Chapitre un :
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Dernièrement, chose que je dois faire une fois par an, je lis un Comic Box. J'y apprends que très bientôt débutera la publication d'une énième saga cosmique, autour de l'impitoyable figure créée par Jim Starlin, Thanos. Un soudain vent de nostalgie s'empare de moi, et je me rappelle de la petite pile d'épisodes de Warlock, et les sagas cosmiques du monsieur que j'ai chez moi. Starlin, il est fascinant, c'est, disons, un de ces auteurs de comics avec, réellement, une voix propre. Le genre de ceux que même Marvel laisse au contrôle total de certains personnages (ce qui, d'après le susdit Comic Box 72, aurait été le cas avec Warlock, Thanos et consorts, un long temps). Triste d'apprendre, pour moi, que ces nouvelles sagas, dont le prochain Thanos Imperative (à paraître en vf dans Marvel Universe dès octobre), ne seront plus, et ne sont déjà plus, de son cru.

Qu'importe, le vent nostalgique s'empare de moi. Mais je veux de la nouveauté. Voilà que je trouve le dernier Marvel Universe paru, revue sur laquelle je ne m'étais guère penché, ayant en quelque sorte abandonné Marvel, disons environ depuis les années 2000. Soudain, une chose me frappe, après avoir feuilleté le magazine, lu quelques bouts : ça a l'air pas mal. Hein, hein. Je vois, carrément, un petit animal poilu (Rocket Raccoon !) en combinaison, avec un mec, accoudé à un bar l'air déprimé. Ho, ça m'a l'air marrant.
Bon, en deux/deux, je décide de tenter de trouver quelques-un des numéros précédents, mauvaise idée, puisque, le doigt dans l'engrenage, il faut vite remonter jusqu'à loin.
Mais de fait, il y a quelque chose de grisant et de fascinant dans la façon dont les nouveaux maîtres des lieux agencent cet univers et le font vivre. Oui, Dan Abnett et Andy Lanning, s'ils sont loin du ton de Jim Starlin, insufflent un souffle nouveau à des personnages déjà vieux.
Une ambiance générale me rappelle une vieille série un peu oubliée des 80'S de DC, les Omega Men, entre autres dessinés par Keith Giffen, qui, tiens donc, a été le premier à reprendre le flambeau (sur le run précédent, Annihilation, visiblement, mais en tant que scénariste) laissé par un Jim mécontent de n'avoir plus les coudées franches. Finalement, les dessinateurs contemporains et la couleur par ordi qui m'agace en général, tout ça sert bien le côté cosmique, éblouissant, explosif (à noter : Rick Magyar, un des encreurs, a occupé le même poste sur la susdite série Omega Men). Un petit quelque chose aussi des Micronautes de Bill Mantlo, non ? Oh, justement, voici Bug, un des anciens de cette équipe (le seul dont Marvel ait encore la licence !), et, ça alors, Rocket Raccoon est lui aussi une création du même Bill Mantlo !

Oui, épatant comme les deux scénaristes anglais arrivent à faire feu de tout bois, à gérer plusieurs séries et les coordonner pour donner du crédit et du peps à ce beau bordel. Épatant de les voir rendre hommage à de vieux personnages (dont certains aussi inattendus que Groot, créé par Stan et Jack, avant même Marvel), les réactualisant, les faisant vivre ensemble, dans des aventures épiques, politiques, complexes, et ça avec beaucoup d'humour.
Une chose qu'il faudra reconnaître : cela n'est possible que parce qu'il s'agit de Marvel (ça aurait fonctionné avec DC, aussi, je pense). C'est-à-dire que, même arrivant en cours, prenant le magazine et son interminable cross-over par n'importe quel bout, on plonge dans un univers à peu près connu, avec son background déjà établi. Quand on aperçoit les Inhumains, Flèche noire, Warlock, Nova, les Kree ou les Shi'Ar, si on a déjà un peu lu les comics de la maison, on sent derrière tout ça un certain poids, un passé qui donne déjà de l'épaisseur aux personnages, sans qu'il soit nécessaire de faire leur biographie. Ce qui n'aurait pas du tout fonctionné si nous avions eu affaire à une toute nouvelle série mettant en scène uniquement des personnages jusqu'alors inconnus.
Et il y a, évidemment, les possibilités techniques données par le fait d'avoir une grosse maison de la sorte. Un auteur seul, développant un univers d'auteur, aurait besoin de temps, de beaucoup de temps, pour tout faire d'une part, puis surtout pour asseoir son univers.

Enfin, même s'il le font avec une équipe dont la liste est longue à faire, Abnett & Lanning, laissent à leur tour entendre une harmonie de voix, celle d'un duo qui mérite d'être reconnu comme l'effective relève des prédécesseurs (qu'il s'agisse des premiers, Stan & Jack, de Jim, Keith, ou ce bon vieux Bill). Prometteur.


Chapitre deux :
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Il y a bien longtemps que je ne m'étais plus penché sur les comics de kiosques, car il me semblait que tout ce qui était vraiment intéressant avait trouvé une nouvelle place en librairie. Et puis il y a de trop nombreuses séries édités n'importe comment, dans des magazines collectifs, qui font qu'on doit lire deux ou trois autres séries en même temps, et tous ces fichus cross-overs, qui t'obligent à lire pendant trois mois tous les magazines publiés si tu veux comprendre ta seule série qui t'intéresse. Chose de bien : Marvel Universe a prit en gros depuis le début le parti de réunir toutes les séries cosmiques, incluant celles régulières et celles plus courtes, et suivant les cross-over cosmiques, sans obliger le lecteur à lire tous les autres magazines. Ce qui est assez agréable.

Mais surtout, je dois dire que, pourtant grand amateur de réalisme, de chroniques de vies et d'autobiographie (etc, etc), je trouve dans les comics récents une sorte de volonté qui découle peut-être des orientations prises par les réalisateurs contemporains, que ce soit sur X-Men ou Batman, une volonté de "concrétisation", dirais-je, même si le mot est laid.
D'une part, cela est peut-être dû à une ambiance morose des temps contemporains, tout est plus sombre : par exemple, les costumes bariolés des X-Men ont fait place à des uniformes noirs. Et tout est plus réaliste et technique : Batman n'est plus un justicier flippant de l'ombre qui avait un côté un peu fantastique, alors qu'il n'avait certes aucun pouvoir ; il est désormais un casse-cou sur-entraîné avec des milliers de gadgets et une panoplie complexe.
Les dessinateurs récents ont tendance à être plus réalistes, plus urbains, plus détaillés. Je reste sur mon exemple de Batman, car il es symboliquement criant : le Batman 90'S découlait des films de Burton et des dessins animés aux traits simples. Nous avions affaire à lui plus du côté du mythe créé. C'est-à-dire qu'on le voyait plus de l'extérieur, tel la créature qu'il voulait montrer à ces ennemis. Une créature fantastique. Le Batman des 00'S puis des 10'S, nous a montré en détail les coulisses de la créature. C'est certes fascinant, toujours, valable idéologiquement et esthétiquement. Mais c'est un fait du comic contemporain. Nous avons perdu un certain émerveillement naïf.
C'est peut-être ce côté fascinant (odyssée cosmique, personnages étranges et colorés, aventures épatantes...) qui hypnotise et captive dans ces sagas cosmiques.


Chapitre trois :
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Ici, cependant, en digne héritage de Jim Starlin, on sent derrière l'apparence d'aventure éblouissante, une certaine tension plus adulte : d'une part un certain humour bien senti, notamment dans les dynamiques de groupes ; mais aussi à un niveau légèrement méta-discursif, dans un mood for/da esthétique (copyright Senscritchaiev), détournant certains poncifs du genre super héroïque avec une aisance pleine d'ironie. Tous les ressorts grossiers du type dimensions parallèles, crise de l'univers, implosion, écroulement, failles spatiotemporelles, sont bien dosés et aussi absurdes puissent-ils être, sont tellement bien intégrés au mouvement général, que tout reste crédible.

Une des forces aussi de ces nouveaux récits cosmiques, c'est un certain degré de complexité dans les conflits. En effet, loin du simple combat gentils-versus-méchants, un vaste échiquier géopolitique est mis en place. Certainement, d'une certaine façon, héritage de l'autre grand arc Marvel, Civil War, qui voyait (c'est du moins le peu que j'en sais) deux groupes de super héros s'affronter, ce pour des raisons politiques, qui faisaient qu'il devenait difficile de savoir quel groupe suivre, qui étaient vraiment les bons, et qui était les méchants absolus. Cette ambiguïté reste très présente dans les conflits de War of King.
Tous ces éléments font de la lecture de ces épisodes quelque chose d'assez prenant, qui digère et réinterprète toutes les séries cosmiques déjà existantes avec un certain brio. Au cas où, c'est donc conseillé pour ceux qui voudraient se mettre du comic sous la dent et ne savent pas trop où donner de la tête dans le brouhaha actuel. Et ça sera tout ce que j'aurais à dire aujourd'hui. Pour ceux que ça intéresse.
colville
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le 11 sept. 2011

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