Slam Dunk
8
Slam Dunk

Manga de Takehiko Inoue (1990)

"I love it very much. This time I am definitely not lying."

Ok, je surnote comme c'est pas permis.


Parce que SLAM DUNK commence mollement, avec près de dix tomes qui peinent à faire aimer la série. Le trait d'Inoue n'est pas encore parvenu à maturité, les personnages sont disproportionnés, avec des têtes trop petites pour leur corps imposant. En plus, ces premiers volumes sont très inégaux et largement éloignés du thème principal, à savoir le basket. Il n'y a pas grand chose à se mettre sous la dent et le seul match (contre Ryonan) ne tient pas ses promesses. Pourtant, on distingue quelques éléments qui sont indubitablement réussis, à commencer par l'humour. Si Inoue peine à bien former ses personnages dans les débuts de son manga, les caricatures qu'il en fait sont proprement hilarantes, avec Sakuragi tantôt blasé, tantôt exultant, Akagi (et les pivots en général, juste délirant) dessiné comme un gorille, Rukawa comme un renard (avec parfois des cornes pour montrer son côté dark, qu'est ce que je me suis marré) et autres sous-fifres avec des queues de lézards dans le dos... Les péripéties de Sakuragi sont épatantes d'humour, à commencer par le scénario lui même : le rouquin bête comme ses pieds va se lancer dans le basket pour se faire remarquer de la belle Aruko, sans savoir qu'au basket, on dribble, on ne peut pas marcher ni mettre des coups de boule aux adversaires (voir d'ailleurs les deux cases totalement débiles où Sakuragi ne comprend pas ce qu'est un "dunk" et le compare à un "tank" ou au "donk donk" d'un marteau contre un mur...).
La série connait un gros coup de mou avec les affaires Mitsui et Ryota, qui déclenchent une baston générale qui dure trois tomes, très ennuyeuse et proprement inappropriée, même si c'est pour introduire ces deux personnages hauts en couleurs.
Puis vient enfin le moment où le manga prend son rythme de croisière, où les matches et entrainements s'enchainent sans aucun problème, dans une fraicheur générale, que le trait d'Inoue enfin parvenu à maturité sublime en tout point. Bon, on va certainement me dire que c'est encore un énième shonen de sport, où les héros vaillants, forts, beaux et gentils parviennent à gagner dans les dernières secondes au détriment de leur rivaux eux aussi magnifiques (quoique parfois un peu retors) ; c'est certes vrais pour certains passages et pour quelques matches, mais quand même, ça passe à merveille. Sakuragi et sa bande sont fabuleux de facilité, livrent des batailles excitantes et enivrantes ; on en redemande à chaque tome, rien que pour voir l'éclosion des talents de l'équipe de Shohoku.
Puis le rythme s'accélère au fil des matches, avec des passages merveilleux, comme le match revanche contre Ryonan, où Sakuragi claque un dunk monstrueux à dix secondes de la fin, le genre de chose qui te fait hurler devant ton manga, peu importe si tu passes pour un gars bizarre dans la rue.
Si SLAM DUNK s'arrêtait là, ça vaudrait sans doute 8 ou 9.


Puis vient enfin le dernier match, contre Sannô : royal de bout en bout. A tel point que ces cinq-six derniers tomes ne sont pas notables en tant que tels. La première mi-temps est superbe, efficace mais reste assez sobre dans le genre sportif ; puis commence la seconde période, et là c'est le drame, une sorte de plaisir continu pendant des chapitres entiers. Ce qui est fabuleux, c'est que l'on voit précisément où Inoue veut nous embarquer, dans une sorte de pathos général où l'on verrait Sakuragi, Akagi, Rukawa, Mitsui et Ryota se surpasser, vaincre leurs adversaires par leur persévérance dans un ouragan d'émotions fortes. C'est exactement ce qui arrive, mais l'effet est démesurément accentué et ça donne quelque chose que l'on pourrait résumer en un mot : une tuerie. J'ai craqué mon budget hebdomadaire parce que je n'arrivais pas à tenir ; c'est une sorte de drogue en fait. Et il se produit aussi des effets secondaires non désirables : à chaque panier de Shohoku, c'est limite si je ne me mets pas à hurler ; à chaque panier de leurs adversaires, on aurait presque envie de jeter le manga par terre puis de se remettre en encourager les héros. Inoue réussit en plus à faire passer le temps seconde par seconde, accentuant cet effet de match interminablement long et qui fait durer le plaisir de cette sorte d'apothéose générale.
Le final en a laissé dubitatifs plus d'un mais c'est maitrisé de bout en bout, avec l'accomplissement de Sakuragi, héros martyre d'une équipe victorieuse mais qui reste médiocre et qui a joué pour le fun. Mais tout cela est juste expédié de manière anecdotique pour conserver l'aura d'un match parfait d'une équipe parfaite, d'un manga imparfait mais qui se sublime comme j'ai rarement vu dans certains passages légendaires.
Et enfin, c'est peu dire que Sakuragi est un des héros les plus fabuleux que j'ai jamais vu. On sent que son auteur s'est fait plaisir en lui faisant endosser le rôle angulaire de son manga. Ce qui est bien, c'est que Sakuragi ne sauve pas à lui seul son équipe ; il n'est encore qu'un amateur en apprentissage et doit s'intégrer au milieu de joueur ayant plus d'expérience que lui, mais comme il le rappelle à chaque page, c'est un « génie » qui dépasse ses adversaires sans le savoir. On est plusieurs fois ému, parfois jusqu'aux larmes quand on voit tout le parcours accompli par ce héros ridicule, merveilleusement fantasque et démesurément génial.

Pariston
10
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le 18 avr. 2012

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Pariston

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