertissement gentiment méchant. Ceux qui ont aimé Chop, premier film du réalisateur, prendront certainement du plaisir avec celui-ci.


Critique originale avec images et anecdotes : DarkSideReviews.com

cherycok
7
Écrit par

Créée

le 28 nov. 2021

Critique lue 140 fois

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