Ha ben, y a Harrison Ford dans ce film ! Je ne l'ai même pas reconnu de suite, ignorant sa présence au casting (je fais rarement attention aux noms qui défilent lors d'un générique). Surprenant. Il est habillé un peu comme Sean Connery dans "Indiana Jones 3". Comme quoi il avait raison lorsqu'il a déclaré qu'il ne se voyait plus en Indiana Jones car il pourrait incarner son propre père (dans le sens où Indiana est censé être assez jeune pour sauter dans tous les sens).

"42" est assez pénible à regarder. C'est un biopic. Heureusement, c'est plutôt structuré dans le sens où on ne va pas s'intéresser à la vie du personnage en dehors du Baseball comme bon nombre de films de ce genre. Mais ça ne suffit pas. Ce qu'il faut, c'est un objectif principal à atteindre. Là, pas vraiment d'objectif, on assiste juste à une évolution des mœurs face à ce joueur noir jouant en terrain blanc. Les conflits sont tout autant absent. Du moins les vrais conflits, ceux d'ordre narratif. Car je ne doute pas qu'un nègre, à cette époque, ait quelques hésitations avant de traverser une rue dans une ville du Sud. Mais vu qu'ici notre héros n'est pas en droit de répondre... car oui, la petite particularité du film, c'est que notre héros promet de ne jamais se rebeller lorsqu'un blanc l'insultera. Dans de telles conditions, il ne peut que subir. Son seul vrai conflit, au fond, il est interne, et c'est sa colère, qu'il doit maîtriser. Mais cet élément n'est vraiment pas mis en valeur. Du coup, c'est comme s'il n'y avait pas de conflits.

Peut-être pourrait-on voir la lutte contre le racisme comme étant l'objectif principal et la source de conflits. Sauf que, à moins d'être dans une série B avec Chuck Norris, le racisme ne se combat pas vraiment, il n'y a pas un grand vainqueur face à l'ennemi déchu, qui reconnaît son tort. Mais apparemment c'est ce que les producteurs ont voulu faire passer, sans pour autant avoir de bonnes armes (les poings de Chuck). Du coup, l'évolution est assez lamentable d'un point de vue dramaturgique. L'anti-racisme est contagieux : notre héros joue bien, un blanc va commencer à l'apprécier, puis un autre. C'est vraiment saugrenu car le soulèvement final arrive de par lui-même sans qu'on ait vraiment exploré les rouages d'un tel dénouement ; le black de service n'a rien fait si ce n'est jouer. C'est comme si je vous disais que le seul moyen de vaincre un tyran, c'est de jouer au foot devant lui, que cela calmera ses ardeurs...

C'est dommage tout ça, parce qu'il y avait vraiment de quoi faire. Il existe bon nombre de films traitant du racisme où il se passe quelque chose. Évidemment, l'objectif principal n'est pas de vaincre le racisme, mais juste en montrer le pouvoir dévastateur. Ou autres. Il y a aussi le personnage interprété par Ford qui est intéressant ; cet homme, à la base, ne veut un noir, que parce que ça lui rapportera plus de sous, puisqu'il est super bon ! Il y aurait eu moyen aussi de pimenter quelques situations ; ici, tout est toujours un peu mou, un peu gentil... au final, le racisme, on ne le ressent pas trop ; oui, il se fait insulter et taper dessus une ou deux fois... une ou deux fois ! Pas plus ! C'est pas trop mal ! Il ne faut bien sûr pas tomber dans le versant opposé, appelé misérabilisme, mais écrire des scènes avec un peu plus de tension, de risques pour le personnage, ça n'aurait vraiment pas été du luxe.

Je ne tiens jamais compte du message pour noter un film, ou alors c'est inconscient, ou alors c'est pour ajouter un petit point quand on est déjà à 8 ou 9/10. Je suis contre le racisme ; cette cause est très très mal défendue au travers de ce film. En gros, le noir, pour se faire accepter du blanc, doit surtout accepter que le blanc le frappe et l'insulte. S'il l'accepte, alors le blanc finira par le respecter, le considérer comme son égal. C'est un peu écœurant comme concept. Il y a aussi certaines phrases un peu choquantes car on ne cherche jamais à les justifier : un joueur noir est forcément un très bon joueur. Autant ceux qui disent que les noirs sont d'office des bons joueurs sont mal vus, autant ceux qui disent l'inverse sont bien vus ! La discrimination positive est aussi grave que la discrimination négative à mes yeux.

Niveau mise en scène, c'est globalement propre. Sobre. Efficace. Calibré pour les oscars. Ben oui, on sent bien que les sujets nobles de ce genre (contre le racisme, pour l'homosexualité et Cie), ça passe mieux pour ce genre de cérémonie de culs serrés. M'enfin, tant que c'est propre, c'est déjà ça. Puis les acteurs sont bons. Ford joue dans le cliché (en même temps, il ne peut pas faire autrement vu la pauvreté de l'écriture), mais ça passe bien, et derrière ses rides et son maquillage le vieillissant, il lance ici et là un petit regard espiègle que l'on a bien connu en 1977 (bon, pour moi,, c'était un peu plus tard quand même).

Bref, un film très pauvre narrativement, parce qu'il ne s'y passe pas grand chose, que les conflits narratifs sont rares. Faire un film contre le racisme ne suffit pas à en faire un bon film, surtout lorsque le message semble si mal défendu.
Fatpooper
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le 18 mars 2015

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