J’ai été frappé d’emblée par la pellicule assez "sale" du film qui le rend plus vieux qu'il ne l'est. On retrouve l’esthétique de Trainspotting presque de manière symétrique. Cillian Murphy dans le rôle du protagoniste, campe un personnage à l’évolution très aboutie, du désespoir et de la détresse à la force et la pugnacité face aux événements dramatiques qui sont dépeints. C’est là un aspect qui fait l’intérêt du film : il y a des acteurs convaincants aux rôles travaillés contrairement à ce qu'on peut rencontrer dans d'autres films au synopsis similaire.
Boyle ne nous présente pas ici un film classique de zombies dans un monde post apocalyptique. Les survivants à l’épidémie se révèlent ainsi bien plus dangereux que les contaminés eux-mêmes dont il faut remarquer la justesse du traitement par ailleurs : on est loin des zombies se déplaçant à deux à l’heure, stupides et dont le corps tombe en lambeaux. Ici, ils font preuve d’habileté et surprennent par leur vélocité. L’œuvre donne donc une nouvelle impulsion au genre en distinguant les zombies classiques qui ne font plus partie du royaume des vivants et les infectés qui restent des êtres vivants à part entière (on le voit notamment à la fin lorsque certains infectés commencent à mourir de faim).
Je parlais de l’esthétique : le choix d’une pellicule sale et floue accentue le sentiment d’oppression paradoxalement malgré les nombreux plans larges du début qui mettent en exergue l’absence de vie dans un Londres abandonné précipitamment. Ce sentiment accompagne le spectateur jusqu’au dénouement. La constance dans ce choix brise également la frontière entre le rêve et la réalité lors d’une scène au milieu du film qui m’a agréablement surpris car j’y ai cru.
Bien sûr le film critique en filigrane la nature humaine et ses outrances : son esprit moutonnier dans les mouvements de panique, l’activisme qui se transforme en un fanatisme aux conséquences cataclysmiques (élément déclencheur de l’épidémie), la perte de son humanité lorsqu’il est question de sa survie…Il bat en brèche surtout l'idée d'une société aux fondations solides et résistante à toutes les épreuves. La pérennité de cette dernière ne tient en fait qu'à un fil.
L’ensemble est porté par une bande originale envoutante émaillée de morceaux classiques bienvenus.
Seul bémol du film : le personnage d’Hannah que je trouve assez transparent et peu convaincant notamment après la perte de son paternel et qui ne parvient pas vraiment à s’affirmer dans le rôle de la jeune fille précipitée dans un contexte de violence et de survie qui la dépasse.
Un film qui relance un genre parfois suranné grâce à la patte de Boyle qui surprend par ses choix esthétiques et scénaristiques.