Il y a plusieurs problèmes avec Maus et ils sont pour moi indépassables. Cela fait plusieurs années qu'on me conseille de lire ça et à chaque fois je l'ouvre et je le referme aussitôt : c'est moche. Je sais bien qu'en BD il ne faut pas faire de trop beaux dessins car sinon le lecteur s'arrête pour regarder chaque case attentivement et ça nuit totalement au rythme de lecture, mais là clairement il a tout faux. Non seulement le rythme de lecture est très lent car on a énormément de texte, c'est réellement fastidieux à lire, mais en plus les dessins d'apparence simplistes des personnages sont en fait noyés dans un décor beaucoup trop surchargé ce qui fait que lire est un véritable calvaire, il y a des traits partout. D'ailleurs j'ai galéré à savoir qui était qui tant tout le monde se ressemble...


Bref, graphique c'est un échec. Un échec d'autant plus cuisant que la BD est dans un format un peu bâtard, on n'a pas un format de BD franco-belge, mais un format qui fait 20cm de haut environ et c'est vraiment petit surtout lorsqu'il y a autant de texte. Donc déjà ça ne me donne pas envie d'aimer cette BD, ça me donne envie de partir en courant et j'ai dû me forcer à la lire.


Et donc cette histoire comporte une mise en abîme puisque l'on a le père d'Art Spiegelman qui raconte l'histoire à son fils. Franchement à part une dimension méta et la volonté de se mettre en scène je ne vois pas trop ce que ça apporte, pire ça vient montrer à quel point Art Spiegelman est quelqu'un de rancunier.


Je m'explique. Je n'aime pas le concept de venir dire les juifs sont des souris (sous-entendu des êtres faibles et vulnérables) et les nazis des chats (sous-entendus des prédateurs naturels). C'est de l'essentialisation. Alors je ne sais pas pourquoi il a fait ça, si c'est pour répondre à la propagande nazie qui considérait les juifs comme des rats et quelque part je m'en fous un peu, parce que ça dit quelque chose que ça soit conscient ou non : « le juif est une victime ». Alors entendons-nous bien, oui pendant la guerre c'était des victimes, mais Art se dessine lui-même sous la forme d'une souris, alors qu'à ce que je sache il n'est victime de rien... et sans doute pas de la barbarie nazie vu qu'il n'était pas né. Donc c'est problématique.


Pire, lorsque sa femme française convertie au judaïsme lui dit qu'elle aimerait bien être dessinée sous la forme d'une souris elle-aussi car juive, il lui dit que non, c'est pas possible, car elle est française. Elle veut, logiquement un animal mignon et il lui rétorque que non, c'est pas possible car elle est française et les français ont un long passé avec antisémitisme. Cela dit deux choses, la première c'est que pour lui une personne convertie n'est pas un vrai juif, mais surtout qu'à cause entre autres de l'affaire Dreyfus il ne peut pas représenter les français avec un animal sympa, essentialisant ainsi toute la nation française et ses citoyens à un événement qui s'est produit presque cent ans auparavant (et qui a divisé la société).


Bien entendu il nous joue la carte de la culpabilité en disant que les entreprises allemandes se sont enrichies sous le régime nazi, donc peut-être que cette culpabilité ne devrait jamais cesser, etc. Bref tout un discours plein de ressentiment qui est totalement inaudible. Ben oui, pour faire du fric on répand rarement autour de soi le bonheur et la joie de vivre.


Par contre j'aime bien le fait que le père soit montré comme une caricature de juif avare. Disons que ça permet de nuancer un peu tout ça, de ne pas le faire passer pour un ange, ce qui aurait été un peu déplacé et peu crédible. Parce que oui ce n'est pas parce qu'on a survécu aux camps allemands que tout à coup on est un être de pure bonté.
Aussi j'aime tout simplement le témoignage, je trouve ça pas inintéressant, mais encore une fois j'aurais préféré le lire sans dessin car entre le parti pris des animaux anthropomorphiques et la laideur du dessin...

Moizi
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le 23 avr. 2018

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Moizi

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