40 ans - Mode d'emploi par FrankyFockers
j'ai totalement détesté ce film et même temps je l'ai trouvé très réussi pour d'autres raisons, c'est dingue d'avoir un avis si partagé et en même temps si tranché. Disons que je sis scandalisé par la manière dont Apatow traite son sujet. Il est sensé nous dire ce que c'est d'avoir 40 ans. Bon, ok, a priori pourquoi pas. Mais il passe à côté de tout, il édulcore tout, il n'est jamais dans le sujet et il passe son temps à faire de la bluette neuneu... Jamais dans le film il ne dit que c'est l'âge de la confrontation à la maladie, à la mort, que c'est un âge dur et violent. Non, 40 chez Apatow, c'est cool, et les seuls problèmes qui semblent l'emmerder sont ceux du désir qu'il porte à sa femme. ça fait un peu flipper.
C'est comme avec ses filles, qui jouent leur propre rôle dans le film. Il n'est jamais question d'un seul problème d'éducation, de scolarité ou autre, tout roule comme sur des saucisses. Les seuls soucis sont des soucis d'entente entre les deux, ou bien, pire encore, que sa plus grande passe trop de temps devant l'ordi ou devant des épisodes de Lost.
Le pire étant l'absence totale de crédibilité du monde décrit. Les deux travaillent, attention : lui dirige une maison de disques, elle un magasin de fringues, mais ils n'y sont jamais ! ils passent leurs journées à faire autre chose.
Pire encore, ils ont de gros problèmes de fric. Enfin le scénario dit ça. En réalité, quid des problèmes de fric ? Ils ne font aucune économie, bouffent comme des porcs dans une maison de grand luxe avec piscine et grand jardin (qu'ils pensent vendre mais bien évidemment qu'ils ne vendent pas). Lui, pour ses 40 ans, organise une gigantesque fête, mais un truc à 20.000 dollars, hein ! et ils conservent bien évidemment leurs deux grosses bagnoles...
Bref, je m'arrête là, le voici le monde d'Apatow, un monde lisse, sans aspérité, sans problème, où tout est gommé et où l'on fait de gros smileys en faisant mine que tout roule. J'ai l'impression de voir un message du gouvernement fusionné avec Disney pour endormir gentiment le peuple.
On pourrait être méchant et dire que ceci est en germe depuis le début de sa carrière de réal, mais dans les trois premiers, même si cette tentation était déjà là, au moins il avait l'intelligence de mettre en scène des freaks, des glandeurs, des personnages en marge qui rêvaient peut-être d'intégrer ce monde, mais avec un décalage tel que l'intérêt du film se situait justement dans cette brèche. Ici, rien de tout ça. Le couple est un couple lambda qui ne rêve que de normalité et il nous est montré gommé de toutes ses aspérités.
Après, il y a tout de même des choses qui m'ont plus, progressivement, dans ce This is 40. C'est que malgré tout, Apatow sait construire une scène, la faire durer, la tirer à l'extrême pour obtenir le meilleur de ses comédiens, particulièrement excellent ici. Il y a donc des scènes réussies, et des gags drôles. Pas tous mais quelques uns.
Surtout, j'ai aimé que son casting s'élargisse et accueille de nouveaux comédiens. Notamment deux, John Lithgow & Megan Fox. Lui, c'est l'alter ego de De Palma, l'un des meilleurs comédiens de sa génération, pas assez reconnu, pas assez filmé, mais qui ici est très bien employé. Apatow lui confie un magnifique rôle, tout en nuances, et il s'en sort admirablement. Elle, Megan Fox, je l'avais découverte dans le génial Jennifer's Body. Je ne l'avais pas revue depuis, mais elle est une nouvelle fois brillante. Elle bouffe littéralement l'écran, son duo comique avec la petite asiatique au magasin est très réussie, et la scène ou elle sort en boite avec l'héroïne est sans doute la plus réussie du film. Elle donne alors à l'héroïne une autre dimension, tout en faisant basculer son rôle à elle vers quelque chose de beaucoup plus riche et complexe que ce qu'il laissait penser. Ils sont tous deux les plus belles choses que j'ai vu dans ce film, un beau film de comédiens encore une fois, mais à l'image des dernières productions Apatow : trop confortable, sans aucune prise de risque et terriblement décevant.