Lydie
7.6
Lydie

BD franco-belge de Zidrou et Jordi Lafebre (2010)

De la Folie en Réalisme Ordinaire

Lydie raconte l’invisible lien entre les habitants d’une impasse de caractère.


Le dessin de Jordi Lafebre est fin, précis. Les visages sont marqués et expressifs, le décor toujours vivant. Et pour mieux nous plonger dans



l’atmosphère incertaine des années 30,



l’artiste utilise des couleurs ternes et surannées, illuminées par moments de subtiles ou d’éclatantes touches vives. Une case est particulièrement belle, de solitude et de désespoir : celle d’une mère éplorée, en nuisette sous la pluie, les yeux implorants une Vierge Marie de bois dans une nuit bleu gris, et les lueurs de la lampe au sol, reflets colorés des ronds d’eau à l’impact des gouttes, ça dit beaucoup de l’art du dessinateur. Et c’est beau.


Le scénario développe



une longue poésie de réalisme social.



Dans le décor central d’une impasse vivent plusieurs familles. Camille, la fille d’Augustin – veuf depuis l’enfance de celle-ci –, Camille accouche d’une enfant mort-née, Lydie. Après deux mois de résignation, Camille cède à la folie et présente à son père, puis aux voisins, dans ses mains vides, le fantôme de la petite Lydie. Et contrairement à ce qu’on pourrait attendre, tous acceptent de jouer le jeu pour le bonheur de la pauvre Camille. Et tous ont un mot gentil, une attention pour le fantôme que Camille traîne désormais partout avec elle. La poésie solidaire des habitants de l’impasse a un air de cinéma réaliste français, et la belle histoire touche tout le monde, le bonheur de l’une participant d’une atmosphère bienveillante au sein de la petite communauté. L’acceptation de la folie de Camille crée un lien invisible mais fort entre tous, profondément humain. Et quand de nouveau le drame la touche quelques années plus tard, la solidarité du petit univers s’affirme plus encore. Le temps impose l’invisible Lydie à tous, et quelque chose se crée.


La frontière tangible du surnaturel dans les dernières pages joue avec l’aspect magique des interactions sociales positives. L’histoire de ces modestes gens a



l’envergure citoyenne de ce que la solidarité devrait être :



une bienveillance fraternelle. L’album est tendre, et la narration, fluide, nous émeut au coin d’une case, à la virgule d’une bulle. Belle découverte !

Matthieu_Marsan-Bach
8

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le 14 mars 2015

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