Le sport représente un thème majeur dans les manga, pour tous les âges et tous les publics. En matière de shônen sportifs, nous trouvons deux écoles : ceux qui se veulent réalistes mais finissent par tomber dans l’excès en voulant souscrire aux archétypes du shônen moderne (comme l’apparition d’adversaires toujours plus puissants), et ceux qui jouent plus ouvertement la carte de l’outrance. Entre les deux, il y a Prince du Tennis.


Prince du Tennis, au premier abord, semble se vouloir crédible. Sauf que, dès le début, les 9 membres de l’équipe de Seigaku sont déjà d’improbables monstres de puissance, et ils auront encore 42 volumes pour s’améliorer ! Cela annonce bien ce qui va suivre, à savoir des techniques toujours plus spectaculaires, et des collégiens aux physiques d’adulte capables de vaincre n’importe quel joueur du circuit ATP. Avec une main attachée derrière le dos. Prince du Tennis est au tennis ce que Captain Tsubasa : Road to 2002 est au tournoi régional inter-maternelles de football de la région Poitou-Charentes.
Au moment où nous imaginons que les limites du bon sens ont été atteintes, le mangaka les explose en introduisant des joueurs avec des techniques divines d’essence bouddhiques. Et il arrive ensuite à aller encore plus loin.


Comment voulez-vous prendre au sérieux un manga pareil ? Impossible. Et ce ne sont pas les entrainements étranges imaginés par un des personnages principaux, basés sur un système de punition des plus efficaces, qui changeront quoi que ce soit à l’affaire. Prendre Prince du Tennis en attendant un shônen sportif pas trop excessif, genre Slam Dunk, c’est aller au devant de grandes désillusions, de quoi se taper la tête contre les murs. Ce qui explique certainement le manque d’intérêt du public à son égard sur le sol français. Seul une partie du lectorat féminin semble l’apprécier, pour la plastique avantageuse de ses protagonistes.


Pourtant, ce manga ne mérite pas un tel désamour. Le mangaka a réussi à imposer un format aux matchs de tennis, qui en font à la fois un sport individuel – ce qui permet donc de renforcer les individualités et les rivalités – et un sport d’équipe ; même si Ryoma est clairement le personnage le plus mis en avant, chaque membre de Seigaku aura droit à ses heures de gloire.
Surtout, l’auteur nous montre avoir pleinement assimilé les codes du shônen moderne ; il ne cherche jamais à proposer une histoire profonde, seulement un agréable divertissement, avec des protagonistes variés, de l’humour, et surtout des confrontations captivantes. Chaque volume se lit très vite – cela n’en fait pas toujours un investissement rentable – et surtout donne envie d’attraper le suivant pour continuer la lecture. Il s’agit d’un titre passionnant, addictif, tout sauf révolutionnaire mais qui remplit à merveille ses objectifs sur le moment.


Contrairement à de nombreux shônen sportifs, les matchs de Prince du Tennis ne donnent pas l’impression de s’étendre sur une multitude de chapitres au point d’en devenir interminables. Cela vient du format choisi : une confrontation entre deux équipes peut effectivement durer un ou deux tomes, mais comme elles sont découpées en plusieurs matchs individuels ou en double, elles proposent un renouvellement constant de l’intérêt.
Le trait du mangaka est précis et lisible. Son principal point fort vient de ses personnages aux apparences variées, aisément reconnaissables malgré leur nombre toujours croissant. Comme l’histoire elle-même, nous pourrions qualifier le dessin d’efficace et percutant ; il participe grandement au rythme insufflé par l’auteur dans son manga.


Vous trouvez Captain Tsubasa ridicule avec ses techniques aériennes et la passion surréaliste qu’éprouvent les personnages pour chacun de leurs matchs ? Alors effectivement, Prince du Tennis n’est certainement pas pour vous. Au-delà de ses excès, il s’agit pourtant d’un des manga les plus représentatifs du potentiel du shônen sportif moderne, avec ses confrontations trépidantes dont il devient très difficile de décrocher une fois la lecture commencée. En ce sens, peu de titres peuvent se targuer d’être aussi efficaces que Prince du Tennis. Jamais transcendant, jamais génial, mais tellement dynamique.

Créée

le 5 mars 2012

Modifiée

le 7 août 2012

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Ninesisters

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